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JIOI 2019 - Dominique Béchard: «J’habitais chez papa et maman et dans la famille nous ne vivions que pour les Jeux»

3 juin 2019, 13:44

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JIOI 2019 - Dominique Béchard: «J’habitais chez papa et maman et dans la famille nous ne vivions que pour les Jeux»

Les Jeux de 1985 restent pour moi un souvenir très, très fort. A cette époque, j’habitais chez papa et maman et dans la famille nous ne vivions que pour les Jeux. Mon père était président de la Fédération de cyclisme, mon frère Benoît, membre de l’équipe B de Maurice de cyclisme et mon frère Jean-Luc sélectionné pour le saut à la perche en athlétisme. Nous passions nos week-ends familiaux sur les stades d’athlétisme et sur les routes à suivre mon frère Benoît dans ses courses cyclistes. Ma mère faisait comme elle pouvait pour s’accommoder et nous encourageait. Elle était surtout très fière de ses fils et de son mari.

J’avais toujours été spécialiste du disque et du marteau mais à quelques mois des Jeux, je me suis fixé un challenge et j’ai décidé de concourir au lancer du poids en plus des deux autres épreuves, alors que je ne maîtrisais vraiment pas la spécialité. Après avoir pris cette décision, je n’avais plus qu’une chose en tête, les trois médailles d’or ou rien. On pourrait me trouver sans doute vaniteux et arrogant, mais quand on est jeune, ce sont des objectifs comme ceux-là qui nous permettent de soulever des montagnes. Je vous rassure, je suis beaucoup plus sage et humble aujourd’hui même si j’aime toujours autant gagner. 

Le lancer du poids était le plus dur pour moi et je pris quand même le pari de m’approprier la technique du lancer en rotation, inventée par un certain Aleksandr Baryshnikov. Cette technique n’était pas très populaire dans ces années-là alors que maintenant beaucoup de lanceurs l’utilisent car elle est favorable aux grands gabarits et aux lanceurs rapides. 

Le lancer du poids était ma première épreuve dans les compétitions. Et ce jour-là il pleuvait. Gros stress car le lancer en rotation nécessite une bonne adhérence à l’aire de lancer et avec la pluie, je pouvais déraper. J’assure donc mon premier lancer et prends la tête du concours. Je progresserai ensuite et gagnerai le concours sans être inquiété par la concurrence. Ouf ! le plus dur était fait. 

Il restait ensuite le disque - ma spécialité de prédilection - qui se déroula deux jours plus tard. Mon plus proche concurrent, le Réunionnais Legros, avait un record inferieur de deux ou trois mètres à mon record et il me fallait là aussi tout donner pour ne pas être inquiété. Et c’est ce que je fis. Je réalisai un nouveau record des Jeux sans pour autant battre mon record national. Qu’à cela ne tienne, l’objectif était de gagner et pas de prendre des risques pour battre un record.

Le lancer du marteau fut ma troisième et dernière épreuve. Une fois le poids et le disque de gagnés, j’étais presque assuré d’une victoire au marteau car mes concurrents avaient des records qui se situaient à une bonne quinzaine de mètres du mien. Je pris quand même les choses avec le sérieux qui me caractérise et j’assurai la victoire avec un nouveau record des Jeux à la clé. J’aurais pu prendre quelques risques et essayer de battre mon record national mais là aussi mon objectif était de gagner et c’est ce que je fis.

Une fois la troisième médaille d’or acquise, j’ai pu relâcher la pression et ce n’est qu’à partir de ce moment que j’ai commencé à apprécier mes Jeux. Je suis revenu au Village des Jeux après ma dernière compétition et nous avons fêté ça dignement avec mes amis athlètes et entraîneurs. J’ai dormi au Village pour la première fois cette nuit-là car avant j’avais préféré passer mes nuits chez mes parents. Mon lit était meilleur - les lits au Village étaient très petits - et c’était mieux pour moi de rester concentré.

Je me souviens encore des animations au Village des Jeux tous les soirs et du tube du moment, « Life is life » du groupe Opus, qui passait en boucle. Je me souviens aussi de la cérémonie de clôture au Stade Georges V et du chant « We are the World » avec les athlètes de tous les pays se tenant par la main. Ce fut inoubliable !

