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Sunil Bholah: «Les employés de la SMEDA savaient que seule une partie d’entre eux iront à SME Mauritius»

15 décembre 2017, 22:00

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Sunil Bholah: «Les employés de la SMEDA savaient que seule une partie d’entre eux iront à SME Mauritius»

De retour après son déplacement en Inde, Sunil Bholah revient sur la polémique entourant la création de SME Mauritius et le recrutement controversé des employés de la SMEDA. Il en profite pour répondre à ses détracteurs, dont Soodesh Rughoobur, député du MSM, sur sa gestion du dossier.

Le «SME Bill» a été voté sous une pluie de polémiques. Expliquez-nous pourquoi avoir choisi de créer une compagnie privée plutôt qu’un organisme parapublic comme le préconise le plan directeur pour les petites et moyennes entreprises (PME) que votre propre ministère a lui-même commandé et approuvé ?

Il y avait un problème et il fallait changer d’institution. Il est vrai que le Master plan recommandait la création d’un organisme parapublic. Mais fermer un organisme parapublic pour en ouvrir un autre, c’était ne faire qu’un changement de nom.

Le problème de la SMEDA, c’est le fait qu’elle soit un organisme parapublic dans le domaine des PME. Or, c’est un secteur dynamique, dont les données et problématiques changent tous les jours. La structure d’un organisme parapublic reste lourde surtout avec toutes les ramifications du Pay Research Bureau, le gouvernement et le ministère. D’où la nécessité de créer une compagnie «autonome» qui peut prendre des décisions rapidement. Et les mettre en œuvre tout aussi rapidement, avec efficacité. C’est précisément ce qu’il faut si l’on veut que les PME deviennent l’épine dorsale de notre économie.

Après les recommandations du plan directeur (publié en mars 2017), il y a eu des discussions au niveau du gouvernement et nous sommes tombés d’accord sur la création d’une compagnie. Cela a été répercuté dans le Budget de cette année. Je ne comprends pas pourquoi l’opposition ainsi que ceux qui ont critiqué le projet de loi ont fait l’impasse sur ces faits.

Le drame, c’est que quand nous avons présenté le projet de loi, ils étaient plusieurs à croire que ce n’est qu’à ce moment que le ministère allait créer SME Mauritius Ltd. Or, ce projet de loi avait pour objectif d’abroger la loi existante, soit la SMEDA Act, tout en mettant sur pied un Registry des PME.

Pourquoi est-ce le ministère qui abritera le bureau du Registrar des PME et non SME Mauritius ?

Rappelez-vous que le bureau du Registrar of Cooperatives aussi tombe sous la responsabilité de mon ministère. Il en est de même pour le Corporate and Business Registration Department qui tombe sous l’égide du gouvernement. Il fallait avoir un Registrar responsable des PME au sein du ministère de tutelle. Quand on a créé SME Mauritius, il y avait déjà une décision du cabinet en ce sens. Quand on a engagé le CEO de SME Mauritius, Rajendra Puddoo, ce projet était déjà à l’agenda.

Encore une autre fausseté qui a circulé : c’est la première fois qu’une compagnie d’État est mise sur pied ! Tout le monde a oublié qu’Enterprise Mauritius (EM), qui est une state-owned private company, est elle même le fruit d’une fusion de trois organismes parapublics effectuée en 2004. Il s’agissait à l’époque de la Mauritius Industrial Development Authority (MIDA), de l’EPZDA et du SUBEX-M. Il y a également la National Empowerment Foundation ou encore Polytechnics Mauritius qui sont des compagnies d’État. J’ai fait beaucoup de recherche avant de proposer la création de SME Mauritius sous la structure d’une compagnie.

Qu’en est-il des employés de la SMEDA ? Ils soutiennent qu’ils font les frais d’un conflit que vous avez avec le «Managing Director» de la SMEDA…

Tout cela est faux. La SMEDA est elle-même le fruit de plusieurs fusions effectuées sans aucune étude. Le rapport l’Office of Public Sector Governance en 2013 soulignait déjà que le personnel mix (technicien et administratif) n’était pas conforme. Le rapport a même souligné qu’il y avait 35 employés en surnombre et qu’il fallait licencier. Mais aucune action n’avait été prise à l’époque. La situation était déjà pourrie.

La SMEDA compte, à ce jour, une centaine d’employés. Je leur ai expliqué dès le départ que SME Mauritius ne pourra employer qu’une partie d’entre eux.

