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Ex-présidents: ces privilèges qui coûtent cher aux finances publiques

24 mars 2018, 18:15

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Ex-présidents: ces privilèges qui coûtent cher aux finances publiques

Les anciens présidents et vice-présidents méritent-ils de bénéficier d’un salaire de plus de Rs 200 000 et d’autres avantages ? Le débat est relancé après le départ d’Ameenah Gurib-Fakim qui conserve à vie les privilèges liés à ce poste.

L’ancienne présidente percevra un peu plus de Rs 244 000 par mois, soit deux tiers de son salaire de Rs 367 000, sous forme d’une pension non imposable, selon la Presidents’ Emoluments and Pension (Amendment) Act. Cette loi prévoit aussi que le gouvernement mette à sa disposition un bureau, un secrétariat, une voiture avec chauffeur et un garde du corps. Est-ce mérité ? Oui, estime l’ancien vice-président de la République Raouf Bundhun.

Cette déférence envers nos dirigeants est pourtant décriée par beaucoup car elle coûte cher aux finances publiques. «C’est révoltant», tempête le travailleur social Eddy Sadien. «Dans un pays où la plupart des Mauriciens paient les impôts, la classe des politiciens est habituée à la culture du tou gratis. N’ont-ils pas honte d’empocher ce pactole à la fin du mois ? »

Pour Radhakrishna Sadien, président de la Government Servants Employees Association, c’est une politique de deux poids, deux mesures. Par exemple, le montant de la pension est la même pour celui qui a fait un ou deux mandats et un autre qui n’a pas terminé son quinquennat.

Il qualifie cette situation d’anormal vu l’absence de critères établis. De citer le cas des fonctionnaires : «Un fonctionnaire qui ne fait pas 25 ans d’affilée dans la fonction publique n’a pas droit à une full pension.» C’est pourquoi, selon lui, il faut revoir la formule.

Membre du gouvernement, le député Sudesh Rugoobar abonde dans le même sens. S’il reconnaît qu’il faut offrir aux anciens présidents une bonne retraite pour le service rendu au pays, il avance qu’il ne faut pas que le public ait la perception que «some people are more equal than others». «Il y a une impression d’abus liés à cette fonction alors que présidents, députés et ministres sont censés donner l’exemple», affirme-t-il. Il se prononce ainsi en faveur d’une formule plus équitable.

Raouf Bundhun, ancien vice-président de la République: «Un salaire de Rs 200 000, ce sont des peccadilles !»

Faut-il abolir certains privilèges accordés aux anciens présidents et vice-présidents ?

Pourquoi ? Je n’en vois aucune raison. Si on compare ce qui se passe dans d’autres pays, à Maurice, ce n’est rien du tout. Ailleurs, les anciens chefs de l’État ont droit à une résidence après leur départ. Ils bénéficient des billets d’avion de la compagnie nationale et voyagent en première classe. Ici, ce n’est pas le cas. J’ai servi mon pays depuis l’Indépendance, il y a 50 ans et on veut abolir le peu de privilèges qu’il nous reste.

Mais n’y a-t-il pas une injustice compte tenu du nombre d’années ? Certains font deux ans et ont droit aux mêmes avantages…

La loi est faite ainsi. Je ne veux pas me prononcer là-dessus. La loi prévoit deux tiers du salaire, comme c’est le cas pour les fonctionnaires. Ce débat est aberrant car on met tout le monde dans le même panier. On s’est battu pour le pays. On n’a pas été catapulté à la tête du pays du jour au lendemain.

Rs 200 000, n’est-ce pas quand même excessif ?

Non pas du tout ! Un salaire de Rs 200 000 ce n’est rien du tout, ce sont des peccadilles…si l’on compare ce qui se passe dans des compagnies. Les capitaines du privé sont rémunérés à juste titre. Les anciens présidents doivent mener une vie décente. Ils représentent toujours le pays même après leur retraite puisqu’ils sont invités dans des forums internationaux.

Mais pourquoi, selon vous, cela révolte les Mauriciens ?

Parce que nous sommes à Maurice. Un petit pays. Les gens pensent petit. D’après eux, qu’est-ce que j’aurais dû faire pour vivre ? Vann pistas ? Certains se demandent pourquoi eux et pas nous. Enfin, on est en train de parler des chefs de l’État. Il faut une hiérarchie dans la société. On n’est pas dans un pays communiste. Mais j'étais député et ministre, je sais aussi que le jugement du public peut être sévère.

Êtes-vous en faveur d’un code de conduite pour les présidents ?

Le président lui-même incarne la bonne conduite. C’est lui qui donne l’exemple. Quoi, maintenant il faut dire aux présidents qu’il est important d’avoir des manières ? Qu’il faut leur dire de ne pas accepter des sous des étrangers ? De ne pas parler à la presse ? Un président doit être au-dessus de tout soupçon. Quelqu’un qui commande le respect. C’est malheureux ce qui vient de se passer. La réputation du pays a été entachée. Heureusement que ce cinéma est derrière nous. On respire beaucoup mieux après son départ.