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Valérie Bisasur: une détermination à toute épreuve

6 avril 2019, 11:45

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Valérie Bisasur: une détermination à toute épreuve

Depuis octobre dernier, la juriste d’affaires Valérie Bisasur, rattachée à BLC Robert & Associates depuis 11 ans, a été nommée «Partner». C’est l’unique femme parmi les sept partenaires du cabinet juridique. Elle entrevoit cette nomination comme le résultat de ses efforts continus de s’être donné les moyens de ses ambitions.

Un petit bout de femme à la voix fluette mais dotée d’une énergie débordante et d’une détermination à avancer quels que soient les obstacles qui jalonnent sa route. C’est le sentiment que nous laisse Valérie Bisasur, juriste d’affaires et actuellement l’unique femme Partner chez BLC Robert & Associates, cabinet juridique spécialisé en droit des affaires.

Cette trentenaire confie vivre sa vie comme un trail, sport qu’elle pratique régulièrement. «Un trail, c’est courir sur des sentiers escarpés, grimper des montagnes, traverser des rivières. C’est aussi tomber et se faire mal mais toujours se relever, avancer pour arriver au final devant un paysage à couper le souffle, c’est ça la vie. C’est ce que j’aimerai inculquer à ma fille», raconte cette mère d’une petite de deux ans et demi.

Fillette qu’elle élève seule car il y a trois ans, Valérie Bisasur a brutalement perdu son compagnon des suites d’une rupture d’anévrisme. Elle a accusé le coup et s’est relevée comme dans un trail et a ajusté sa vie en conséquence.

Même si ses objectifs premiers n’étaient pas aussi limpides qu’aujourd’hui, Valérie Bisasur en avait un et c’était celui d’être une femme indépendante. Après avoir réussi son baccalauréat en comptabilité et gestion auprès du Lycée Labourdonnais, elle est admise à l’université de Toulouse, où elle étudie pour obtenir son diplôme universitaire technologique en gestion d’entreprises et administration.

«Ce n’est pas une finalité d’être arrivée là. (…) c’est maintenant le début de nouveaux challenges!»

Si ce cours lui plaît, il lui permet surtout de découvrir le droit des entreprises et de réaliser que c’est dans cette filière qu’elle veut vraiment s’engager. Elle termine tout de même le cours car sa philosophie est de ne jamais s’avouer vaincu et qu’«il faut toujours terminer ce que l’on a commencé».

Elle se remet à l’étude, optant pour une maîtrise en droit d’une durée de quatre ans. La dernière année, elle se spécialise en droit des affaires, banque et assurance. Après ses études et à l’issue de quelques stages, elle regagne l’île et rejoint l’étude Guy Rivalland comme clerc d’avoué.

En parallèle, Valérie Bisasur s’inscrit pour suivre le cours d’avoué auprès du Council of Legal Education. Après huit mois de formation, elle réussit cet examen réputé très difficile. Après son stage (pupillage) d’un an à l’étude Rivalland, elle prête serment en tant qu’avouée devant le Master and Registrar en janvier 2008. La direction de l’étude Rivalland lui propose de la recruter comme avouée, mais Valérie Bisasur veut découvrir autre chose. Elle n’aime pas particulièrement l’univers de la Cour.

«La formation que l’on suit ne vous prépare pas aux réalités qui vous attendent. Exercer devant les tribunaux n’est pas chose facile à mon avis. On se fait rabrouer, voire rabaisser très souvent du simple fait d’être un débutant. Je ne me projetais pas dans cet univers que je compare à une jungle car je trouvais que mes perspectives y étaient limitées et cela ne me correspondait pas du tout.»

Elle entend parler du cabinet juridique BLC Chambers (maintenant BLC Robert & Associates), nouvellement constitué à l’époque. Elle envoie son curriculum vitae et est rapidement appelée pour une interview. Elle met alors les pieds dans un monde qui lui est encore inconnu dans la mesure où l’on y pratique exclusivement le droit des affaires. Elle débute chez BLC en 2008 comme Legal Executive.

Valérie Bisasur découvre l’univers du conseil transactionnel et du corporate et se met en mode apprentissage. Elle ne compte pas ses heures de travail. «C’était très intense car nous étions peu nombreux, mais toujours dans une très bonne ambiance où l’échange des idées et des connaissances primait. C’est ainsi que l’on se développe et que l’on apprend. On fait des erreurs parfois, on en apprend et on construit dessus. Je me donnais au maximum et ne me lassais pas d’apprendre et de découvrir, et encore aujourd’hui j’ai toujours la même passion !»