Concernant ceux qui ne veulent pas rejoindre SME Mauritius, nous sommes déjà en pourparlers avec le ministère de la Fonction publique pour un redéploiement. Il y a à peu près 6 000 postes vacants dans le secteur public. Toutes les procédures au niveau du ministère de l’Emploi et du State Law Office sont en cours et des Option Forms leur seront distribués en temps et lieu. Au total, SME Mauritius comptera environ 60 membres du personnel, y compris des anciens de la SMEDA contre la centaine d’employés de la SMEDA à ce jour.

Plusieurs employés sont formés uniquement pour le secteur des PME…

Vous savez, il n’y a que les pilotes qui sont formés que pour piloter des avions ! Par contre, pour un comptable, une secrétaire, une vendeuse dans un magasin, c’est différent. C’est une excuse complètement frivole !

Et les Business Development Officers (BDO) qui y travaillent depuis plus de 20 ans ? Et pourquoi reprendre des employés de la SMEDA si elle ne fonctionne pas ?

S’agissant des BDO, on se demande comment on les a utilisés jusqu’ici. Il faut aussi faire ressortir que le bilan de la SMEDA n’est pas à 100 % négatif. Mais il fallait apporter des changements.

Le Master plan, tout comme les employés de la SMEDA, souligne que le problème avec le développement du secteur des PME, provient surtout du «policy decision» en raison d’un manque de connaissance approfondie du secteur depuis ces dernières années. Pourquoi donc blâmer la SMEDA alors qu’au final, elle ne faisait qu’exécuter une politique gouvernementale erronée ?

La politique n’était pas bonne et l’institution non plus. On n’avait pas une institution compétente sous la main.

Les entrepreneurs sont nombreux à se demander ce qu’il adviendra des facilités qu’ils avaient avec la SMEDA : les foires, formations, «counselling » gratuits jusqu’ici. Ces services existeront-ils toujours ?

Tout ce que la SMEDA fait, on en fera encore plus avec SME Mauritius. Il y aura une présence accrue de SME Mauritius auprès des entrepreneurs. Et là, je déplore une autre fausseté : les services de SME Mauritius seront payants. C’est totalement faux ! Tous ces services seront gratuits et accessibles aux entrepreneurs.

Mais en tant que compagnie privée, SME Mauritius sera-t-elle appelée à générer des profits ?

Non. Prenons le cas d’EM. Le gouvernement lui donne un grant pour ses opérations et ses dépenses. Dans le cas de SME Mauritius, le grant qui était autrefois dédié à la SMEDA va être dirigé à SME Mauritius. La nouvelle entité n’est pas une compagnie commerciale. C’est une entreprise pourvoyeuse de services.

Puisque la SMEDA a encore un budget jusqu’à juin 2018, comment SME Mauritius va-t-elle opérer ?

Il y a un budget, et maintenant que la SME Act a été votée, il faudra attendre sa promulgation. Nous appliquerons par la suite chaque disposition jusqu’à ce que toutes les activités et tous les actifs de la SMEDA soient complètement transférés à SME Mauritius. Nous pensons que d’ici février 2018, tout devrait être finalisé. Pour l’heure, la SMEDA continue à opérer de même que SME Mauritius. Celle-ci est en phase de structuration.

Quelle sera la place des microentreprises au sein de la stratégie de SME Mauritius ?

Je lance un appel pour que toutes ces entreprises se fassent enregistrer afin qu’elles aient plus de visibilité. En s’enregistrant, elles seront appelées à donner des informations sur leurs activités et spécificités. Ce qui nous permettra de mettre sur pied des stratégies et services qui leur seront destinés. Certaines microentreprises craignent de payer la taxe si elles s’enregistrent. Mais il faut arrêter avec cette mentalité. Elles doivent venir vers nous afin que nous puissions les aider.

Que répondez-vous à Soodesh Rughoobur ainsi qu’à vos détracteurs par rapport à votre gestion du dossier SME Mauritius ?

Il aurait dû faire ses recherches avant de s’exprimer et connaître  l’histoire des compagnies d’État telles qu’EM. Il avait donné une interview dans l’express dans laquelle il me demandait de revoir ma copie. Je n’ai pas commenté ; j’ai répondu au Parlement. J’étais convaincu qu’il fallait aller de l’avant. S’il n’est pas d’accord, c’est son choix.