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Tensions aux Maldives après la décision de la Cour suprême

2 février 2018, 13:49

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Tensions aux Maldives après la décision de la Cour suprême

La tension régnait vendredi aux Maldives au lendemain de heurts entre opposition et police après la décision surprise de la Cour suprême de casser les condamnations des prisonniers politiques de haut rang, un revers majeur pour le régime du président Abdulla Yameen.

L’intervention de la plus haute instance judiciaire s’inscrit à contre-courant de la répression de l’opposition politique par le pouvoir en place ces dernières années. Elle ouvre la voie à un retour au pays de l’ancien président en exil Mohamed Nasheed, désormais en mesure de se présenter à la présidentielle qui doit se tenir cette année.

À l’annonce de la décision de la Cour suprême, des centaines de partisans de l’opposition sont descendus battre le pavé jeudi soir, avant d’être dispersés à coups de gaz lacrymogènes par la police.

Vendredi matin, les rues de la capitale Malé étaient relativement désertes mais les habitants estimaient possibles de nouvelles manifestations après la grande prière hebdomadaire dans cet archipel musulman sunnite d’environ 400.000 habitants situé dans l’océan Indien.

«Si la situation dégénère, le gouvernement pourrait déclarer l’état d’urgence», a déclaré vendredi une source militaire à l’AFP sous couvert d’anonymat.

La répression menée contre l’opposition par le président Yameen, qui avait battu M. Nasheed lors d’un scrutin controversé en 2013, a terni l’image paradisiaque de ces îles haut-lieu du tourisme de luxe.

Autre signe de tension: le gouvernement a limogé le chef de la police jeudi soir, au motif que M. Yameen n’était pas parvenu à le joindre.

La police avait auparavant assuré qu’elle mettrait en œuvre la décision de la Cour impliquant la libération des huit opposants emprisonnés - à une date toutefois non précisée - en attendant un nouveau procès pour les neuf dissidents concernés au total, y compris M. Nasheed.

Premier président démocratiquement élu du pays en 2008, ce dernier s’est félicité sur Twitter de la décision de la Cour et a appelé à «la libération immédiate des prisonniers politiques et la restauration de leurs droits civiques et politiques».

«Le président Yameen doit se plier à cette décision et démissionner», a-t-il ajouté.

Procès 'politiquement motivés'

M. Nasheed, qui se trouve actuellement au Sri Lanka voisin, affiche son intention de défier à la prochaine présidentielle M. Yameen, demi-frère d’un autre ancien président, Maumoon Abdul Gayoom, qui a régné de manière autocratique pendant 30 ans sur l’archipel avant l’élection de M. Nasheed.

M. Nasheed avait été acculé à la démission en 2012 et sa condamnation à 13 ans de prison en 2015 pour un chef lié au terrorisme - politiquement motivée selon l’ONU - l’empêchait de se présenter aux termes de la Constitution des Maldives.

Incarcéré, il était parti en 2016 à la faveur d’une permission médicale au Royaume-Uni où il avait obtenu l’asile et est depuis basé à Londres.

La Cour suprême a estimé jeudi que «la nature contestable et politiquement motivée des procès des leaders politiques justifie un nouveau procès». Elle a ordonné aux autorités de «relâcher immédiatement» les responsables emprisonnés jusqu’à un nouveau procès.

Dans leur ordonnance, les juges ont aussi rétabli dans leurs fonctions 12 parlementaires exclus pour avoir fait défection du parti au pouvoir, un retournement qui confère désormais la majorité des sièges à l’opposition au Parlement.

«Le verdict de la Cour suprême met en réalité fin au règne autoritaire du président Yameen», a estimé l’opposition dans un communiqué appelant à sa démission.

Un porte-parole de M. Yameen a assuré que la Cour avait pris sa décision sans procéder à l’audition des arguments du gouvernement.

Parmi les opposants dont la condamnation a été cassée figure l’ancien vice-président Ahmed Adeeb, accusé d’avoir fomenté une tentative d’assassinat contre le président et condamné en 2016 à 15 ans de prison.