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Christopher Rainer: sauter à pieds joints dans le train du digital

17 novembre 2018, 10:47

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Christopher Rainer: sauter à pieds joints dans le train du digital

La réussite en affaires tient à plusieurs choses, notamment aux compétences acquises, à la somme d’expériences vécues, au flair du bon filon à exploiter au bon moment. Le succès de Christopher Rainer, fondateur et directeur de Marideal.mu, qui a remportéle Tecoma Award 2018 la semaine dernière, tient un peu à tout cela.

Christopher Rainer, 37 ans, qui nous reçoit dans son bureau de Grand-Baie, semble encore un peu dépassé par son sacre aux IBL Tecoma Awards 2018, lui qui n’a jamais couru après la gloire. Même lorsqu’il a lancé sa plateforme en ligne Marideal.mu il y a cinq ans, bien que sachant qu’il avait trouvé une niche, il n’en a pas fait étalage dans la presse. En fait, ceux qui le connaissent savent que Christopher Rainer est quelqu’un de simple et de terre à terre. Et n’allez surtout pas croire qu’il s’agit d’un geek. Il n’est ni branché jeux vidéo, ni comic books et est athlétique.

Il est né en Afrique du Sud d’une mère mauricienne et d’un père autrichien, que leurs carrières professionnelles ont mené à Johannesbourg. De cette union sont nés Nicholas, 40 ans, et Christopher. Leur mère se remarie et la famille s’installe à Floréal. Christopher Rainer fait sa scolarité au Lorette de Vacoas, puis au collège St Joseph. Avant de rejoindre Le Bocage High School.

Son frottement avec son beau-père et les fréquentations de ce dernier font qu’il s’intéresse aux affaires et opte pour les matières commerciales. Mais il est obsédé par le surf. Lorsqu’il obtient son baccalauréat international, lui et un ami prennent une année sabbatique et se rendent en Europe pour faire le circuit européen de surf. «On avait acheté une petite voiture sur laquelle tenaient 12 planches de surf et on faisait le tour de l’Europe.»

Or, une blessure au dos met fin à son rêve d’être surfeur professionnel. «À aucun moment, je n’avais songé à faire des études supérieures car le surf était toute ma vie», confie-t-il. Il regagne Maurice. Comme un de ses bons amis a été admis à l’université de Curtin à Perth, en Australie, c’est là qu’il se rend et entame d’abord une licence en Business, soit le BCom.

N’ayant pas le sentiment que cela lui apprend grand-chose, à cette licence, il adjoint une autre en relations internationales. L’université de Curtin ayant des liens avec des universités européennes, au cours du dernier semestre de sa double licence, il se rend à Maastricht, en Hollande, et complète ses modules à l’université de cette ville. À son retour à Maurice, la chemiserie Aquarelle Clothing, filiale de CIEL Textile, le recrute comme Merchandiser. «Cela a été une école de formation en gestion pour moi.»

Il fait aussi le lien entre les tisseurs et les autres responsables d’accessoires pour obtenir un échantillon dans les délais prescrits, le faire valider par le client et honorer la commande. «C’était très structuré. Être Merchandiser m’a appris à faire attention aux détails. Tu ne peux rien laisser passer. Tu dois respecter ton Time and Action Calendar.» 

«Stimulation intellectuelle»

Aquarelle Clothing lui offre l’opportunité d’être Sales and Marketing Executive d’un nouveau partenariat entre Aquarelle Clothing et le fameux tisseur italien Tessitura Monti, à savoir Laguna Clothing, dont le siège se trouve à Bangalore, en Inde. Christopher Rainer relève le défi, d’autant qu’à Maurice en 2007, le textile plafonne. «Très souvent dans les affaires, être au bon endroit au bon moment est important. Laguna Clothing avait un produit exceptionnel qui a séduit. La société a connu une croissance remarquable», argue-t-il, en refusant de s’attribuer un succès dont une grande partie ne viendrait pas de lui.

