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Vijay Ramgoolam: «Le SME Bill est une erreur»

28 novembre 2017, 16:39

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Vijay Ramgoolam: «Le SME Bill est une erreur»

Vijay Ramgoolam compte 39 années comme fonctionnaire, dont 23 ans au ministère de l’Industrie. Entre 2006 et 2010, il a été directeur de la Small and Medium Enterprises Development Authority (SMEDA). Selon lui, le ministre est en train de commettre une erreur concernant le Small and Medium Bill. Il lance un appel au Premier ministre pour revoir ce dossier.

Le «SME Bill» suscite une vive polémique actuellement. Vous qui avez beaucoup d’expérience dans le domaine, quelle est votre opinion sur le sujet ?

Je suis surpris, comme beaucoup de personnes, que la SMEDA devienne une compagnie privée. D’ailleurs, le député du gouvernement Sudesh Rughoobur a fait une réflexion à ce sujet. Le plan directeur ne préconise pas de compagnie privée. Je crois que cette nouvelle institution privée sera la seule à Maurice qui soit financée par l’argent public qui ne générera pas de revenus. De plus, en tant que compagnie privée, cette institution ne sera pas sujette à des questions au Parlement, ni à une interreaction du directeur de l’Audit.

N’y a-t-il pas d’autres institutions, comme la Mauritius Housing Corporation (MHC), qui opèrent comme des compagnies privées ?

Oui, mais la MHC génère des revenus. Elle fonctionne comme une banque. Elle avance des prêts et obtient, en retour, des intérêts. Ce ne sera pas le cas de SME Mauritius. Une autre question me taraude. Actuellement, quand un entrepreneur se rend à la SMEDA pour solliciter de l’aide, il peut obtenir un business plan gratuitement. Maintenant que ce sera une compagnie privée, cela sera-t-il payant ?

De nombreux entrepreneurs pensent que durant ces trois dernières années, la SMEDA a été un échec. Ne croyez-vous pas que le ministre Sunil Bholah a eu raison créer une nouvelle institution ?

Le ministre doit expliquer les raisons de cet échec. J’ai entendu dire qu’il ne peut pas travailler avec l’actuel Managing Director (MD) de la SMEDA (NdlR, Phalraj Servansingh). Il faut se demander qui l’a nommé à ce poste. Le fait qu’il ait déjà trouvé un Chief Executive Officer (NdlR, Raj Puddoo) pour la nouvelle institution en dit long. En tout cas, lui seul en connaît les raisons.

Pensez-vous que le MD soit un proche de Pravind Jugnauth et qu’il ait eu peur de le rappeler à l’ordre ?

Comment le saurai-je ? Mais laissez-moi vous dire une chose : on ne sait pas qui a nommé le MD de la SMEDA. Un ministre qui n’est pas satisfait de son travail aurait dû parler à son leader et lui dire que la personne n’est pas à la hauteur. Ou exprimer son insatisfaction concernant cette personne au Conseil des ministres. En tout cas, la nouvelle institution est vouée à l’échec. Je lance un appel au Premier ministre pour qu’il revoie ce dossier. Ce secteur est très important pour l’avenir économique et aussi il ne faut pas que le personnel de la SMEDA vive dans l’angoisse.

Malgré la garantie du ministre qu’aucun employé ne sera laissé sur la touche, il semble qu’il y ait une crainte parmi eux. Cela est-il justifié ?

À ma connaissance, plusieurs employés seront reclassés dans d’autres ministères ou seront appelés à prendre leur retraite avec tous les bénéfices qui leur sont dus. Vous savez, ces employés ont été recrutés pour travailler dans ce secteur. Maintenant, on leur demande de bouger. Il y a de gros risques que ces personnes ne trouvent pas d’emploi qui sied à leurs compétences. Ils seront obligés de prendre leur retraite. Je pense que c’est ce que veut le ministre. On change les règles du jeu pendant un match.

Selon le ministre, il y a trop de cadres administratifs alors qu’un tel secteur a besoin de davantage de personnel technique. Qu’en pensez-vous ?

Pendant plus de six ans, j’ai travaillé avec ces personnes et on a fait du progrès. Maintenant, on dit qu’elles ne sont pas à la hauteur. Il faut chercher l’incompétence ailleurs.

Le «SME Bill» prévoit la nomination d’un «Registrar», qui sera un fonctionnaire. Pensez-vous qu’il pourra suivre et évaluer les conséquences de la politique établie par le ministère ?

Je me demande quel sera le rôle de ce Registrar. Autant que je sache, toutes les entreprises doivent s’inscrire auprès du Registrar of Companies. Je crains que le Registrar ne soit une réplique du Registrar of Companies.

Vous avez émis beaucoup de critiques. Quelles sont les solutions, selon vous ?

Il faut mettre en avant les produits. Je ne me vante pas, mais il y a eu une avancée entre 2006 et 2011. J’avais organisé des caravanes de l’entrepreneuriat et on se rendait aux quatre coins du pays. J’avais même proposé d’ouvrir une boutique d’artisanat à l’entrée du Jardin botanique de Pamplemousses et une autre à Flic-en-Flac, ainsi que dans d’autres régions très prisées des touristes.

Justement, le gouvernement vient de proposer une mesure pour que les touristes obtiennent un bon d’achat de Rs 200 quand  ils achètent des produits mauriciens. Votre avis ?

Comment vont-ils contrôler cela ? Parfois, c’est difficile d’identifier les produits locaux.

Vous faites partie de ceux qui ont donné un coup de main à ce gouvernement lors des élections de 2014. Aujourd’hui, vous êtres très critique à l’égard de ce même gouvernement. Pourquoi ?

Comme beaucoup de personnes, je suis déçu. Vous avez fait appel à moi parce que je connais ce secteur. Et je le répète, le SME Bill est une erreur.