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Rohingyas: Shakeel Anarath raconte la misère d’un peuple déraciné

24 novembre 2017, 21:40

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Rohingyas: Shakeel Anarath raconte la misère d’un peuple déraciné

La première fois qu’il est parti à la rencontre des Rohingyas, c’était fin octobre. Shakeel Anarath s’y est à nouveau rendu ce mois-ci. Il en est persuadé, ce qui se passe au Myanmar «est l’affaire de tous».

Cela fait des mois que l’on entend parler du peuple Rohingyas. Il s’agit de musulmans qui fuient le Myanmar (ex Birmanie) à cause des persécutions et des crimes atroces dont ils sont victimes. Et à la racine de leur malheur : une loi birmane sur la nationalité datant de 1982. Celle-ci spécifie que seuls les groupes ethniques qui peuvent prouver leur existence sur le territoire avant 1823, peuvent obtenir la nationalité birmane. Même si les Rohingyas affirment qu’ils étaient bel et bien là, au Myanmar ne les reconnaît pas.

Certains ont donc fui vers la Malaisie ou l’Indonésie depuis les éclats de violence entre l’armée birmane et les rebelles Rohingyas. D’autres ont choisi le Bangladesh pour se réfugier. C’est là que notre compatriote Shakeel Anarath les a rencontrés. Douloureux récit.

«On ne peut rester insensible à la souffrance de ce peuple. C’était mon devoir de faire quelque chose.» Ce sont les premières phrases de Shakeel Anarath lorsqu’on lui demande ce qui l’a poussé à aller jusqu’au Bangladesh. C’est sa page Facebook qui nous a interpellés. Ses histoires sont partagées des centaines de fois. C’est que les photos et les vidéos qui y sont partagées sont déchirantes. Dans les clichés, il y a ces enfants qui sont sans vêtements. Ces adultes qui souffrent visiblement de malnutrition. Cette vieille dame, âgée de 107 ans selon ces proches, qui ne mange plus depuis des jours...

«C’est ma deuxième visite en un mois. La première fois, c’était du 23 au 31 octobre. Je m’y suis rendu avec trois autres personnes au nom de l’Association Al Ihsaan. Nous étions en mission humanitaire.» Et Shakeel Anarath d’ajouter : «Je reste persuadé que cette affaire ne concerne pas qu’une communauté. C’est l’affaire de tous.»

Génocide

Shakeel Anarath raconte que les images qui sont en circulation n’ont rien à voir avec la réalité du terrain. Il a été secoué par ce qu’il a vu, mais aussi par les expériences humaines qui ont découlé de cette première visite. «Cette fois, je suis allé en voyage d’affaires en Chine depuis le 12 novembre et je me suis fait un devoir de m’y rendre, une fois de plus. Mon cœur est resté là- bas…» dit ce père de famille.

Amnesty International a déjà qualifié ce qui se passe au Myanmar d’apartheid. Pour Shakeel Anarath, il y a d’abord les horreurs que ce peuple a laissées en quittant la Birmanie, mais aussi les souffrances qu’ils ont trouvées dans les camps de réfugiés. «Ils n’ont pas eu d’autre choix que de fuir. Ici, j’ai rencontré des orphelins qui sont complètement livrés à eux-mêmes. Mercredi dernier, j’ai rencontré un père de famille et ses deux enfants. Nous voulions donner de l’argent à la mère et lorsque j’ai demandé où était la maman, ils m’ont dit qu’elle est morte lorsqu’ils fuyaient la Birmanie…» Et comme cette histoire, Shakeel Anarath en a récolté des tas.

Il est certes conscient d’avoir quitté sa propre famille à Maurice. Cependant il dit se sentir utile d’avoir pu venir en aide à ces gens en souffrance. «J’ai énormément appris de cette expérience humaine. J’ai un autre regard sur la nourriture, sur notre façon de consommer l’eau, sur notre train de vie. Là-bas, certaines personnes mangent une seule fois par jour. Et certains jours, ils n’ont pas de nourriture.»

Appel à l’aide

À travers sa page Facebook, Shakeel Anarath fait appel à la générosité de ceux qui veulent bien soutenir les Rohingyas. «Ma seconde mission était de faire un bilan de la première visite et de voir les priorités des réfugiés. Pour moi, c’est l’affaire de tous. Le peuple mauricien a toujours été généreux. Ce qui se passe là-bas concerne tout le monde parce que nous sommes tous humains. C’est d’abord un sujet humanitaire. Il ne s’agit ni de communauté, ni de pays.»

Shakeel Anarath rentre à Maurice ce samedi 25 novembre. Il dit espérer que lors de sa prochaine mission, il y aura plus de gens qui se sentiront touchés par ce que vivent les réfugiés Rohingyas.