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«Gilets jaunes»: le gouvernement français recule pour juguler la crise

4 décembre 2018, 18:17

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«Gilets jaunes»: le gouvernement français recule pour juguler la crise

Acculé par les pressions inédites venues des «gilets jaunes» et de ses opposants politiques, le gouvernement français a reculé mardi en suspendant pour six mois la hausse de la fiscalité sur le carburant et promis le gel des tarifs de l'énergie pendant l'hiver, pour tenter d'éviter de nouvelles mobilisations violentes.  

«Fixer le cap et le tenir est une nécessité pour gouverner la France, mais aucune taxe ne mérite de mettre en danger l'unité de la Nation», a souligné le Premier ministrefrançais Edouard Philippe lors d'une allocution télévisée, ajoutant qu'il «faudrait être sourd» pour ne «pas entendre la colère» des Français.

Depuis les émeutes violentes en France samedi - notamment des pillages et incendies dans des quartiers chics et symboliques de Paris - qui ont choqué au-delà des frontières, le gouvernement est engagé dans une course contre la montre pour tenter d'apaiser la colère des «gilets jaunes» contre la politique sociale et fiscale du gouvernement et prévenir de nouveaux heurts.

Après avoir tardé à prendre la mesure de la profonde colère populaire - et parfois détresse - et de l'inédite détermination de nombreux "gilets jaunes", l'exécutif a toutes les difficultés à ouvrir le dialogue avec ce mouvement atypique, né des réseaux sociaux, sans leader ni structure.

Des dizaines de lycées étaient aussi à nouveau bloqués mardi en France, au lendemain de rassemblements parfois émaillés de violences: un mouvement aux revendications disparates, porté par la vague des "gilets jaunes", qui annoncent une nouvelle manifestation à Paris samedi.

La politique du président Emmanuel Macron, qui s'affiche en "réformateur", a été perçue comme inégalitaire ces derniers mois par une partie de l'opinion. Il a notamment été accusé par certains "d'arrogance" et de manque d'écoute. 

Sa popularité est au plus bas, notamment plombée par plusieurs saillies polémiques où il a notamment qualifié les Français de "Gaulois réfractaires au changement" et estimé qu'un "pognon de dingue" était consacré aux aides sociales.

Mais jusqu'ici, le président était resté largement inflexible aux pressions de la rue, même face aux mobilisations contre la réforme du rail ou du code du travail.   

Plusieurs responsables politiques, de l'opposition comme de la majorité présidentielle, avaient appelé le gouvernement à faire un geste.

Dans un "souci d'apaisement", le gouvernement et le président Emmanuel Macron ont ainsi décidé de la suspension pendant six mois de trois mesures fiscales devant entrer en vigueur le 1er janvier 2019: la hausse de la taxe carbone, sur l'essence, le fioul et le diesel; la convergence de la fiscalité du diesel avec celle de l'essence et l'alignement sur la fiscalité des particuliers de la fiscalité du gazole des entrepreneurs non routiers.

6 mois, et après ?

«Nous voulons dans ce laps de temps identifier et mettre en oeuvre des mesures d'accompagnement justes et efficaces. Si nous ne les trouvons pas, nous en tirerons les conséquences», a ajouté le Premier ministre français.

Ni les tarifs de l'électricité, ni ceux du gaz n'augmenteront, comme c'était prévu, «durant la concertation et donc durant l'hiver qui s'annonce», a développé M. Philippe.

«Ces décisions, immédiates, doivent ramener l'apaisement et la sérénité dans le pays» et «permettre d'engager un vrai dialogue sur l'ensemble des préoccupations qui se sont exprimées ces dernières semaines», a-t-il ajouté.

Par ailleurs, une concertation locale sera menée du 15 décembre au 1er mars. «Les solutions doivent être différentes dans les grandes villes et les campagnes. Parlons-en, améliorons-les. Complétons-les. J'y suis prêt», a affirmé M. Philippe.

Selon le ministère français des Finances, les deux premières semaines d'actions des "gilets jaunes", à quelques semaines des festivités de Noël, ont déjà un impact «sévère et continu» sur l'économie.

Ces annonces d'Edouard Philippe ont provoqué de premières réactions contrastées chez les "gilets jaunes" à travers le pays. "6 mois, et après ?", s'interrogeaient nombre d'entre eux sur les réseaux sociaux. 

«Nous ne sommes absolument pas satisfaits. Ce ne sont que des annonces pour calmer la situation», a réagi la chargée de communication de Yellow Friday Revolution, un groupe de "gilets jaunes" de la région de Bordeaux (sud-ouest) qui revendique près de 6.000 membres sur Facebook.

De son côté, Benjamin Cauchy, une des figures du mouvement, a salué une "première étape" dans le moratoire. Mais «les Français ne veulent pas des miettes, ils veulent la baguette au complet», a-t-il déclaré à l'AFP.