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Incendie à Shoprite: «Nous ne partirons pas avant d’avoir terminé le travail, de l’avoir retrouvé»…

19 novembre 2017, 10:41

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Incendie à Shoprite: «Nous ne partirons pas avant d’avoir terminé le travail, de l’avoir retrouvé»…

Cela fait une semaine, jour pour jour, que l’incendie a éclaté à Shoprite. Toujours aucune trace de Dinesh Domah. Qui était cet homme de 24 ans, qui avait une petite amie, des projets, des rêves plein la tête? A-t-il pu survivre après avoir été pris au piège, dans cette fournaise?

L’épais nuage de fumée qui flottait dans le ciel, à Trianon, s’est dissipé. En ce vendredi matin, le soleil a repris ses droits. Il brille de mille feux. Sale temps pour les pompiers, les officiers de la Special Mobile Force, les policiers, exténués après la bataille sans merci menée contre l’incendie qui a ravagé l’entrepôt de l’hypermarché Shoprite.

Dans leurs yeux, pourtant, une flamme : celle de la détermination. Ils ne partiront pas avant d’avoir retrouvé Dinesh Domah, affirment-ils. Le jeune homme a soufflé ses 24 bougies le 7 novembre. C’était un mardi et ses proches lui avaient préparé une petite surprise. Dimanche, le soir du drame, il devait aller rejoindre ses amis, qui voulaient lui souhaiter bon anniversaire…

Soldats et pompiers déblaient l’entrepôt complètement ravagé par les flammes.

Souriant, jovial, bosseur, généreux. C’est ainsi que ses proches décrivent Dinesh. «Il est très ‘famille’ et nous sortions souvent ensemble. Je ne l’ai jamais entendu hausser le ton ou se disputer avec quelqu’un», lâche sa cousine Yogita. Dans sa voix, un mélange d’espoir et de tristesse. Dinesh travaille dur, il a des projets, des rêves, une petite amie. «Cela fait un moment qu’ils sont ensemble. Ils avaient évoqué des projets d’avenir, même si le mariage n’était pas pour tout de suite.»

Les nuages s’amoncellent, les oiseaux ne chantent plus. Comme pour respecter la douleur des proches de Dinesh. Un parfum de désolation flotte dans l’air, se mélangeant à une odeur de «viande pourrie» qui prend aux tripes. Pompiers et soldats continuent à fouiller sans relâche ce frigo à ciel ouvert. Le ballet des véhicules, rouges, bleus, blancs, kaki, continue sans cesse. La relève du matin arrive, les visages sont presque frais. Ceux qui ont passé la nuit en enfer rentrent chez eux. Les traits sont tirés, marqués, les uniformes jaunes ont viré au noir. Le découragement est palpable. Toujours pas de Dinesh en vue.

Le jeune homme a commencé à travailler à Shoprite il y a sept ans. Et ne comptait pas changer de job le lendemain, comme le stipulent les rumeurs. L’entrepôt, c’était sa deuxième maison, il en connaît les moindres coins et recoins. Ce qui fait dire à certains qu’il a pu se mettre à l’abri…

1 500°c à l’intérieur

Depuis que le feu a été maîtrisé, les experts ratissent l’hypermarché de long en large, en travers. Au cas où. Au milieu des décombres, des étagères en métal qui ont fondu, des bouteilles de whisky qui sont choses du passé, du poulet et autres denrées, tous partis en fumée. Pas de corps, pas d’os, pas de restes humains.

Dehors, un officier du Forensic Science Laboratory fait les poubelles. Il en ressort bredouille, peu loquace. Après une nuit de recherches, les pompiers s’offrent un moment de répit. Autour du marchand de dholl-puri, les langues claquent à cause du piment, on parle la bouche pleine. L’entrepôt, apprend-on, menace de s’effondrer, qu’il devra être rasé.

Des indices en ce qui concerne Dinesh ? «Pour vous donner une idée, la température dans un four crématoire oscille entre 700 et 1000 °C. Celle à l’intérieur de l’entrepôt devait atteindre 1 500°C», confie un soldat du feu qui fait le va-et-vient depuis dimanche dernier. «Si vous y passez une heure, il se peut que l’on retrouve des morceaux d’os. Mais si c’est plus, ils deviennent friables et là, il ne restera plus que des cendres», poursuit-il en appuyant sur son poignet pour illustrer ses dires.

