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Uber privé de permis à Londres, les chauffeurs inquiets

26 novembre 2019, 09:26

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Uber privé de permis à Londres, les chauffeurs inquiets

La plateforme de voitures avec chauffeurs Uber a vu son permis d’exercer suspendu par la ville de Londres, l’un de ses principaux marchés, à cause de failles sur son système informatique permettant à des milliers de conducteurs sans permis de prendre en charge des passagers frauduleusement.

La plateforme compte faire appel et continuera de fonctionner jusqu’à ce qu’une décision définitive soit rendue, a-t-elle réagi dans un communiqué, sans rassurer les nombreux chauffeurs qui dépendent d’elle, inquiets pour leur avenir.

Uber n’est «pas apte» à détenir une licence à Londres, son plus gros marché européen, a indiqué Transport for London, relevant notamment une «faille» dans l’application qui permet à des conducteurs sans permis d’installer leur photo sur les comptes d’autres conducteurs, ce qui s’est produit «au moins sur 14.000 trajets» ces derniers mois, ou à des conducteurs sans permis ou au permis suspendu de créer des comptes Uber actifs.

Jennifer Beare, cliente d’Uber, dit à l’AFP ne jamais s’être sentie «vraiment en danger» mais qu’il lui est arrivé de voir un conducteur arriver pour la prendre en charge «avec une plaque d’immatriculation différente» de celle qui était indiquée sur l’application, et quelqu’un qui «savait tout sur moi».

En septembre, l’autorité des Transports de Londres avait renouvelé pour deux mois seulement l’autorisation d’exercer d’Uber, dans l’attente de garanties en termes de sécurité.

TfL a reconnu qu’Uber avait réparé certaines erreurs, mais de façon insuffisante.

Parmi les fonctionnalités de sécurité lancées par Uber, les passagers peuvent désormais entrer directement en contact avec les services d’urgence à travers l’application. Des «capteurs» sont aussi sensés détecter si un véhicule reste immobilisé trop longtemps, pour détecter les accidents.

Le maire de Londres Sadiq Khan a estimé que toutes les entreprises devaient «respecter les règles».

La société compte 45.000 conducteurs et 3,5 millions de clients dans la capitale britannique.

- «Course vers le bas» -

En 2017, la TfL avait privé le géant américain de sa licence pour des questions de sécurité, mais Uber avait continué d’exercer dans la capitale britannique avant une victoire devant une cour d’appel qui lui avait accordé un permis de quinze mois.

Le pionnier des applications de véhicules partagés est régulièrement mis en cause pour des problèmes de sécurité à bord pour ses usagers comme ses conducteurs, ce qui a contribué à entacher sa réputation à travers le monde, sans parler des polémiques sur la rémunération insuffisante de ses chauffeurs.

Le syndicat Unite, qui représente les chauffeurs de taxi traditionnels, s’est réjoui de la décision de la TfL, affirmant qu’Uber a créé «une course vers le bas».

A l’inverse, le syndicat des travailleurs indépendants de Grande-Bretagne (IWGB) a déploré «un coup massif» porté aux milliers de conducteurs qui travaillent pour Uber «dans des conditions précaires», qui risquent «de se retrouver au chômage et qui croulent sous une montagne de dettes» pour rembourser leur véhicule. Il demande «une réunion urgente avec le maire».

Amor Miah est l’un de ces chauffeurs qui s’angoisse pour son avenir. «Mes cinq beaux-frères sont aussi conducteurs pour Uber et depuis ce matin on n’arrête pas de s’appeler pour discuter» de la décision de la TfL.

Ce père de famille de 52 ans raconte à l’AFP s’être endetté pour acheter une voiture (24.000 livres) et grâce à ses gains il a pris un emprunt immobilier: «S’ils annulent la licence d’Uber je vais me retrouver en difficulté».

Auparavant, il travaillait pour une société de taxis traditionnelle, mais sur dix heures de travail il faisait 7 à 10 courses par jour et gagnait environ 45 livres net en déduisant tous ses frais: «Ce n’est pas assez pour vivre». Aujourd’hui, avec Uber, il fait 15 courses quotidiennes au minimum et gagne environ 80 livres: «vous pouvez survivre avec ça».

Quant aux fraudeurs qui créent de faux comptes, il estime qu’il y a des «mauvaises personnes partout». «Qu’est-ce qui dit qu’il n’y en a pas chez les concurrents d’Uber?»

Pour Neil Wilson, analyste du site Markets.com, les turpitudes d’Uber à Londres montrent «l’étendue de ses problèmes juridiques».

«Londres fait partie des cinq villes où (Uber) génère un quart de ses recettes mondiales» et une confirmation de la suppression de la licence d’Uber aurait donc des conséquences très néfastes sur ses comptes, alors que la société perd déjà des centaines de millions de dollars, estime Neil Wilson.

D’autant qu’une série de sociétés concurrentes comme Bolt et Kapten sont dans les «starting blocks» pour reprendre les clients du géant des véhicules avec chauffeurs.