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Le rugby ghanéen rêve de jouer dans la cour des grands

22 janvier 2018, 13:27

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Le rugby ghanéen rêve de jouer dans la cour des grands

Certaines portent le hijab, d’autres courent pieds nus sur un terrain de fortune, dont les lignes de but ont été tracées au charbon. Des conditions loin d’être optimales, mais les 14 joueuses rêvent d’être les futures stars du rugby ghanéen.

Rafatu Inusah fut l’une des premières femmes de ce pays d’Afrique de l’Ouest à se mettre au rugby en 2009. Elle est désormais entraîneuse et surveille les progrès de ses protégés, garçons et filles, dans cette école en banlieue d’Accra.

Elle est chargée de populariser ce sport pour la fédération nationale et d’aider à mettre en place le programme «Mets-toi au rugby» lancé par World Rugby, l’organe suprême du rugby mondial.

Le Ghana, qui compte seulement 13 clubs membres de la Ghana Rugby Football Union (GRFU), s’est fixé pour objectif la création de 120 écoles mixtes de rugby avec quelque 1.500 joueurs d’ici 2020.

«J’ai décidé d’aller d’abord dans les écoles islamiques afin de changer leur perception», raconte la jeune femme de 28 ans, qui porte elle-même le hijab.

«Ils pensent que le rugby n’est pas pour les filles. Mais ce sport est pour tout le monde - et ce, que l’on soit chrétien, musulman, hindou. Tout le monde peut jouer au rugby.»

Maimuna Dawda a longtemps regardé des matches derrière son poste de télévision avant de toucher un ballon ovale pour la première fois en 2016. Aujourd’hui, l’adolescente de 14 ans joue trois matches par semaine.

«Je veux jouer dans une équipe nationale et être la meilleure joueuse de rugby du Ghana», explique-t-elle fièrement à l’AFP en marge d’un tournoi inter-écoles de rugby à VII.

Reste encore à mettre sur pied une telle équipe féminine nationale.

Les Aigles du Ghana

Son pendant masculin existe depuis 2003, «les Aigles du Ghana», qui se sont qualifiés pour le Tournoi Coupe d’Afrique de rugby à VII en octobre à Kampala, la capitale de l’Ouganda. Et même s’ils n’ont décroché que la 9e place sur 10, grâce aux entraînements menés dans les écoles, les joueurs ghanéens rêvent de jeux Olympiques et de Coupe du monde, en particulier pour le rugby à VII.

Selon World Rugby, il y avait environ 8,5 millions joueurs inscrits et non-inscrits dans 121 pays à travers le monde en 2016, mais la moitié d’entre eux se concentrent dans seulement neuf pays (ceux des «Six Nations», Angleterre, Ecosse, Pays de Galles, Irlande, France et Italie, ainsi qu’en Afrique du Sud, en Australie et en Nouvelle-Zélande).

L’Afrique, avec ses 770.000 joueurs, est en première ligne de l’effort mondial pour développer le rugby et en 2016, près de 400.000 jeunes ont participé à des programmes d’initiation.

L’Afrique du Sud, géant historique du ballon ovale, et le Kenya -notamment réputé pour le rugby à VII- restent les leaders sur le continent.

Tenter l’impossible

Mais le président de la fédération ghanéenne GRFU, Herbert Mensah, est convaincu que le Ghana - surtout connu pour les exploits de ses footballeurs internationaux, les Black Stars - a tous les atouts pour devenir un compétiteur sérieux.

Il concède toutefois que son travail revient parfois à «tenter l’impossible». Il faut déjà démocratiser le rugby dans son pays, en en faisant un sport aussi inclusif et accessible que possible. «Si on peut jouer au football partout, on peut jouer au rugby aussi dans la rue», lance-t-il.

Herbert Mensah a parcouru le pays à la recherche de nouveaux talents pour modeler les Aigles du Ghana. L’équipe a d’ailleurs sa propre version du haka, le rituel guerrier maori chanté et dansé par les All Blacks néo-zélandais avant les matchs internationaux pour impressionner les adversaires.

Avec cette nouvelle équipe, et en partant de zéro, nous avons remporté le tournoi d’Afrique de l’Ouest en 2017.

Le manque de moyens est toutefois un lourd frein à l’expansion du sport, et le président de la GRFU doit souvent puiser dans ses économies personnelles pour payer les factures médicales ou le logement de l’équipe, et donner de son temps libre pour aller démarcher des sponsors, encore réticents.

«Maintenant nous devons former un nouveau groupe de joueurs prometteurs, qui ont aujourd’hui 10, 11, 12 ans et qui auront appris à jouer dès le plus jeune âge», explique M. Mensah.

Il se donne quelques années pour y arriver.