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Harcèlement sexuel au Congrès américain: le ménage commence

27 novembre 2017, 23:55

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Harcèlement sexuel au Congrès américain: le ménage commence

Le Congrès américain commence à se réformer pour traiter les affaires de harcèlement sexuel à l'intérieur de l'institution, après de multiples accusations lancées par des femmes contre des parlementaires en exercice.

Les élus reviennent lundi après leurs congés de Thanksgiving et voteront mercredi, à la Chambre des représentants, pour rendre obligatoire une formation anti-harcèlement sexuel pour tous les élus et leurs collaborateurs.

Les chefs du Congrès sont sous pression pour réagir, vite, au déballage d'affaires en cours.

Un sénateur démocrate, Al Franken, fait l'objet d'une enquête de la commission éthique du Sénat pour des gestes déplacés et un baiser forcé, pour lesquels il a présenté ses excuses. Dès son retour à Washington lundi, il a convoqué une conférence de presse pour un nouvel acte de contrition.

«Je sais que j'ai déçu beaucoup de monde», a-t-il déclaré. «Je sais qu'il n'existe pas de mot magique pour regagner votre confiance, et que cela prendra du temps».

«Cela a été un choc», a-t-il poursuivi. «J'ai honte».

Les allégations contre lui ne sont pas les plus graves; la femme qu'il a embrassée de force en 2006, Leeann Tweeden, a accepté ses excuses. 

Les faits reprochés au doyen démocrate de la Chambre, John Conyers, sont plus lourds: le harcèlement sexuel de collaboratrices pendant des années. L'une d'elles a signé un règlement à l'amiable en 2015 et obtenu des indemnités. Mais l'élu, âgé de 88 ans, dément les accusations et refuse de démissionner, plaçant en difficulté tout le parti démocrate.

Manque de transparence

Du côté républicain, le président Donald Trump soutient coûte que coûte un candidat au Sénat, l'ancien magistrat ultra-conservateur Roy Moore, accusé d'attouchements sur des mineures il y a plusieurs décennies.

Plusieurs élus, emmenés par la démocrate Jackie Speier et la républicaine Barbara Comstock, veulent aller plus loin que la seule sensibilisation au harcèlement et réformer une loi de 1995 sur la façon dont les victimes, à l'intérieur du Congrès, peuvent rapporter des faits de harcèlement et obtenir réparation.

Cette loi avait été adoptée en moins de deux semaines en janvier 1995, à une voix de l'unanimité. Mais l'époque a changé et les procédures établies à l'époque sont aujourd'hui dénoncées comme obsolètes et trop en défaveur des plaignants.

«Le système mis en place en 1995 protégeait le harceleur», a dit Jackie Speier sur la chaîne ABC dimanche. «Une victime m'a dit que le processus était presque pire que le harcèlement lui-même».

Les nouvelles règles proposées permettraient d'accélérer la procédure interne après une plainte, alors qu'aujourd'hui les victimes sont obligées de recourir dans un premier temps à une médiation. Un poste d'avocat des victimes serait créé. La clause de confidentialité ne serait plus obligatoire. Les versements d'indemnités viendraient désormais de la poche de l'élu responsable du harcèlement, alors qu’aujourd’hui c'est le contribuable qui paie.

Et surtout, la liste et le montant des règlements de plaintes devrait être rendue publique annuellement.

Trump et Moore

Malgré leur embarras sur Al Franken et John Conyers, les démocrates veulent exploiter l'affaire Roy Moore pour convaincre les électeurs qu'ils sont le véritable parti défenseur des femmes.

Ils pointent du doigt le comportement de Donald Trump qui, en défendant Roy Moore, soutient la ligne de défense du candidat consistant à traiter ses accusatrices de menteuses. Comme le milliardaire l'avait fait concernant la dizaine de femmes l'ayant accusé de harcèlement ou pire, l'an dernier.

Tous les chefs et sénateurs républicains ont coupé les ponts avec Roy Moore, mais ils craignent qu'il ne soit élu le 12 décembre, lors de la sénatoriale partielle de l'Alabama.

Plusieurs membres de la majorité semblent dire qu'ils préféreraient perdre le siège républicain et voir le candidat démocrate, Doug Jones, élu, plutôt que de voir Roy Moore rejoindre leurs rangs.

«Je veux être du bon côté de l'histoire dans cette affaire», a déclaré le sénateur de Caroline du Sud Tim Scott sur ABC.

Le locataire de la Maison Blanche voit les choses à plus court-terme: il a besoin du plus de sénateurs républicains possibles pour faire adopter sa réforme de la fiscalité avant la fin de l'année. La majorité sénatoriale actuelle est de 52 sièges sur 100. Pas question de descendre à 51, dit le président américain.