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Réforme électorale: la perspective d’un échec se précise-t-elle ?
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Réforme électorale: la perspective d’un échec se précise-t-elle ?
Les implications juridiques
Le gouvernement est d’avis qu’il n’aura pas à rougir devant le Comité des droits de l’homme des Nations unies ni devant la Cour suprême. Il éviterait ainsi des sanctions, voire une condamnation, devant la Cour suprême ou le Privy Council, qui aurait pu aboutir, dans le pire des cas, à une invalidation des résultats des prochaines élections générales. Avec la présentation du Constitution (Amendment) Bill, le Premier ministre croit avoir évité ce scénario. C’est ce qui ressort des recoupements d’informations au niveau de l’Hôtel du gouvernement.
Peu importe l’issue des résultats du vote sur le projet de loi, le gouvernement devra informer le comité onusien des droits de l’homme des retombées bientôt. L’argument est tout trouvé. L’alliance Lepep a promis une réforme électorale avec l’élimination du Best Loser System qui supprime de facto la déclaration ethnique en introduisant une dose de proportionnelle. Devant les instances locales et internationales, le gouvernement s’enorgueillira d’avoir été le premier gouvernement à présenter un texte de loi, alors que tous ceux auparavant se sont contentés de commander des rapports sur ce dossier épineux.
«Si la réforme n’est pas passée, ce ne sera absolument pas notre faute», avance déjà un député de la majorité. C’est par manque de consensus qu’on aura abouti à un échec et non à cause de l’absence de volonté du gouvernement, selon lui. Rezistans ek Alternativ, de son côté, ne compte pas lâcher l’affaire aussi facilement. Ashok Subron, qui a dénoncé une réforme «fer sanblan» face à l’absence de consultations, annonce étudier les options avant de décider de la marche à suivre dans le cadre du Constitutional Case en Cour suprême.
Quelle formule constitutionnelle pour les prochaines élections ?
Deux solutions s’offrent au gouvernement en cas d’échec de la réforme électorale. Actualiser le recensement ethnique pour l’attribution des Best Loser seats ou proposer une solution intérimaire, comme en 2014.
Si la première option est d’ores et déjà rejetée par le gouvernement, dont le Premier ministre lui-même, le mini amendement devrait faire son retour en 2019 ou toute autre formule semblable. C’est l’avis du juriste Milan Meetarbhan. À savoir un texte semblable au Constitution (Declaration of Community) (Temporary Provisions) Bill.
Cet amendement constitutionnel, qui avait permis à l’État d’être en conformité avec la directive du Comité des Nations unies sur les droits de l’homme, devra sans doute être modifié, voire amélioré. C’est la seule option valable au cas où la réforme ne passerait pas, poursuit Milan Meetarbhan. Cette option comporte cependant des risques. «Elle va déboucher sur d’autres contesta tions», affirme Ashok Subron. Pour rappel, de nombreux candidats n’avaient pas déclaré leur appartenance ethnique en 2014. «Au cas où il n’y aurait pas de réforme, il y a l’affaire en Cour suprême. Nous n’hésiterons pas à la porter jusqu’au Privy Council car nous contesterons la légitimité des élections.»
«Peu importe l’argument qu’utilisera le gouvernement devant les Nations unies ou la Cour suprême, une violation reste une violation», souligne Rezistans ek Alternativ. Le comité onusien avait, en 2012, statué que les droits fondamentaux, garantis par la Constitution, des membres de Rezistans ek Alternativ ont été violés quand leur candidature aux élections générales du 3 juillet 2010 avait été rejetée. Cette instance avait, il y a six ans, donné 180 jours au gouvernement pour mettre en œuvre les remèdes préconisés.
Enjeux sur le plan politique
Si le statu quo perdure, les conservateurs auront gagné, analysent certains. «Cinquante ans après notre Indépendance, nous ne sommes pas encore une nation. Malheureusement, dans le cadre de ce projet de loi, je n’ai pas beaucoup entendu de réflexion autour de cette notion», regrette l’observateur Dev Virahsawmy.
Absence de consensus
Pour plusieurs observateurs, cette absence de consensus démontre l’incapacité de la classe politique traditionnelle à se réformer et à se débarrasser des références communautaristes et castéistes. Ainsi, le Best Loser System tant décrié sera maintenu et sera appliqué par la commission électorale lors des prochaines législatives.
Le système électoral actuel, héritage des colonisateurs britanniques, continue à perpétuer «les injustices», poursuivent-ils. L’une d’elles demeure la sous-représentation des partis d’opposition, produite par le scrutin First PastThe Post.
Aucune amélioration non plus sur la représentativité féminine à l’Assemblée nationale. L’une des mesures qui a eu l’approbation de l’ensemble de l’opposition a été le quota d’un tiers de femmes au niveau national sur les listes de candidats des partis. Mais avec le rejet de la réforme, cette proposition ne devrait pas être adoptée.
Selon les chiffres, il n’y a que 11 % de femmes au Parlement et 8 % font partie du Conseil des ministres alors qu’elles représentent plus de la moitié des électeurs. Autre anomalie : le transfugisme. La situation ne devrait pas changer.
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