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Dernier jour en Russie d’un référendum sous le signe de Poutine

1 juillet 2020, 16:38

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Dernier jour en Russie d’un référendum sous le signe de Poutine

Les Russes doivent approuver mercredi une vaste réforme constitutionnelle initiée par Vladimir Poutine officiellement pour organiser l’avenir du pays, mais que l’opposition voit surtout comme un moyen de perpétuer sa mainmise sur la Russie.

Le scrutin, prévu à l’origine en avril, a été repoussé à cause de la pandémie de coronavirus. Pour éviter une trop forte affluence dans les bureaux de vote, il s’est déroulé sur une semaine et les électeurs devaient se munir de masques et de gants.

Le président Poutine a, lui, voté à Moscou en fin de matinée mercredi mais ne portait pas de moyens de protection, contrairement à l’assesseur face à lui.

Les premiers résultats sont attendus à partir de 18h00 GMT. Après six jours de vote, la participation atteignait 56,28% à 08H00 GMT.

Le doute n’est guère permis quant à l’issue du vote: les réformes ont été approuvées par le législateur en début d’année et le nouveau texte de la Constitution est déjà en vente dans les librairies.

Vladimir Poutine s’est adressé mardi aux 110 millions d’électeurs pour les appeler à garantir «la stabilité, la sécurité et la prospérité» du pays qu’il se targue d’avoir sorti du chaos post-soviétique.

Courant juin, il avait jugé nécessaire l’amendement lui accordant l’option de deux mandats supplémentaires à l’issue de l’actuel en 2024, car la classe politique ne devait pas se perdre dans «une quête de successeurs potentiels».

Dieu, mariage, retraite

Ce changement lui permettrait de rester au Kremlin jusqu’en 2036, l’année de ses 84 ans. D’autres révisions renforcent certaines prérogatives présidentielles.

La réforme introduit aussi dans la Constitution des principes conservateurs chers au président --foi en Dieu, mariage réservé aux hétérosexuels, enseignement patriotique--, ainsi que des garanties sociales, comme l’indexation des retraites ou un salaire minimum supérieur au minimum vital.

Les détracteurs de M. Poutine, notamment l’opposant Alexeï Navalny, jugent que le référendum n’a d’autre but que de lui garantir «une présidence à vie» et que les autres mesures visent à faire venir les Russes aux urnes.

A Saint-Petersbourg, Sergueï Goritsvetov, 20 ans, s’est opposé au maître du Kremlin dans les urnes mais sans y croire. «J’ai voté contre et j’espère qu’on sera beaucoup, mais je ne sais pas trop ce que ça changerait. Au moins j’ai exprimé mon opinion».

A l’autre bout du pays, à Vladivostok, Valentina Koungourtseva, retraitée de 79 ans, est, elle, ravie: «Pour nous les retraités, c’est important, tous les ans notre pension va être rehaussée». Quant à M. Poutine, «tant qu’on aura un bon président, la vie sera bonne».

Le vote intervient alors que la popularité du président russe a baissé dans la foulée d’une réforme décriée des retraites et de la crise du coronavirus. De mai 2018 à juin 2020, son taux d’approbation mesuré par l’institut indépendant Levada est passé de 79% à 60%.

Selon les critiques du Kremlin, le pouvoir a multiplié les ruses pour s’assurer un succès retentissant et une participation forte mercredi.

Succès sur-mesure

L’aspect le plus insolite aura été l’installation de bureaux de vote de fortune en extérieur, dans les cours, des terrains de sports ou de jeux, sans grand respect du secret du vote ni surveillance adéquate des urnes.

Le but de la manoeuvre, d’après l’opposition, n’est pas de protéger l’électorat de la maladie Covid-19 mais de se fabriquer un résultat sur-mesure.

«Quand la Constitution se vote sur une souche d’arbre ou dans le coffre d’une voiture, ça n’a pas l’air sérieux», a admis auprès de l’AFP sous couvert d’anonymat l’assesseur d’un bureau de vote du Nord-Ouest de la Russie.

L’ONG spécialisée dans l’observation électorale Golos, honnie des autorités, a en outre dénoncé des pressions hiérarchiques sur les fonctionnaires et salariés pour qu’ils aillent voter.

Elle a aussi signalé d’énormes différences de participation électorale d’une région à l’autre.

«De tels écarts ne peuvent s’expliquer que par le fait que des citoyens soient forcés aux urnes dans certaines régions ou alors par des falsifications directes», a affirmé l’ONG.

De son côté, la cheffe de la commission électorale, Ella Pamfilova, n’a constaté «aucune infraction sérieuse durant toute la période électorale».