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Séisme en Turquie: la peur des répliques plus forte que le froid

26 janvier 2020, 11:54

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Séisme en Turquie: la peur des répliques plus forte que le froid

 

Une dizaine de personnes emmitouflées dans des couvertures bariolées sont accroupies autour d'un feu de fortune. La nuit est glaciale et Esra Kasapoglu tremble de froid. Mais pour elle, «hors de question de rentrer à la maison».

Comme elle, de nombreux habitants d'Elazig, ville de l'est de la Turquie secouée vendredi par un puissant séisme d'une magnitude de 6,7, ont préféré passer une nouvelle fois la nuit dehors, malgré les températures pouvant atteindre - 10°C.

Samedi soir, une réplique de magnitude 5,1 a avivé la peur des habitants, qui par milliers se sont rués dans la rue aux cris de «séisme, séisme !»

Selon l'agence gouvernementale des situations de catastrophe (AFAD), plus de 500 répliques de magnitude comprise entre 1,0 et 5,1 se sont produites depuis la secousse de vendredi soir qui a fait au moins 31 morts, selon un nouveau bilan dimanche.

«Notre immeuble est ancien et il y a des petites fissures. Dieu sait s'il résistera en cas de forte réplique. On va rester ici toute la nuit», explique Esra.

«Notre psychologie en a pris un coup. Tout à l'heure, mon fils est sorti de la maison en criant quand une veste s'est décrochée du porte-manteau. Quand je suis à la maison, je regarde le lustre toutes les minutes pour voir s'il ne se balance pas», explique-t-elle.

Plus loin, adossés contre un mur faisant face à l'immeuble qu'ils habitent, Abdi Güney et sa famille attendent.

«A chaque fois que ça tremble, on a peur. On est obligé de se précipiter dehors. Tout à l'heure, je faisais mes ablutions avant la prière et soudain le bâtiment s'est mis à trembler», raconte M. Güney.

«Nous avons été obligés de sortir. Comme la nuit dernière, nous étions déjà là», ajoute-t-il, pendant que des voisins lui apportent à lui et à sa famille de quoi manger.

Selon le ministère de l'Intérieur Süleyman Soylu, plus de 15.000 personnes sont hébergées dans des gymnases et des écoles, et plus de 5.000 tentes ont été installées dans la ville pour accueillir les habitants.

Mais «les gymnases sont pleins et il n'y a plus de tentes», déplore M. Güney. «Donc nous devons attendre ici.»

Destin

A travers Elazig, agglomération de quelque 350.000 habitants, des propriétaires de restaurants, d'hôtels ou même de salons de mariage ouvrent leurs portes pour héberger ceux qui veulent y passer la nuit. L'heure est à la solidarité.

Mais nombreux sont ceux qui préfèrent quitter Elazig.

Fatih, un homme voûté à la moustache épaisse, installe sa fille sur la banquette arrière de sa voiture pendant que son épouse jette avec hâte quelques sacs dans le coffre.

Où vont-ils ? «Au village», dit-il en désignant de la main l'horizon. «Mes parents y vivent, ce sera mieux là-bas».

Entre ceux qui préfèrent dormir dehors et ceux qui préfèrent partir, rares sont les lumières qui s'allument à la nuit tombée. Certains quartiers prennent des allures de ville fantôme.

Murat, restaurateur de 40 ans, est le seul habitant de son immeuble de cinq étages à être resté. «On ne peut pas fuir le destin», dit-il, en écrasant une cigarette su sol.

Parmi les habitants qui préfèrent tout de même essayer, quelques uns ont été particulièrement prévoyants. 

Tirant une leçon des séismes qui secouent régulièrement la région d'Elazig, Ismail Karacan et son épouse ont ainsi fait construire, il y a cinq ans, un préfabriqué au milieu d'un verger qu'ils possèdent à la sortie de la ville.

«Je pense qu'on va rester là-bas une bonne semaine», dit-il.