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Christophe Berçon: «Je me suis retrouvé dans une chambre avec mon père, c’est bien mieux moralement pour combattre le Covid-19»

5 mai 2020, 19:29

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Christophe Berçon: «Je me suis retrouvé dans une chambre avec mon père, c’est bien mieux moralement pour combattre le Covid-19»

Il a souffert physiquement avec l’impression parfois d’avoir couru plusieurs marathons. Figure connue de l’athlétisme à la Réunion, Christophe Berçon, ancien athlète de haut niveau, entraîneur et président du club Run Oxygène, a été atteint par le virus du Covid-19 à la mi-mars. Un double drame qu’il a vécu et dont il se remet lentement à son domicile puisque c’est en allant chercher son père Marcel, souffrant à Paris, qu’ils ont tous deux contracté la maladie. Hospitalisés dans la même chambre au CHU de Bellepierre, ils ont combattu ensemble et ont guéri à la mi-avril.

Dans quelles circonstances avez-vous contracté le virus ? Comment s’est-il manifesté ? Quels ont été les premiers symptômes ?
J’ai été hospitalisé durant dix jours au Centre Hospitalier Universitaire (CHU) de Bellepierrre à Saint-Denis de la Réunion pour me soigner du Covid-19. Je ne sais pas exactement où j’ai contracté ce virus, si c’est avant mon départ pour Paris le 13 mars ou en arrivant en région parisienne. Je me suis rendu à Paris pour retrouver mon père qui se soigne d’un cancer de l’œsophage là-bas.

A quel moment avez-vous été hospitalisé ?
Au vu de la situation, son opération était devenue de plus en plus aléatoire car il n’y avait plus de place en réanimation. Donc, il nous fallait rentrer à Saint-Denis de la Réunion chez nous. Mon père toussait énormément. Pour ma part, j’avais un mal de tête continuel, une grosse fatigue, des courbatures partout dans le corps et des difficultés respiratoires.

«Malheureusement, la prise de conscience ne sera que ponctuelle et les intérêts financiers et économiques reprendront le dessus au fil des jours.»

Dès lors c’est un combat pour la vie qui s’est engagé. Le fait d’être sportif, d’avoir appris à souffrir sur les pistes de l’effort, le fait d’être policier, ancien athlète de haut niveau, coach d’athlétisme et président du club Run Oxygène, aide-t-il dans ces moments-là ?
Le 30 mars, à notre arrivée à l’aéroport de Saint-Denis de la Réunion, nous avons été examinés par des médecins et testés pour le Covid-19. Dès lors, nous avons été transportés au CHU de Saint-Denis. Le lendemain matin, le résultat tombait, mon père et moi-même étions positifs.

Votre père et vous avez été hospitalisés dans la même chambre au CHU de Bellepierre...
Je me suis retrouvé dans une chambre avec mon père et là fut notre chance car père et fils ensemble, c’est bien mieux moralement pour combattre.

Comment avez-vous géré cette double peur ?
Je suis toujours resté positif me concernant car le fait d’être sportif depuis de très longues années est un atout majeur. Par contre, j’étais très inquiet pour mon père dont l’état de santé était critique. Il était chaque jour sous oxygène et l’état d’un de ses poumons était, au vu du scanner, très mauvais. A un moment, j’étais sortant de l’hôpital. Cependant, j’ai pu rester dans la chambre avec mon père trois jours supplémentaires pour l’aider à combattre. Ensuite, je suis sorti et j’ai regagné mon domicile.

Vous êtes guéri. Comment se porte votre père qui est âgé de 82 ans ?
Mon père est sorti finalement cinq jours après moi, miraculeusement, si l’on peut dire, car avec son âge et ses pathologies, il n’y avait pas beaucoup d’espoir. Malgré l’absence de traitement efficace contre ce virus, le personnel soignant a été exceptionnel.

Etes-vous toujours tenu à un confinement strict ? Etes-vous toujours contaminant ?
Mon père est confiné chez moi durant dix jours, il est très affaibli et fatigué. Je suis également encore très fatigué. A l’heure actuelle, et selon les dires du personnel de l’hôpital, je ne serais plus contaminant, mais cela doit être mis au conditionnel puisque malgré ma demande de test pour le vérifier, il n’a pas été possible d’en faire puisqu’il n’y a pas assez de produits à la Réunion. Idem pour les masques que certains personnels de l’hôpital confectionnent eux-mêmes.

Comment vous organisez-vous quotidiennement ? En l’absence d’un vaccin, la meilleure protection reste le confinement et les gestes barrières ?
Quotidiennement, je m’occupe de mon père. J’essaie de lui faire des repas les plus équilibrés et avec un apport en vitamines. Le confinement et les gestes barrières sont les meilleures solutions actuellement en l’absence de vaccin.

