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Tour de France: Egan Bernal, un grimpeur différent comme atout de la Colombie

3 juillet 2019, 15:19

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Tour de France: Egan Bernal, un grimpeur différent comme atout de la Colombie

Contrairement à nombre de ses compatriotes, Egan Bernal ne s’est pas formé dans les sommets des Andes. Il a d’abord affronté des sentiers de forêt, y perfectionnant son équilibre. L’atout de la Colombie pour le Tour de France a éclos sur un VTT.

Né à Bogota dans une famille modeste, d’un père vigile et d’une mère ouvrière dans une plantation de fleurs, Egan Bernal a grandi à Zipaquira, localité minière et agricole de 126.000 habitants, à 42 km de la capitale.

Là, il apprend à déjouer les pièges des chemins escarpés qu’il a commencé à parcourir chaque matin, souvent dans le brouillard, dès l’âge de huit ans sous la houlette de Fabio Rodriguez, ex-cycliste qui s’est distingué à deux reprises dans la Vuelta, le Tour d’Espagne, au début des années 1990.

Rodriguez a entrainé Bernal jusqu’à ses 16 ans. Six ans après, il distingue encore sa marque chez le jeune champion.

«Je l’ai vu déraper dans le contre-la-montre du Tour de Suisse (cette année). Un cycliste normal, un routier, serait tombé, mais là, il a démontré la technique apprise à VTT», explique-t-il fièrement à l’AFP.

Un grimpeur et un rapide

Rodriguez entraîne les jeunes de Zipaquira et Egan Bernal reste son poulain le plus exceptionnel: un jeune menu et timide qui a débuté comme routier il y a à peine quatre saisons, mais qui a remonté le peloton.

En 2017, il a remporté le Tour de l’Avenir, en 2018 le Tour de Californie, avant d’impressionner, déjà, pour sa première participation au Tour de France l’an dernier.

Sa victoire lors du récent Tour de Suisse confirme qu’il sera bien un des favoris de l’édition 2019 de la Grande Boucle, en l’absence de Chris Froome son habituel leader chez Ineos.

En toute logique, il a été désigné co-leader de l’équipe (ex Sky) avec le Gallois Geraint Thomas, vainqueur du Tour 2018. A 22 ans, il est ainsi appelé à suivre les traces de Thomas, Froome ou Wiggins, les précédents leaders de la formation britannique.

Les progrès du grimpeur dans les épreuves contre-la-montre lui ouvrent de nouvelles perspectives, et ne passent pas inaperçus chez les Colombiens, traditionnellement faibles dans cette épreuve.

«Il est l’un des meilleurs grimpeurs de la planète et en outre, il répond positivement au chrono», souligne Mauricio Silva, auteur de «La légende des scarabées», livre consacré aux exploits européens des cyclistes colombiens.

Pour cela, Bernal «est un candidat de premier plan» dans le Tour de France, ajoute-t-il.

Une course après l’autre

Depuis les années 1980, la Colombie produit des coureurs de haut niveau.

Les «scarabées» se sont distingués dans la Vuelta (Quintana vainqueur en 2016), et le Giro (victoires de Quintana en 2014 et Carapaz en 2019), mais ils n’y sont pas encore parvenus dans l’épreuve reine de la saison, le Tour de France.

Ce, malgré quatre podiums sur les six dernières éditions. C’est donc sur Bernal que reposent tous les espoirs.

«C’est normal que les fans colombiens y croient, mais encore faut-il le voir courir comme leader d’équipe dans un tour de trois semaines», nuance Eddy Jacome, journaliste spécialisé.

Egan Bernal ne perd pas les pédales. «Les gens répètent que je peux gagner un Tour (de France), un Giro ou une Vuelta (...) mais je préfère penser au jour le jour», affirmait-il en mai 2018 au magazine Cycling Tips. Peu après, il remportait le Tour de Californie.

Réservé, il affiche toujours des ambitions en dessous de ses capacités.

«J’irai (au Tour de France) avec Geraint (Thomas). Ce sera notre leader et je tâcherai de l’aider», déclarait-il en Suisse... avant de remporter l’épreuve.

Bernal & frère

Il y a six ans seulement, Egan pédalait encore sur le sentier où transpirent les poulains de Rodriguez. Parmi eux, Ronald Bernal, 14 ans, frère unique du champion.

Le rugissement d’une tronçonneuse interrompt l’entraîneur: des jeunes coupent un arbre immense, avant de le porter sur leurs épaules jusqu’à un camion. Nombre d’habitants de Zipaquira gagnent ainsi leur vie.

«C’est pour ça que je dis sans cesse aux gamins qu’il vaut mieux se lever tôt et s’entraîner au vélo», lâche Rodriguez.

Le succès d’Egan Bernal fait des émules. «Il y a toujours plus de parents qui veulent que leurs enfants s’entraînent», affirme celui qui, jusqu’ici, était le seul cycliste international issu de Zipaquira.

En dépit de ses engagements à l’étranger, Bernal y reste très attaché: il habite près de ses parents, prépare ses courses dans les montagnes voisines et roule avec son petit-frère.

Au début, «il m’en faisait baver, mais avec le temps je suis tombé amoureux du vélo», assure Ronald.

Pour Rodriguez, il n’y a aucun doute: d’ici quelques années, les journalistes reviendront à Zipaquira pour un autre Bernal.