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Euthanasie: «J’ai eu un patient étranger qui voulait mourir à Maurice»

13 juillet 2019, 20:30

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Euthanasie: «J’ai eu un patient étranger qui voulait mourir à Maurice»

La mort assistée est illégale à Maurice et le médecin impliqué risque une peine de prison de 60 ans. Cette mention dans la dernière newsletter du Directeur des poursuites publiques et la mort de Vincent Lambert en France, le jeudi 11 juillet, relancent le débat. Qu’en est-il de l’euthanasie à Maurice ?

C’est une question sensible qui est débattue dans le corps médical depuis des lustres. Fraîchement élu, le président du Medical Council, Shyam Purmessur, affirme ne pas pouvoir donner son avis sur la question. «Si je dois me prononcer sur ce sujet, la question doit d’abord être discutée au Medical Council.»

Mais quid des patients qui souffrent de maladies incurables ? C’est une question qu’il faut se poser, disent trois médecins qui ont voulu garder l’anonymat. Même si cela est interdit à Maurice, ils avouent être en faveur de cette pratique. «Si les raisons médicales prouvent qu’on ne peut rien faire de plus avec un patient qui souffre énormément et qui souhaite abréger ses souffrances, c’est de la torture de le laisser vivre dans cet état», avoue l’un d’eux. Il faut cependant bien faire la différence entre satisfaire le désir de mourir de quelqu’un et la situation de «mort clinique».

À Maurice, aider quelqu’un à mourir est un acte illégal. Toutefois, quand une personne est déjà en situation de mort clinique et sous respiration artificielle, le fait de débrancher les machines qui la maintiennent en vie n’est pas considéré comme une mort assistée. Dans la Medical Council Act, il est écrit que les médecins doivent «accepter la mort comme un phénomène naturel quand elle arrive et éviter de prolonger la vie indéfiniment par des moyens artificiels».

L’un des médecins, qui a travaillé dans le secteur public, explique. «En tant que médecin, nous devons faire tout ce qui est en notre pouvoir pour guérir et sauver une personne, mais l’on ne peut rien faire pour une personne qui ne respire qu’artificiellement.» Cependant, même dans ces cas-là, la famille doit donner son consentement.

Un directeur de clinique raconte que c’est un fait courant à Maurice. Il y a même des cas où les patients euxmêmes signent des papiers légaux au début de leur traitement pour donner leur permission d’éteindre les machines s’ils se retrouvent sous respiration artificielle et qu’il n’y a plus rien à faire. «J’ai déjà eu un patient étranger qui souffrait d’une tumeur au cerveau et qui voulait mourir à Maurice.» Il avait déjà été averti par ses médecins en Angleterre que sa tumeur lui serait fatale. «Il est donc venu terminer son traitement en clinique ici. Il est tombé dans le coma et quand il s’est retrouvé en état de mort clinique, nous l’avons mis sous respiration artificielle jusqu’à ce que sa famille arrive.» Comme sa famille et lui avaient déjà signé leur consentement, les machines ont été débranchées sous les regards et pleurs de ses proches.

Des cas comme cela, il y en a beaucoup, selon les médecins. Certains proches, avant de faire débrancher la machine, font appel à un chef religieux pour lui administrer les derniers sacrements. «C’est un moment éprouvant qui nous touche énormément aussi en tant que médecin, mais cela donne à la famille le temps de faire ses adieux avant que le patient ne s’en aille à jamais.»