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A Porto Rico dévasté par l'ouragan, une tâche titanesque pour enfin rétablir l'électricité

6 décembre 2017, 10:16

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A Porto Rico dévasté par l'ouragan, une tâche titanesque pour enfin rétablir l'électricité

Poteau arraché après poteau arraché, les électriciens travaillent sans relâche à Porto Rico pour rétablir le réseau dévasté lorsque l'ouragan Maria a frappé, le 20 septembre. Epuisés, sous la pression d'habitants sinistrés depuis des semaines, ils puisent leur force dans ce cri de joie: "La lumière est revenue!"

Au petit matin, une brigade de six électriciens équipés de deux grues s'attaque à l'ascension d'un chemin en terre escarpé qu'ils ont ouvert quelques jours plus tôt dans une région montagneuse près de Ponce, dans le sud de l'île caribéenne. Leur but: accéder à l'enchevêtrement de câbles, poteaux et branches laissé dans le sillage de l'ouragan meurtrier. 

"C'est dur mais c'est comme ça qu'on se donne du courage, en se fixant des objectifs", explique Daniel Velez, 42 ans et chargé de rétablir les lignes électriques dans cette équipe.   

"Tout le monde scrute ce que l'on fait et beaucoup sont très reconnaissants", ajoute-t-il, casque jaune vissé sur la tête comme ses collègues, tous en sueur sous le dur soleil de la mi-journée tropicale. 

Débroussailler, démêler le tout, percer le sol, planter le nouveau poteau et installer les câbles leur prend presque toute la journée. Et il leur en reste encore 50.000 à installer. 

"La première fois qu'on a rétabli l'énergie dans un quartier ça a été impressionnant", se souvient Daniel Velez. "Ca remplit de fierté de voir une telle joie, et que tout le monde t'applaudisse, et les gens qui pleurent. C'est émouvant". 

 Plongés dans le noir 

Comme eux, plus de 3.300 personnes travaillent au rétablissement de l'électricité sur ce territoire américain, entre employés de l'Autorité publique de l'énergie électrique (AEE) de Porto Rico, du Corps des ingénieurs de l'armée américaine et de plus de 60 entreprises locales. 

Les ouvriers de l'AEE travaillent six jours de suite, plus de 12 heures ou plus par jour, depuis que l'ouragan a soufflé sur l'île ses vents dévastateurs de plus de 250 km/h. 

"D'où pensez-vous que viennent ces cernes", ironise une employée de l'entrepôt de Ponce. 

La tâche est si vaste qu'une bonne partie des 3,4 millions habitants de Porto Rico sont toujours privés de réfrigérateurs et de ventilateurs dans la chaleur suffocante, et plongés dans le noir la nuit. En fin de semaine dernière, la production d'électricité n'atteignait que 58% de ses capacités. 

"Notre système était très ancien", explique à l'AFP Justo Gonzalez, directeur intérimaire de l'AEE. "Aucun système électrique du monde n'aurait pu supporter" un tel choc, poursuit l'homme, qui lui non plus n'a toujours pas l'électricité chez lui. 

Si des soupçons de corruption ont entravé les réparations, pour les techniciens sur le terrain, les obstacles sont bien plus tangibles. Face au manque de matériel, ils recyclent comme ils peuvent ce qu'il reste des poteaux et câbles détruits.  

"On n'a pas de poteaux, on n'a pas d'isolant, on n'a pas de câbles, on n'a pas de personnel, ni de grue", énumère Angel Figueroa Jaramillo, président du principal syndicat de l'AEE.

"Il y a des endroits où on a trois grutiers pour une seule grue. Et une grue qu'il faut traiter avec beaucoup de soin parce qu'elle est vieille", poursuit-il. 

Un manque de matériel qui s'explique notamment par le fait qu'un premier ouragan, Irma, était déjà passé tout près de l'île deux semaines avant Maria, selon M. Gonzalez. Puis, quand le puissant ouragan s'est abattu sur Porto Rico, les autorités ont donné la priorité aux livraisons d'aliments, d'eau et de médicaments. 

 'Quel beau transformateur' 

Vingt jours après le passage de Maria, le Corps des ingénieurs américains a ordonné la livraison de 50.000 poteaux et de 10.460 kilomètres de câbles pour Porto Rico. Selon M. Gonzalez, 6.000 poteaux commenceront "bientôt" à arriver chaque jour. 

A Gurabo, une zone urbaine du centre-est de l'île, une autre brigade s'affaire. La nuit tombée, les habitants sont assis sous leurs porches et regardent, avec une impatience mêlée de nervosité, les électriciens travailler. 

"Aïe, merci mon Dieu, ce transformateur a l'air magnifique! Qu'il est beau", s'exclame Maria Carrion, une retraitée de 64 ans. 

La première chose qu'elle fera quand le courant sera revenu? "Laver le linge". Ses mots se précipitent. "Et couper l'herbe", dit-elle, avant de se raviser: "En fait, de nuit, non. Je mettrai plutôt le ventilateur en marche, et toutes les bouteilles d'eau dans le congélateur et j'aurais beaucoup, beaucoup de glaçons", rêve-t-elle à haute voix. 

"Et après, je regarderai la télévision. Je ne vais pas dormir"