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Beejhaye Ramdenee: «Pour transformer, il faut former de façon continue»

1 février 2020, 15:57

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Beejhaye Ramdenee: «Pour transformer, il faut former de façon continue»

Dès lundi, la MBC entame la phase pilote de son académie des médias avec une formation extensive animée par l’homme des médias Jacques Maunick. L’objectif, affirme Beejhaye Ramdenee, est de transformer la station.

Vous avez annoncé votre intention de mettre sur pied une académie des médias. Où en êtes-vous avec ce projet ? 
Il avance. Nous avons réalisé que la radio et la télévision, telles qu’on les connaît actuellement, sont en voie de disparition. De par le monde, les stations de radiotélévision sont en difficulté. Et comme elles le font, la MBC a besoin de se réinventer, de se transformer. Pour transformer, il faut former de façon continue. 

La MBC est une grosse structure comptant 700 employés et le seul moyen de faire de la formation est par le biais d’une académie des médias, qui enseignerait les métiers modernes de la radio et de la télévision. Certains des freelances que nous avons récemment fait partir en raison du fait qu’ils avaient atteint ou dépassé l’âge de la retraite pourraient être utiles à l’académie. La formation que je veux introduire s’appliquera à tout le monde, des techniciens de surface jusqu’au directeur général. Je veux créer une culture d’entreprise.

N’existe-t-elle pas déjà en 64 ans d’existence de la station ? 
Elle n’est peut-être pas vraiment présente à la MBC. Toutes les entreprises ont une culture. C’est une façon de se comporter, de travailler, de traiter ses collègues, les visiteurs. Certains l’ont naturellement et d’autres pas. Il doit y avoir une seule culture pour tous. 

Nous avons de nombreuses personnes à l’interne, qui ont une longue expérience de la station et qui peuvent devenir des chargés de cours à l’académie. Mais il est bon aussi de recourir à des formateurs externes, qui ont un regard et des perspectives différentes. Je pense aux institutions pouvant offrir de tels formateurs comme l’université de Technologie, le Rabindranath Tagore Institute, l’Institut français de Maurice, le British Council, France Télévision, le groupe NRJ, qui a une école des médias à La Réunion. Il y a aussi l’African Broadcast Union avec qui nous avons des liens et du côté de l’Asie, nous sommes affiliés avec plusieurs organisations et il ne faut pas oublier que nous faisons partie de la SADC. On va créer un pool de formateurs. Le responsable de la formation sera Ashok Beeharry, qui est un journaliste de longue date.

Y a-t-il une phase pilote à cette formation qui paraît extensive ? 
Oui et elle démarre dès lundi avec Jacques Maunick, qui compte 50 ans d’expérience au sein des médias.

Les mauvaises langues ne manqueront pas de dire qu’il a été recruté en raison de son lien de parenté avec l’épouse du Premier ministre. 
Personne ne m’a demandé de retenir les services de Jacques Maunick. Il a été recruté sur la base de ses compétences professionnelles reconnues de tous. Il est bon de savoir que M. Maunick n’était d’abord pas intéressé par ma proposition. Il avait été approché par d’autres médias aussi et avait refusé. J’ai su le convaincre. Il a accepté lorsqu’il a compris qu’on a une vision et que notre mission est d’atteindre le niveau international pour la radio et la télévision d’ici 2020.

Qui va-t-il former ? 
Il formera les journalistes radio et télé, les animateurs et présentateurs, les cameramen, les monteurs, les chauffeurs. Pour tout ce qui est technique, nous aurons d’autres formateurs. Jacques Maunick mettra en forme notre vision et notre stratégie. Il démarrera chaque matin par un post-mortem.

Ne faisiez-vous pas déjà cet exercice de post-mortem de l’information ? 
Cela se faisait mais avec Jacques Maunick, l’approche sera différente. Il verra les choses avec un regard plus critique et fera ressortir nos failles, tout en soulignant là où l’on pourrait mieux faire. Les sujets internationaux que nous traitons seront comparés au traitement accordé par les radios et télévisions étrangères. Il animera des cours pratiques et reverra aussi le français et le créole qu’il maîtrise extrêmement bien. Il nous faut avoir un format MBC sans pour autant copier les autres. J’ai aussi chargé Jacques Maunick de revoir les grilles de programmation. Nous devons avoir des chaînes de télé et de radio thématiques car les chaînes généralistes sont révolues.

Combien de temps durera cette formation ? 
Elle sera initialement de trois mois.

Jacques Maunick ne mâche pas ses mots et il utilise un langage parfois vert, qui n’est pas forcément au goût de tout le monde ? 
Nous avons eu plusieurs sessions de travail et j’ai set the tone. Et je crois que la formation se déroulera sans heurts. Nous la démarrons sur une base pilote et d’ici six mois, nous allons formaliser l’académie des médias après avoir obtenu un accord des institutions de formation susmentionnées que nous avons déjà commencé à contacter d’ailleurs.