Faut-il craindre, selon vous, la résurgence de la contamination, cette deuxième vague souvent évoquée ici et là ?
Pour ce qui est d’une deuxième vague, effectivement, elle est évoquée par certains. Mais je ne suis pas assez calé pour pouvoir prétendre m’exprimer là-dessus.

Quelles leçons tirez-vous de cette tragédie qui frappe la planète entière ?
Ce qui est certain, à mon sens, c’est que l’homme en général n’est pas assez respectueux de la planète et à force de la dégrader, de la salir et de la polluer, en voici une des conséquences.

Est-ce que l’humanité paie, d’une certaine façon, pour ses excès et ses extravagances ? Fallait-il ce coup d’arrêt pour provoquer une prise de conscience salutaire ?
Malheureusement, la prise de conscience ne sera que ponctuelle et les intérêts financiers et économiques reprendront le dessus au fil des jours.

Etonnamment, la planète respire depuis que l’Homme tousse et arrête de polluer l’environnement dans lequel il vit…
Pour les générations futures, cela sera plus compliqué, même si j’espère me tromper.

Christophe Berçon et son fils Enzo courant sur la plage.

Une fois que vous ne serez plus contaminant, une fois que vous pourrez à nouveau marcher librement dans les rues, quelle est la première chose que vous aimeriez faire ?
Pour ma part, j’ai hâte de pouvoir refaire un footing en pleine nature, même si je sais que la reprise sera un peu difficile. Vous savez, même à l’hôpital et malgré les douleurs, j’ai essayé de me maintenir légèrement en faisant quelques exercices d’abdominaux.

Le sport aussi est à l’arrêt, tout comme le monde et l’économie. La saison 2020, une saison à rayer du calendrier ?
La saison sportive 2020 est sans doute terminée sauf si par bonheur cette crise se terminait rapidement. Le principal est de rester en bonne santé et de miser sur la prochaine saison, c’est ce que je préconise aux athlètes que j’entraîne.

J’ai vraiment aimé toutes ces années à la Réunion où j’ai pu inviter des athlètes de l’île Maurice, de France, d’Afrique du Sud, des Seychelles, du Kenya, du Maroc, de Madagascar, pour des stages ou des compétitions, et avec lesquels j’ai gardé d’excellents rapports humains et amicaux.

J’ai également des pensées pour des athlètes et amis de l'île Maurice, Nicolas Boissèque, Jean-Luc Vilbrim, Judex Dhurone, car je sais que le virus est actif également chez vous. Un seul mot d’ordre pour maintenant et pour le futur : respectons-nous et aimons-nous les uns les autres comme on doit le faire pour notre planète.

 



Portrait

<h3>L&rsquo;athlétisme: de très belles rencontres humaines</h3>

<p>Christophe Berçon voit le jour le 8 septembre 1969 à Pantin (93), une banlieue de Paris. Il grandit à Aulnay-sous-Bois et jusqu&rsquo;à l&rsquo;âge de 38 ans en région parisienne. Une mutation professionnelle le conduit à la Réunion en septembre 2008. Il voulait surtout se rapprocher de ses enfants qui vivaient à l&rsquo;île sœur. Père de trois enfants, Christophe Berçon vit aujourd&rsquo;hui seul avec son petit garçon Enzo, 9 ans, une semaine sur deux, à Saint-Denis. Sa fille Océane, 23 ans, termine ses études de sage-femme en Belgique, et son fils Luca, 21 ans, vit à la Réunion.</p>

<p>Policier depuis 1993, Christophe Berçon a eu le privilège d&rsquo;être détaché en tant qu&rsquo;athlète de 1995 à 2007. C&rsquo;est durant cette période qu&rsquo;il a pu réaliser ses meilleures performances : 14&rsquo;32 au 5000m ; 29&rsquo;32 sur 10 km ; 44&rsquo;&rsquo;49 sur 15 km et 1h05&rsquo;17&rsquo;&rsquo; sur semi-marathon.</p>

<p>Durant ces années, Christophe Berçon a eu la chance de pouvoir visiter le monde grâce aux différentes compétitions. Il a été membre de l&rsquo;équipe de France police durant cette période avec plusieurs titres de champion de France. Il a même goûté à une sélection avec l&rsquo;équipe de France pour un match à Cuba sur semi-marathon. Il a également été champion de Paris du 10 km et champion d&rsquo;Ile-de-France de semi-marathon. L&rsquo;athlétisme est synonyme pour lui des rencontres humaines les plus belles qui soient.</p>