Pendant plusieurs années, en parallèle, elle se prête à l’obligation de la Cour de faire de l’aide légale pour défendre des affaires de divorces et de garde d’enfants. «Il est important de faire de la legal aid pour aider ceux qui ne peuvent pas retenir les services de juriste. Pour moi, travailler ce type d’affaires me ramenait à la réalité du quotidien de beaucoup de femmes à Maurice, bien loin des transactions à plusieurs chiffres sur lesquelles je travaille et qui ne sont que du papier au final. Une piqûre de rappel quelque part.» Malgré cela, ses différents passages devant les tribunaux lui confirment qu’elle n’est pas faite pour les litiges.

BLC grandit et, au fur et à mesure, Valérie Bisasur prend des responsabilités, participe de plus en plus à la «vie» et au développement du cabinet. Les Partners lui confient des dossiers de plus en plus importants et elle se voit offrir l’opportunité de faire des stages de plusieurs mois dans de grands cabinets juridiques à Londres. «On est exposé aux affaires importantes et on voit comment se pratique le droit des affaires à grande échelle. C’est très formateur à divers égards.»

Au fil du temps, Valérie Bisasur se spécialise en Banking and Finance et gravit les échelons au sein du cabinet. La jeune femme s’implique dans la formation des plus jeunes et dans la rédaction d’articles juridiques. Elle travaille majoritairement pour des institutions de financement internationales ou locales, des fonds d’investissements qui financent des projets à travers le monde ou à Maurice. Elle conseille aussi régulièrement certaines banques locales en matières réglementaires.

Comme elle n’aime pas rester sur ses acquis, une erreur fatale dans ce métier selon elle, elle continue à actualiser ses connaissances dans son domaine de spécialisation et sur l’environnement dans lequel elle évolue, en étant «constamment en train de lire et de se tenir au courant des développements dans le domaine et à prendre le pouls du contexte. Nous sommes dans un monde dynamique qui évolue constamment. Il faut adapter sa pratique du droit et ses services à l’évolution du marché pour mieux répondre aux besoins changeants des clients.»

Lorsqu’on lui propose de devenir Partner en octobre dernier, c’est une joie immense non seulement parce que c’était en projet depuis un bout de temps mais aussi parce qu’elle est consciente de s’être donnée les moyens de ses ambitions. «Il n’est pas possible d’avoir de l’ambition sans s’en donner les moyens. J’ai toujours pensé que ce n’était pas aux autres de m’ouvrir les portes, mais que c’était à moi de me montrer à la hauteur et de me donner les moyens d’y arriver. Et pour ça, cela commence par l’éducation, les valeurs et le travail. Depuis toujours, j’ai écouté les bons conseils, j’ai appris, fait les efforts qu’il fallait et cette nomination est venue non pas comme un dû, mais comme le résultat de mes efforts et de mes engagements et de l’investissement du cabinet sur ma personne. Je crois fermement en la méritocratie et j’ai de la chance de travailler dans un cabinet qui partage cette valeur fondamentale. Je ne me définis pas par un genre ou un état mais par des compétences.»

Pour Valérie Bisasur, être Partner n’est pas une fin en soi. «Ce n’est pas une finalité d’être arrivée là. Autrement, je pars à la retraite (rires). Bien au contraire, c’est maintenant le début de nouveaux challenges!Au sein du bureau, il y a d’autres jeunes femmes très prometteuses et avec la bonne attitude. Je suis sûre qu’après moi, il y aura d’autres femmes Partners de nommées.»

Le message particulier qu’elle a essayé de faire passer aux élèves du collège Dunputh Lallah le 28 mars, dans le cadre du projet GOAL de la Standard Chartered Bank, est «que de manière générale, il faut savoir ce que l’on veut pour soi, avoir un objectif en tête, même s’il fluctue au gré des événements de la vie. Le mien était d’être indépendante et de contribuer à quelque chose dans le secteur choisi. C’est normal que l’on ne sache pas trop où se diriger à un certain âge, surtout lorsqu’on est adolescente. Mais il faut avoir une idée et se donner les moyens de la concrétiser en faisant des efforts».

Elle ajoute que les obstacles seront toujours présents. «Il ne faut pas baisser les bras. J’ai moi-même souvent douté de mes ambitions professionnelles ou personnelles au fil des événements de ma vie, mais il faut les prendre comme des défis à relever, pas comme des obstacles et ne pas se mettre des barrières qui n’existent pas. Il faut s’adapter, travailler dur, être passionné dans tout ce que l’on décide d’entreprendre, accepter les mains tendues et savoir se remettre en question. Il faut être conscient de ses forces, de ses limites et de ses manques et travailler dessus. C’est ainsi que l’on peut ouvrir les portes et atteindre ses objectifs quels qu’ils soient…»