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Traités fiscaux avec l’Afrique: l’Economic Development Board décrédibilise l’étude du FMI

31 octobre 2018, 12:25

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Traités fiscaux avec l’Afrique: l’Economic Development Board décrédibilise l’étude du FMI

Dans un papier publié mercredi, le Fonds monétaire international soutient que les accords de non double imposition que Maurice signe avec certains pays d’Afrique subsaharienne ne rapportent pas forcément des FDI via notre centre financier. Mais l’EDB crie, lui, aux conclusions tendancieuses, vu que les données s’arrêtent à 2015.

La riposte de l’Economic Development Board (EDB) ne s’est pas fait pas attendre. Elle intervient juste après la publication du Working Paper du Fonds monétaire international (FMI) sur les accords fiscaux avec les pays d’Afrique subsaharienne.

À peine l’inquiétude exprimée par deux chercheurs du FMI quant à l’absence d’investissements directs étrangers (Foreign Direct Investment – FDI) générés par les pays signataires d’accords fiscaux avec la juridiction mauricienne, à travers des fonds transitant par son centre financier, que l’EDB a décrédibilisé les résultats de cette étude.

La recherche du FMI s’intitule «The Cost and Benefits of Tax Treaties with Investment Hubs: Findings from Sub-Saharan Africa». Elle a été publiée mercredi. Le constat, dressé par deux chercheurs, Sebastian Beer et Jan Loepick, à partir d’une étude effectuée auprès des économies de 41 pays africains allant de 1985 à 2015, démontre que la signature des traités avec des juridictions régionales, dont Maurice, ne résulte pas forcément en une augmentation des FDI. Au contraire, ces pays, 11 au total, qui ont conclu des accords de non double imposition, notent une baisse substantielle des revenus fiscaux collectés.

L’EDB a démoli la posture prônée par ces deux chercheurs, affirmant que les conclusions de cette étude ne reflètent pas la réalité dans ce secteur à Maurice. Pire : elles ne sont pas exactes et sont délibérément tendancieuses.

Les données utilisées dans ce document de travail, allant de 1985 à 2015, ne tiennent pas en compte les récents changements apportés dans l’architecture fiscale du secteur financier, ainsi que le cadre favorable mis à la disposition des pays voisins du continent africain pour les encourager à privilégier les investissements productifs.

Face aux craintes exprimées dans ce Working Paper quant à la baisse de revenus fiscaux dans les pays signataires des accords avec Maurice, l’EDB précise que «Maurice est reconnue aujourd’hui par les institutions internationales telles que l’Organisation de coopération et de développement économiques (NdlR, OCDE) comme une juridiction bien réglementée quand il s’agit de la fiscalité internationale et que le pays s’est constamment engagé à prendre des mesures pour améliorer son cadre légal et réglementaire pour des échanges d’informations, conformément aux normes internationales».

Hypothèses

Une analyse que partage le fiscaliste Dev Erriah, dirigeant d’Erriah Chambers. Il argue que les auteurs basent leur étude sur des hypothèses et qu’il n’existe aucun fondement scientifique quant à leur posture. «Leur constat n’est pas nouveau. L’OCDE l’a déjà rappelé. Le principe de la fiscalité internationale présuppose que la convention de non-double imposition fiscale entraîne des pertes de revenus fiscaux. Il ne peut en être autrement. Un pays qui a signé un accord fiscal ne peut s’attendre à gagner à la fois des FDI et en même temps des revenus fiscaux à partir des transactions taxables.» Autant qu’il sache, aucun pays africain n’a jusqu’ici protesté officiellement à ce sujet auprès des autorités mauriciennes.

Le fiscaliste s’appuie sur un autre facteur pour justifier l’absence d’investissements transitant par Maurice pour atterrir en Afrique. Selon lui, avec la décision du président américain, Donald Trump, de baisser l’impôt sur les sociétés de 35 % à 21 %, les investisseurs américains préfèrent investir directement aux États-Unis, au lieu de passer par d’autres juridictions. «Cette décision, décriée par l’Europe comme une pratique fiscale dommageable, vise à doper le flux d’investissements étrangers en Afrique, avec des conséquences en Asie et en Afrique», affirme Dev Erriah.

Les nouveaux défis associés à la politique fiscale de certains pays poussent-ils les grosses sociétés à faire du «profit shifting» (transfert des bénéfices) ? Oui, semblent dire les auteurs de cette étude. Ils insistent sur le fait que «treaty- conclusion triggers a rerouting of investment and income flows, and potentially increases incentives for profit shifting».

Or, la décision de Maurice de souscrire aux directives de l’OCDE par rapport à la Convention multilatérale pour la mise en oeuvre des mesures relatives aux conventions fiscales pour prévenir le Based Erosion Profit Shifting s’inscrit dans cette logique : combattre tout risque de transfert de bénéfices d’une juridiction à une autre.