«J’avais un produit facile à vendre. Et j’avais l’appui du réseau d’agents de Tessitura Monti qui était très connu en Europe. Donc, cela a été facile de recruter de grandes marques européennes.» Il a eu pour mentor l’Indien Sarbajit Ghose, le Chief Executive Officer de Laguna Textile, qui l’a formé aux subtilités du métier.

Lorsque les actionnaires de Laguna Textile décident d’avoir un bureau à Paris, Christopher Rainer est choisi pour s’y rendre. Il s’installe à Paris pendant deux ans, tout en continuant à voyager. «J’ai adoré ça et je me suis éclaté. Mais au final, j’ai réalisé que ça manquait de stimulation intellectuelle. On fonctionnait d’après les quatre saisons et c’était devenu répétitif, sans surprise.»

Il est envoyé à New York pour tester le marché. S’il adore la ville, il réalise que même si son produit est haut de gamme, les Américains préfèrent les chemises infroissables, soit préalablement traitées à l’ammoniac liquide. 90 % des chemises formelles vendues aux États-Unis sont ainsi. Il réussit tout de même à trouver des clients et à développer des relations avec eux, mais ce n’est pas autant que sur le marché européen.

L’autre expérience qui fait plus tard son chemin dans sa tête est la découverte de nouvelles technologies, en particulier la plateforme en ligne Airbnb. À chacun de ses déplacements, il loue son appartement par ce truchement, ce qui lui permet d’économiser pour se payer des vacances. Ce concept d’économie partagée qui ouvre l’accès à la démocratisation des logements lui plaît et il en mesure la portée.

Il regagne Maurice et est happé par l’hôtellerie, plus particulièrement par Sun Resorts. Il intègre ainsi le département des ventes pour le marché régional et les marchés émergents. Il réalise l’importance de la consultation en ligne pour les voyageurs étrangers. «Ils vont consulter des documents en ligne, des vidéos, des photos sur le Net. Et les réservations se font de plus en plus via la plateforme digitale.»

Christopher Rainer est également conscient qu’il n’y a rien ou si peu à cet effet pour les Mauriciens. Il se dit que si les deux géants Alibaba.com et Amazon ont réussi, c’est qu’il leur a suffi d’avoir une bonne idée et la développer au bon endroit et au bon moment. C’est alors qu’émerge l’idée de lancer Marideal.mu, destinée à mettre les offres hôtelières à la portée des Mauriciens. «C’était une niche non exploitée jusque-là et je me suis dit que j’allais m’appuyer dessus.» Il se cherche un partenaire qu’il trouve en la personne de l’Américain Alex Samuelson. Ils démarrent dans un petit bureau avec un téléphone et deux chaises. Le succès est au rendez-vous.

Aujourd’hui, Marideal.mu, c’est plus de 500 prestataires, dont 200 sont dans l’hébergement – de l’hôtel de luxe à l’appartement de plage – et le reste en services de bien-être comme les spas et les salons. C’est aussi plus de 100 000 clients ayant ouvert un compte sur cette plateforme. Il s’est aussi lancé dans l’organisation de déplacement à Rodrigues. Et pour ceux qui ne sont pas branchés digital, il a ouvert cinq agences à travers l’île. «Ce concept Omni-channel permet d’offrir deux options aux gens, digitale et physique.»

PriceGuru.mu a été la suite logique. Cette plateforme de vente de produits en ligne offre plus de 25 000 produits variés de 300 sociétés. Christophe Rainer et son partenaire Yannick Ayacanou ont même fait de l’intégration verticale car aujourd’hui, ils stockent ces produits dans leur entrepôt à Riche-Terre et les livres aux clients. Cette plateforme a eu jusqu’ici une moyenne mensuelle de 150 000 visites. «On essaie d’offrir un excellent rapport qualité-prix dans un délai de livraison oscillant entre un et deux jours.»

Et Christopher Rainer, père d’un garçon âgé d’un an, pense aujourd’hui à exporter ce concept de plateformes digitales de commerce en ligne dans les pays de la région et dans certains pays d’Afrique de l’Est, qui ont une bonne connexion Internet. Il n’en dira pas plus…