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Pénuries de médicaments: plus d’information, plus de coordination, mais pas de sanctions

8 juillet 2019, 15:19

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Pénuries de médicaments: plus d’information, plus de coordination, mais pas de sanctions

Mieux partager l’information, mieux gérer le «circuit du médicament» de l’usine jusqu’à la pharmacie... Le gouvernement a dévoilé lundi ses pistes pour lutter contre la pénurie de médicaments, mais les associations y voient «très peu de mesures concrètes et dissuasives».

Les tensions d’approvisionnement et les ruptures de stock de médicaments se sont amplifiées ces dernières années, en raison de multiples facteurs (prix de vente de certains traitements jugés peu attrayants par les laboratoires ou les intermédiaires, politique de «flux tendu» visant à limiter les stocks, forte concentration des sites de production, parfois situés à grande distance, en Inde ou en Chine...)

Un quart des Français s’est déjà vu refuser la délivrance d’un médicament ou d’un vaccin pour cause de pénurie, et la proportion monte à 31% pour les personnes atteintes par une affection longue durée (ALD), selon une enquête publiée en janvier à l’initiative de France Assos Santé.

«Améliorer la disponibilité des médicaments pour tous les Français est ma priorité», affirme la ministre de la Santé Agnès Buzyn dans sa feuille de route provisoire présentée ce lundi aux acteurs concernés.

Ces derniers sont appelés à enrichir ces «grandes orientations» avec leurs propositions, pour aboutir à un plan définitif en septembre, précise la ministre.

Le premier axe de ce plan provisoire vise à «promouvoir la transparence et la qualité de l’information», en généralisant par exemple la plateforme qui permet aux pharmaciens de signaler les ruptures d’approvisionnement au laboratoire concerné.

La feuille de route propose aussi «des actions ciblées et adaptées», telle que la possibilité donnée par la loi Santé au pharmacien de «remplacer le médicament indisponible initialement prescrit par un autre médicament», lorsque la pénurie concerne un «médicament d’intérêt thérapeutique majeur».

Elle prône également davantage de «coopération européenne», en poursuivant «les discussions sur l’achat groupé notamment de vaccins essentiels au niveau européen» et un «partage d’information concernant les situations et les causes des pénuries à l’échelle de l’Europe».

Vaccins, anticancéreux, corticoïdes...

Un comité de pilotage sera créé pour assurer la mise en oeuvre de ces mesures, associant l’Agence du médicament (ANSM) et les laboratoires pharmaceutiques, grossistes, associations de patients, etc.)

«Cette feuille de route ministérielle, si elle témoigne d’une volonté louable des pouvoirs publics de s’attaquer au problème, ne présente en l’état que très peu de mesures concrètes et dissuasives pour lutter contre ces dérives», estime toutefois France Assos Santé, fédération d’associations de patients.

«Industriels et grossistes répartiteurs sont les principaux responsables de cette situation : stratégies financières contestables, exportation des stocks vers des pays «qui paient mieux», désengagement sur certains médicaments, ou trop forte concentration des sites de production font partie des causes identifiées de longue date», estime-t-elle.

Selon les projections de l’Agence nationale de sécurité du médicament (ANSM), plus de 1.200 traitements ou vaccins seront concernés par des situations de rupture ou tensions d’approvisionnement sur l’ensemble de l’année 2019. C’est 60% de plus qu’en 2018 et 30 fois plus qu’en 2008, souligne France Assos Santé.

Le sujet est devenu très médiatisé, en raison de ruptures portant sur des produits d’utilisation courante ou de première importance, comme des antibiotiques, des vaccins, des anticancéreux ou encore des traitements contre la maladie de Parkinson.

Ces dernières semaines, ce sont des difficultés d’approvisionnement concernant les corticoïdes qui ont provoqué l’inquiétude de médecins et de patients.

En février, le secteur pharmaceutique a publié un «plan d’actions» pour tenter de trouver des solutions à ce problème qui ternit son image.

Le Leem, qui fédère les industriels du médicament, proposait notamment de définir un ensemble de «médicaments d’intérêt sanitaire et stratégique» pour lesquels des mesures de gestion de pénurie (stocks de sécurité mobilisables, suivi plus précoce des stocks, etc.) devraient être renforcées.

Cette liste resserrée permettrait de se concentrer sur les 5% à 10% de traitements «les plus indispensables et irremplaçables», alors que le périmètre actuel des «médicaments d’intérêt thérapeutique majeur» englobe quelque 40% des produits sur le marché.

Cette recommandation figurait également dans un rapport du Sénat sur le sujet, publié en octobre.

Le Leem a également appelé de ses voeux une revalorisation des prix des médicaments de ville en France, avec la mise en place d’un «prix plancher».