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Rapport africain sur le blanchiment: la riposte s’organise

13 juillet 2018, 23:00

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Rapport africain sur le blanchiment: la riposte s’organise

Les institutions et ministères concernés par l’accablant rapport de l’ESAAMLG sur le blanchiment d’argent travaillent à empêcher sa publication en septembre par l’organisme.

Deux mois. C’est ce qu’il reste à Maurice pour défendre sa position face au rapport de l’Eastern and Southern African AntiMoney Laundering Group (ESAAMLG). Le bureau du Premier ministre (PMO) et les ministères des Finances, des Services financiers et des Affaires étrangères sont tous mobilisés pour que ce rapport ne soit pas validé. Au menu: consultations avec les institutions mauriciennes, pour mettre une stratégie en place, et lobbying avec les pays amis qui font partie de l’ESAAMLG.

«Le Premier ministre suit l’affaire de près», soutient-on dans l’entourage de Pravind Jugnauth. Au PMO et au ministère des Finances, les fonctionnaires sont mobilisés. Ces derniers, ainsi que Pravind Jugnauth, assistent aux réunions avec les différentes institutions financières mauriciennes, dont la Financial Services Commission, la Financial Intelligence Unit et la commission anticorruption.

Ils conçoivent une stratégie pour une riposte. Lors du Conseil des ministres de l’organisme, qui se tiendra aux Seychelles, en septembre, au cours duquel Maurice devra défendre sa position, il faudra expliquer pourquoi le rapport est erroné.

Autres ministères mobilisés: les Services financiers et les Affaires étrangères. Ces derniers ont la tâche de faire du lobbying auprès d’instances internationales ainsi que des pays membres de l’ESAAMLG.

Au sein du ministère des Services financiers, l’on explique qu’il faudra contacter le Financial Action Task Force et même l’Organisation for Economic Co-operation and Development. «Nous sommes compliant à leurs normes, il nous faudra demander leur soutien.» En sus, il faudra faire un appel aux pays membres de l’ESAAMLG pour qu’ils soutiennent la motion de Maurice de rejeter le rapport.

Les trois «lacunes» décriées

L’évaluation de l’Eastern and Southern Africa Anti-Money Laundering Group (ESAAMLG) met en exergue les lacunes de Maurice dans les mécanismes de protection contre le blanchiment d’argent. Dans son édition du 10 juillet, l’express a fait le tour du rapport en détail. Trois principaux points y sont établis.

Pas de cadre juridique approprié contre le blanchiment d’argent 

Les assesseurs soutiennent que le manque de sanctions, ou encore de cadre juridique approprié, suggère que Maurice ne comprend pas complètement les risques de blanchiment d’argent. Ils déplorent d’ailleurs que le National Risk Assessment soit en cours depuis trop longtemps.

De plus, il n’y a pas d’obligation pour certaines entreprises non financières d’évaluer les risques de blanchiment d’argent. D’ailleurs, même pour les exercices de due diligence (ensemble de vérifications nécessaires), les assesseurs jugent Maurice «noncompliant».En sus, ils expliquent que Maurice ne comprend pas le danger que peuvent présenter les associations caritatives

Les dispositions en place ne sont pas prises au sérieux 

Le nombre de Suspicious Transaction Reports (STR) ou encore les enquêtes de l’Independent Commission against Corruption (ICAC): le rapport de l’ESAAMLG met au jour la torpeur dans le secteur. Les assesseurs estiment que pour un centre financier aussi important que Maurice, trop peu de STR sont déposés. En outre, ils relèvent que le nombre d’enquêtes de l’ICAC qui aboutissent à des poursuites est relativement faible.

Maurice ne comprend pas le risque de financement terroriste

Les assesseurs relèvent que Maurice ne prévoit pas de cadre juridique en ce qui concerne les sanctions financières pour prévenir la prolifération et le financement d’armes de destruction massive, par exemple. «Although Mauritius has generally adequate legal framework to enable provision of mutual legal assistance and extradition, this is affected by the inadequate criminalisation of Terrorism Financing and legal limitations in the scope of offences (…).» D’ailleurs, Maurice n’aurait pas de mécanisme d’identification légal comme préconisé par les United Nations Security Council Resolutions.