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Thierry Le Breton: «Marre de manger mon pain noir au nom du patrimoine»

19 janvier 2019, 22:00

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Thierry Le Breton: «Marre de manger mon pain noir au nom du patrimoine»

Connu comme un défenseur du patrimoine, Thierry Le Breton a été engagé par le cabinet d’architecte Visio, pour réaliser l’Heritage Impact Assessment du projet Immigration Square Urban Terminal.

Thierry Le Breton est dans les starting-blocks. Il est plus connu comme président de l’association SOS Patrimoine en péril et membre du conseil d’administration du National Heritage Fund (NHF). Ses fonctions de consultant en matière de responsabilités sociales, environnementales et de développement durable au sein de la société Dynamia lui ont valu d’être recruté par le cabinet Visio, dirigé par Gaëtan Siew. Le cabinet Visio est le consultant en architecture pour le projet Immigration Square Urban Terminal, auprès du promoteur qui a obtenu le contrat, la société chinoise Yi Hai.

Quelle sera la mission de Thierry Le Breton ? Il devrait réaliser l’Heritage Impact Assessment (sur le modèle de l’Environment Impact Assessment). «C’est évaluer l’impact du projet d’Urban Terminal sur le patrimoine qui se trouve sur le site et tout autour», explique Thierry Le Breton. La particularité de la place de l’Immigration c’est qu’elle se trouve dans la zone immédiate entourant le patrimoine mondial qu’est l’Aapravasi Ghat. À ce titre, cette zone (voir hors-texte) tombe obligatoirement sous le coup des règles de protection du patrimoine mondial appliquées par l’Unesco. L’Heritage Impact Assessment est d’ailleurs un document soumis à l’Unesco.

Thierry Le Breton précise : «Je serais seulement un évaluateur de l’impact des décisions prises, une fois que les architectes ont établi les plans. J’interviendrais en aval.» Il ne cache pas qu’il aurait préféré être engagé pour l’«assistance à la maîtrise d’ouvrage, qui se passe en amont. C’est définir un cahier des charges concernant la protection du patrimoine, qui est donné aux architectes avant qu’ils ne conçoivent un projet».

Cette mission au chevet de l’Urban Terminal de la place de l’Immigration ne risque-t-elle pas de poser un conflit d’intérêts avec ses fonctions de membre du conseil d’administration du NHF ? Thierry Le Breton affirme en avoir déjà informé le NHF. «À chaque fois qu’un aspect technique concernant ce site sera abordé au conseil d’administration, je devrais me retirer.»

Thierry Le Breton estime que ce rapport sur l’impact du développement sur des bâtiments historiques, «c’est faire exister un métier qui concerne la réhabilitation du patrimoine culturel». Il entend également «jouer un rôle dans le modèle économique» qui sera proposé.

Sur un plan plus personnel, il confie : «Depuis tout ce temps, mon expertise en matière de patrimoine a toujours été dispensée de façon bénévole. J’en ai marre de manger mon pain noir. Pour une fois que je serais rémunéré…»

Pas plus de deux étages

Cette zone de la capitale est régie par le «Planning Policy Guidance» (2011). Parmi les aspects abordés : quelle réutilisation pour les bâtiments historiques, éviter la concentration des activités, le respect du contexte historique de l’Aapravasi Ghat, site de débarquement des engagés, situé au niveau de la mer.

Parmi les activités industrielles à éviter dans la zone : celles qui font beaucoup de bruit, qui dégagent de fortes odeurs et qui causent une augmentation du trafic. La hauteur des bâtiments (pas plus de deux étages), les matériaux utilisés, le landscaping sont aussi réglementés dans cette partie de Port-Louis.

Vaste zone tampon

Cette région de Port-Louis – divisée en «core zone» et « zone tampon» – est régie par les règles de protection du patrimoine mondial appliquées par l’Unesco. Deux experts, George Abungu et Nicholas Clark, sont venus les rappeler aux riverains, l’an dernier, à la demande des autorités.

La zone tampon s’étend d’un côté jusqu’à la rue Royale, en passant devant la Jummah Mosque. Elle comprend la rue Sun Yat Sen (ex-rue Arsenal), la rue Duc d’Edimbourg et s’étend jusque dans la rade.

Un inventaire officiel de la zone tampon recense plus d’une centaine de bâtiments et structures qui soit sont déjà classés patrimoine national, soit représentent un intérêt historique. Dont le Grenier, la poste centrale, des magasins et grossistes situés rue Farquhar, rue Pasteur et rue la Reine.