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Tamarin: Aurélie Boucherville exercer la médecine… contre vents et marées

19 avril 2019, 21:30

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Tamarin: Aurélie Boucherville exercer la médecine… contre vents et marées

«Elle a dû faire toutes les guerres pour être si forte aujourd’hui…»
La chanson de Francis Cabrel, Je l’aime à mourir, cadre bien avec cette jeune femme de 29 ans qui a lutté contre vents et marées afin de devenir médecin. Elle rêve de soigner autrui depuis qu’elle a neuf ans. 

Un désir sans doute lié au décès de son grand-père, emporté par un cancer. «À cet âge-là, je ne comprenais pas encore ce qu’était le cancer. On me disait que les médecins ne pouvaient rien faire pour le sauver et cela m’agaçait. Je me souviens m’être dit qu’un médecin ça doit pouvoir sauver des gens et que je deviendrais médecin pour prendre soin des gens que  j’aime.» Aurélie Boucherville grandit et poursuit donc sa scolarité avec ce but en tête. Son désir de sauver des vies est davantage renforcé lorsqu’elle perd une de ses amies proches des suites d’une leucémie, puis sa tante, décédée d’un cancer du col de l’utérus.

Ses parents ont toujours su qu’elle courait après le rêve d’être médecin. Toutefois, l’argent leur faisait cruellement défaut. Mais ils ne l’ont jamais découragée et lorsqu’est venu le moment pour elle de faire des études supérieures, ses parents ont contracté un emprunt bancaire pour l’envoyer en Chine.

«Je suis arrivée dans ce pays en 2009. C’était très dur car je devais apprendre et la médecine et le mandarin en simultané. J’avais énormément de problèmes de communication et ma famille me manquait. Mais je n’ai pas baissé les bras», avoue-telle. Pendant ses études, elle savait déjà que contrairement à ses amis de l’université, elle ne pourrait pas revenir à Maurice lors des vacances scolaires.

En 2012, après trois ans d’études, Aurélie Boucherville apprend que ses parents ne jouissent pas d’une très bonne santé. Son père, qui a dû cumuler trois boulots pour subvenir aux besoins de la famille, est cloué au lit par une douloureuse inflammation du nerf sciatique. Sa mère, qui est institutrice dans une école maternelle, a développé un cancer aux ovaires. «J’ai dû tout quitter pour retourner à Maurice», raconte-t-elle.

De retour au pays, c’est dans un état de désolation qu’elle a retrouvé ses parents. Et comme un malheur n’arrive jamais seul, elle apprend qu’elle ne pourra poursuivre ses études car le prêt bancaire à cet effet est épuisé. «Je pensais que mon rêve ne pourrait jamais se réaliser à ce moment-là. Mais mes parents étaient ma priorité et donc, je m’efforçais de ne pas y penser.» Pendant des mois, Aurélie Boucherville reste au chevet de ses parents. Elle n’a pas abandonné son rêve d’être médecin. Ses parents le savent. «Des amis de ma mère m’ont mis en contact avec la Fondation Joseph Lagesse, qui a accepté de financer le reste de mes études.»

Elle repart donc pour la Chine, le coeur déchiré entre la joie de se rapprocher de son but et la tristesse de quitter ses parents souffrants. Si son père se remet, en 2015, sa mère n’arrive plus à supporter les traitements, notamment la chimiothérapie, qui n’a pas l’effet désiré sur elle. «Elle me disait que la chimio la fatiguait bien plus que le cancer. Elle a donc pris la décision de stopper ce traitement», relate la jeune femme.

La remise de diplômes était prévue pour juillet 2015 et Aurélie Boucherville avait commencé à économiser ses sous pour que sa mère puisse prendre l’avion pour la rejoindre et assister à ce grand moment. Mais c’était sans compter un énième coup du sort. La mère d’Aurélie Boucherville s’est éteinte cinq mois avant que sa fille n’obtienne son diplôme. «Quand j’ai appris que ma mère avait rendu l’âme à Maurice, j’effectuais mon stage dans un hôpital chinois. Faute de moyens, je n’ai pu rentrer pour ses funérailles. Cette étape m’a tuée intérieurement.» Elle a du mal à se remettre de cette disparition. Elle n’arrive pas à se rendre à l’hôpital où elle fait son internat car elle a l’impression de ne pouvoir soigner les malades vu qu’elle n’a rien pu faire pour sa mère. Cependant, avec le soutien de ses amis en Chine, elle reprend courage et complète son internat, empoche son diplôme et regagne Maurice.

Elle effectue un autre internat, cette fois à l’hôpital Victoria. Stage qui dure 18 mois avant qu’elle ne se retrouve au chômage pendant une année. Combative, elle n’abandonne pas la partie. C’est ainsi qu’elle exerce à mi-temps dans deux cliniques privées.

Aujourd’hui, Aurélie Boucherville dit avoir un message pour les jeunes :«Quels que soient les obstacles de la vie, il faut se battre pour ce que l’on croit.» Le souvenir de sa mère et les difficultés qu’elle a dû endurer l’ont forgée et elle est désormais un médecin aux petits soins avec ses patients. Elle fait tout pour sauver des vies, tout en étant consciente de l’inéluctabilité de certaines situations.