Juste après la clôture des Jeux, je fus invité à diverses fonctions officielles et du haut de mes 21 ans, j’étais sidéré de voir des gens me reconnaître dans la rue et me demander de leur signer des autographes. Mais la fête fut de courte durée et j’avais encore des souvenirs plein la tête quand je quittai le pays une semaine après la clôture des Jeux pour aller étudier le Génie Mécanique à Toulouse. Mes parents me représenteront à quelques fonctions supplémentaires alors qu’une nouvelle vie, avec de nouveaux challenges, commençait pour moi. 

Palmarès complet 

  • Participation aux Jeux Olympiques de Los Angeles en 1984. Présent au disque (rang 18e) et au marteau (éliminé pour 3 « No Throws »). 
  • Médaillé d’or au marteau, au disque et au poids aux Jeux des Iles de 1985 à Maurice. 
  • Médaillé d’argent au disque aux Jeux des Iles de 1990 à Madagascar avec deux semaines d’entraînement, suite à la demande de Michael Glover pour que j’y participe même sans entraînement.
  • Participation aux Jeux des Iles de 1993 aux Seychelles avec l’équipe nationale de basket- ball après une tournée en Australie et à La Réunion. 
  • Multiples fois champion national dans les 3 lancers (disque, poids et marteau).
  • Recordman national du marteau et du disque pendant une décennie. 
  • «J’ai fait progresser le record du marteau d’une vingtaine de mètres et je suis celui qui a vraiment mis la discipline sur le calendrier de la fédération. Avant moi, il n’y avait, pour ainsi dire, pas de compétition de marteau. Seul Paul Ducray, le véritable pionnier du marteau à Maurice, et Guy Maurel s’y étaient essayés. Il faut noter que nous n’avons pu utiliser le stade Maryse-Justin du Réduit pendant quelques semaines seulement avant les Jeux de 1985. Avant les compétitions se déroulaient au stade de Rose-Hill et le marteau se lançait sur les aires de lancer de poids qui comportent une butée en bois au bout de l’aire. Cela pouvait être très dangereux pour le lanceur s’il accrochait la butée pendant la volte. Il faut aussi noter que les organisateurs des compétitions se trouvèrent devant un problème épineux quand j’ai commencé à lancer le marteau sur la piste cendrée de Rose-Hill. Cela devenait, cette fois, dangereux pour les coureurs et endommageait la piste. La décision fut alors prise de transférer le lancer du marteau dans l’aire de lancer du disque… jusqu’à ce que le stade Maryse-Justin soit prêt et que je puisse utiliser une vraie aire de lancer du marteau avec des filets de protection. C’est dans ces conditions que j’ai préparé les Jeux des Iles de 1985 et même les Jeux Olympiques de 1984. Je n’avais pas de chaussures adaptées et j’utilisais des chaussures de badminton qui accrochaient bien l’aire de lancer. Pareil pour le gant de marteau. Aujourd’hui, les lanceurs ont des gants spéciaux. A mon époque, on utilisait des gants de soudeur. J’ai participé aux Jeux Olympiques et aux Jeux des Iles avec des gants de soudeur… Aujourd’hui, les athlètes sont tous équipés comme il le faut. »
  • Plusieurs fois champion régional Midi Pyrénées au disque et au marteau et une fois 7e aux championnats de France UNSS au disque lors de mes études à Toulouse en France.
  • International en basket-ball à plusieurs reprises et en rugby avec l’équipe du Dodo Club (seule équipe de rugby à Maurice à l’époque).

Palmarès relatif aux Jeux des îles

  • 3 Médailles d’or en 1985 (dans la même édition et dans 3 lancers (disque, poids, marteau) avec des records des Jeux au disque et au marteau. Performance jamais réalisée par une autre athlète, tous pays confondus, à ce jour. 
  • Médaille d’argent en 1990 au disque avec une meilleure performance qu’en 1985 et sans entraînement.
  • Participation aux Jeux des Iles de 1993 aux Seychelles avec l’équipe nationale de basket- Ball