Jacques Maunick sera-t-il chargé de la révision du contenu et en particulier politique ? 
Nous avons une ligne éditoriale qui est définie par la MBC Act. Celle-ci définit l’approche, l’angle, la manière de traiter un sujet. Et notre Director of News est Ravin Joypaul. On nous reproche de suivre le Premier ministre dans tous ses déplacements. Or, c’est le Premier ministre du pays et à ce titre, il adresse des messages à la nation. Je considère donc qu’il est important de véhiculer ses messages.

Ce n’est pas tant de couvrir toutes les sorties du Premier ministre qui dérange mais de minimiser les sorties des partis de l’opposition. 
Nous ne sommes pas une station de radiotélévision privée et de ce fait, nous n’entrons pas dans les controverses et les polémiques. Si quelqu’un de l’opposition comme du gouvernement dit quelque chose de controversable, nous n’allons pas entrer dans la polémique.

À quand date la dernière réunion du conseil d’administration ? 
À lundi. Elle a été présidée par le secrétaire permanent au bureau du Premier ministre, Premode Neerunjun. Les affaires courantes ont été abordées. Il y aura deux nouveaux membres qui seront recrutés d’ici un mois pour remplacer les démissionnaires. Leur profil ? Si je me fie à la MBC Act, il nous manque une personne qui a une expérience économique et financière et une autre avec un profil de ressources humaines.

On s’est laissé dire que les comptes de la MBC sont dans le rouge ? 
Ils l’étaient. C’était un lourd héritage. Mais ce n’est plus le cas maintenant car dès que Pravind Jugnauth a été nommé ministre des Finances en 2017, il a négocié avec le gouvernement chinois pour rayer notre dette de Rs 400 millions par rapport à notre bâtiment. Au fur et à mesure, il a épongé toutes nos dettes qui avoisinaient le milliard de roupies.

Certains employés se plaignent que depuis 2013, il n’y a pas eu d’exercice de promotion? 
En 2013, il y a eu une série de promotions automatiques, comme une vague. Nous, nous croyons dans la méritocratie. Il nous faut moderniser la MBC et la rendre plus crédible sans tomber dans les travers des promotions distribuées comme des confettis. Nous travaillons en collaboration avec le syndicat et tout le monde est d’accord sur le fait qu’il faut d’abord prouver ses compétences et le reste suivra. Nous ferons au préalable un audit des ressources humaines. Nous devons avoir the right people at the right place. Cela ne veut pas dire que l’on va toucher au gagne-pain des gens mais les positionner là où leurs compétences seront mises en exergue.

Vous avez remercié 32 freelances mais il se chuchote que vous avez recruté 150 personnes. Info ou intox ? 
Il n’y a pas eu d’embauche. Je suis un gestionnaire qui se respecte et pas un plaisantin. Nous avons simplement pris 25 stagiaires, déployés dans plusieurs départements car notre personnel est vieillissant et certains partiront à la retraite. Il nous faut trouver des jeunes à former et qui leur succéderont. Sur ces 25, il se peut que seulement cinq d’entre eux fassent l’affaire.

De toutes les façons, les métiers de la radiotélévision changent. Le digital a transformé le journalisme. Il nous faut recruter des jeunes qui maîtrisent le digital sur le bout des doigts. Les outils aussi ont changé. Nous avons notre plan stratégique et nous renouvelons nos équipements. Nous avons offert une couverture de qualité pour les élections. Je tiens à préciser qu’il se peut que pour la première fois dans les annales de la MBC, il n’y a eu aucun recrutement avant et pendant la campagne électorale. Il n’y a eu aucune pression politique sur moi pour recruter ou favoriser un item au détriment d’un autre ou quelqu’un. Je le jure.

Vous avez émis une circulaire adressée au personnel par rapport au temps passé à la cantine. Y a-t-il eu abus ? 
Tout le monde a des horaires de travail et on mise sur l’efficience. Il se peut qu’inconsciemment, des gens ne réalisent pas que le temps passe lorsqu’ils sont à la cantine. Cette circulaire n’a pas pour but de les surveiller, ni de jouer au gendarme. C’est juste un petit rappel. Cela dit, je crois davantage dans la qualité du travail que dans le nombre d’heures passées au bureau.

La MBC a acheté deux camions-régies d’Italie, qui ont coûté à peu près Rs 100 millions. Hormis pour les JIOI et la visite papale, à quoi ont-ils servi ? 
Leur achat était une nécessité car autrement, nous n’aurions pas pu retransmettre ces évènements avec des images et un son irréprochables. Nous les utiliserons pour de grands évènements et pour des activités commerciales.

Lesquelles ? 
À Maurice il y a énormément de concerts, de spectacles, de tournois, notamment de golf, qui sont organisés. Avec les 24 caméras de ces deux camions-régies, on peut filmer ces évènements et vendre les images. Tout le monde à la MBC adhère à ce plan qui a pour but de MakeMBC great again.