Publicité

Tour de France: la combinaison jaune se met au niveau

19 juillet 2019, 00:51

Par

Partager cet article

Facebook X WhatsApp

Tour de France: la combinaison jaune se met au niveau

Julian Alaphilippe, maillot jaune du Tour de France, endossera vendredi pour le contre-la-montre de Pau une combinaison conçue par les organisateurs et non par son équipe: ce règlement, frustrant pour les formations qui investissent dans le textile, a poussé l’organisation à se mettre au niveau.

«C’est une réalité, il faut faire avec», résume avec une pointe d’amertume Ricardo Scheidecker, responsable de la performance de l’équipe Deceuninck, celle d’Alaphilippe. Le technicien affirme «beaucoup travailler pour avoir le matériel le plus rapide possible», notamment la combinaison de chrono, mais sait que son coureur ne pourra pas en profiter.

Selon le règlement, tous les maillots distinctifs, dont le jaune, sont en effet conçus, produits et distribués par les organisateurs, qui y apposent au dernier moment le logo de l’équipe concernée.

Un moindre mal sur les étapes en ligne où l’aérodynamisme n’est pas une préoccupation majeure. Une véritable exception lors des contre-la-montre où chaque seconde compte.

«On aimerait pouvoir changer la règle, faire en sorte que les équipes puissent avoir leurs propres combinaisons tout en y apposant les logos des organisateurs, mais pour le moment ce n’est pas possible», poursuit le technicien portugais à la tête de l’équipe belge.

Un travail en profondeur

La question s’était posée lors des chronos du Tour 2017. L’équipe Sky de Chris Froome avait alors habillé ses coureurs d’une combinaison spéciale constituée de vortex - des bandelettes aérodynamiques qui ont depuis été interdites - mais n’avait pu mettre à profit leur utilisation sur leur leader, maillot jaune pour le contre-la-montre de Marseille et donc contraint de se plier à la règle.

«On a fait des feedbacks (retours) à l’organisation car ce serait dommage qu’une fois que notre coureur est en jaune, il puisse se retrouver désavantagé par rapport à d’autres équipes», se souvient Nicolas Portal, le directeur sportif de l’équipe, rebaptisée Ineos aujourd’hui.

«Entre les meilleures combinaisons et les combinaisons les moins bonnes du peloton, il peut y avoir 4 % d’écart en aérodynamisme. C’est énorme», estime Frédéric Grappe, le responsable de la performance chez Groupama-FDJ, qui aimerait que les caractéristiques techniques du modèle des organisateurs soit transmises aux équipes.

L’organisation, sans remettre en cause son règlement, a toutefois pris conscience du débat depuis plusieurs années. «Cela a demandé un travail en profondeur. On s’est rapproché des techniciens pour essayer de coller aux basques des équipes», affirme le directeur de course Thierry Gouvenou.

«Corriger le moindre pli»

Le Coq sportif, équipementier qui fabrique les maillots distinctifs de la Grande Boucle, s’est emparé du dossier avec l’objectif de fournir une combinaison de qualité aux équipes. Si ses maillots jaunes sont assemblés en France, dans l’usine historique de la marque à Romilly-sur-Seine (Aube), les fibres textiles sont conçues dans une usine partenaire située au Portugal et spécialisée dans l’équipement sportif technique, précise la marque.

«Les matières progressent chaque année, les équipes les découvrent sur le Tour», affirme David Pécard, directeur textile du Coq sportif, qui assure que «le maillot jaune est aussi performant que si le coureur portait son propre équipement».

Pour cela, chaque année depuis 2012, l’équipementier envoie deux modélistes et deux prototypistes à l’hôtel du maillot jaune la veille du contre-la-montre pour mesurer sous tous ses angles le leader du classement général, lui faire essayer la combinaison, la raccourcir, la tailler au millimètre. Un exercice de précision qui dure parfois plus d’une heure et demie.

«Ils nous demandent de corriger le moindre pli au niveau de la nuque, des bras», décrit Anne-Marie Parent, prototypiste de la marque. Elle se souvient notamment avoir été incapable, en 2017, de satisfaire une demande de l’équipe Sky, qui souhaitait imprimer le numéro de dossard directement sur la combinaison. «Ils étaient têtus, mais le tissu était trop fin. On a fini par les convaincre».

Malgré quelques épisodes de ce genre, «les retours sont efficaces, il n’y a pas d’arrière-pensée», assure Thierry Gouvenou. Nicolas Portal confirme. «Même si on ne peut pas les tester (au préalable), il faut avouer qu’elles sont très bonnes».