Publicité

Le Zimbabwe attend le rapatriement du corps de Robert Mugabe

7 septembre 2019, 08:32

Par

Partager cet article

Facebook X WhatsApp

Le Zimbabwe attend le rapatriement du corps de Robert Mugabe

Le Zimbabwe était samedi dans l’attente du rapatriement du corps de Robert Mugabe, d’abord libérateur puis dictateur d’un pays qu’il a plongé dans une crise économique sans fond, et décédé à 95 ans, à Singapour, moins de deux ans après avoir été renversé.

Un deuil a été décrété dans tout le pays jusqu’aux funérailles, dont la date n’a pas été communiquée, en l’honneur de l’un des derniers «pères de l’indépendance» en Afrique à qui le parti au pouvoir, la Zanu-PF, a accordé le titre de «héros national».

Le corps «ne sera pas rapatrié demain, probablement la semaine prochaine», a dit vendredi son neveu par alliance Adam Molai. La famille n’a pas encore décidé du lieu de l’enterrement, a précisé à la presse l’un de ses neveux Léo, depuis Kutama le village natal du défunt. «On attend que sa dépouille arrive de Singapour», a-t-il dit.

Robert Mugabe s’est éteint vendredi à 02H40 GMT à l’hôpital Gleneagles à Singapour. Selon son neveu Adam Molai, il est mort de vieillesse: hospitalisé cette semaine, «il est décédé entouré de sa famille», a-t-il dit à la presse à Singapour.

De nombreux pays africains ont rendu un hommage appuyé et unanime au «libérateur» du Zimbabwe, tandis que le Royaume-Uni, l’ancienne puissance coloniale qui a entretenu avec lui des relations exécrables, a dénoncé son

C’est son successeur Emmerson Mnangagwa, porté au pouvoir par un coup de force de l’armée en novembre 2017, qui a annoncé le décès du «père fondateur du Zimbabwe».

Robert Mugabe avait pris les rênes de l’ex-Rhodésie, devenue indépendante, en 1980. Pendant son règne de trente-sept ans, l’un des plus longs sur le continent africain, il est passé du statut de père de l’indépendance et ami de l’Occident à celui de tyran qui a provoqué l’effondrement économique de son pays.

A sa chute en novembre 2017, sous la pression de l’armée, de son parti et de la rue, il a laissé un pays à l’économie exsangue, où le chômage dépasse les 90%.

A l’image de son parcours et de son héritage, sa mort a suscité des réactions extrêmement contrastées.

L’Afrique du Sud, comme d’autres pays africains, et la Chine ont salué la mémoire d’un dirigeant «exceptionnel».

Un «combattant de la libération et champion de la cause de l’Afrique contre le colonialisme», a souligné le président sud-africain Cyril Ramaphosa, dont le pays entretient des relations très étroites avec le Zimbabwe notamment en raison du soutien de Mugabe pendant de longues années à la lutte anti-apartheid du Congrès national africain (ANC).

«Héritage mitigé»

Pour Amnesty international, «tout en se présentant comme le libérateur du Zimbabwe, Robert Mugabe a infligé des dommages durables à son peuple».

Au Zimbabwe, embourbé dans la crise économique depuis des décennies, la population a continué vendredi à vaquer à ses occupations comme si de rien n’était.

«En tant que leader, la seule chose qu’il a fait de mal est de rester au pouvoir pendant trop longtemps», a estimé Joshua Tsenzete, un habitant de Harare.

Robert Mugabe avait lancé, au début des années 2000, une réforme agraire controversée, destinée à redistribuer à la majorité noire les terres agricoles principalement aux mains des Blancs. Cette réforme a précipité le pays, ancien grenier à céréales de l’Afrique australe, dans une terrible crise économique et financière.

En Afrique du Sud, l’heure était au soulagement vendredi au sein de la très importante communauté zimbabwéenne qui a fui le pays.

«Je suis contente qu’il soit mort», a dit Palmolive Nxumalo, une serveuse de 38 ans.

Chômage de masse et inflation dantesque ont marqué les deux dernières décennies de l’ère Mugabe.

«Mugabe laisse un héritage mitigé», a résumé à l’AFP un analyste zimbabwéen indépendant, Austin Chakaodza. «Il fut le libérateur de ce pays puis son destructeur. Il a mis en place des politiques qui ont fait du Zimbabwe la risée du monde», a-t-il estimé.

«Camarade Bob»

Accueilli en libérateur en 1980, Robert Mugabe a d’abord mené une politique de réconciliation, au nom de l’unité du pays, qui lui a valu des louanges générales, notamment dans les capitales étrangères. Mais rapidement, le héros a eu la main lourde contre ses opposants.

Ses abus contre l’opposition, des fraudes électorales et surtout sa violente réforme agraire lui ont valu les condamnations de l’Occident.

Le «camarade Bob», longtemps jugé insubmersible, a été progressivement lâché par les fidèles de son régime.

Fin 2017, à la suite d’un coup de force de l’armée soutenu par la Zanu-PF, le plus vieux chef de l’Etat en exercice de la planète à l’époque était contraint de démissionner.

Robert Mugabe, depuis sa démission humiliante, n’avait plus fait que de très rares apparitions publiques.