Infimes précautions

Raison pour laquelle le déblayage de l’entrepôt s’avère être une entreprise délicate, renchérit le surintendant Puddoo, géant en vert, responsable des équipes de la SMF. «Nous prenons d’infimes précautions, nous ne voulons pas rater quoi que ce soit ou détruire des indices.» L’avancée est périlleuse, elle se fait pas à pas. «Éna dilo ziska molé andan…»

Qu’importe les difficultés, les pieds endoloris, qui «sont en train de cuire» dans les bottes, pas question de baisser les bras. «Nous ne partirons pas avant d’avoir terminé le travail, de l’avoir retrouvé

Un officier du «Forensic Science Laboratory»
fouillant les poubelles à la recherche d’indices.

Le surintendant en est persuadé, Dinesh est à l’intérieur. «Je le sens, c’est mon intuition qui me le dit…» Les images des caméras de surveillance lui donnent raison. Selon le collègue du jeune homme, qui est la dernière personne à l’avoir vu en vie, Dinesh est retourné dans l’entrepôt pour récupérer des clés.

Du côté de l’hypermarché, les habitudes, le quotidien, reprennent peu à peu leurs droits. Les commerces, à terre, tentent de se relever. Des employés du foodcourt, assis en cercle dans l’herbe, attendent l’autorisation pour entrer. «Bann patron inn dir nou al tir bann zafer ki gaté ek zété.» Les visages sont inquiets, les voix sobres. Difficile d’imaginer comment réagiront les clients, alors que la période des fêtes approche. Les doutes taraudent les pères et mères de famille, les zénes. «Pa koné si pou kapav réouver biento ek kan

La famille de Dinesh, elle, n’imagine pas passer Noël sans lui. Pas encore. Depuis dimanche, ils sont là jour et nuit, attendant une bonne nouvelle, une nouvelle tout court. Les deux sœurs du jeune homme s’accrochent à ce fil invisible qu’est l’espoir. Parfois, la raison prend le dessus, elles s’imaginent le pire.

Armés de leurs chariots, les soldats s’apprêtent à aller ramasser les débris

Difficile, dans ces moments-là, de faire taire les souvenirs. Il y a dix ans, leur mère succombait à une longue maladie. C’est Dinesh, le cadet de la fratrie, qui s’occupe de Sanjana, la plus petite des trois. Elle n’avait que cinq ans à l’époque. Mais l’adversité n’a eu aucun effet sur la détermination de cet habitant de Palma. Il complète sa scolarité et juste après, prend de l’emploi à Shoprite. Au sein de la famille, il est connu comme étant un battant.

A-t-il vraiment perdu son combat contre les flammes?

<h2><strong>Normes sanitaires bafouées</strong></h2>

<p>L&rsquo;opération déblayage s&rsquo;accélère. À hier, plusieurs tonnes de débris avaient été enlevées de l&rsquo;entrepôt. Toutefois, selon des responsables sur place, les normes sanitaires ne seraient pas respectées. Quelques employés de Shoprite ont eu accès au site vendredi et ont commencé à &laquo;nettoyer&raquo; le magasin sans avoir obtenu les autorisations nécessaires au préalable.</p>

<p>Personne ne sait qui a permis aux employés de procéder à cet exercice, qui s&rsquo;est fait sans la présence d&rsquo;inspecteurs sanitaires. Un préposé au ministère de la Santé affirme que les responsables devront rendre des comptes, l&rsquo;accès au site étant toujours restreint. Seuls les pompiers, les soldats et les policiers devraient avoir le droit d&rsquo;y pénétrer.</p>

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<h2><strong>L&rsquo;avis de l&rsquo;expert</strong></h2>

<p>Comment réagit le corps humain en cas d&rsquo;incendie ? Le Dr Satish Boolell, médecin légiste, se réfère à un autre cas. En 1999, dans le sillage des émeutes survenues après le décès du chanteur Kaya en prison, l&rsquo;entrepôt de Courts, sis à Coromandel, avait brûlé et le site condamné car le bâtiment pouvait s&rsquo;effondrer à tout moment. Des mois plus tard, un policier a découvert un corps à l&rsquo;intérieur. <em>&laquo;Il avait, certes, la &lsquo;forme&rsquo; d&rsquo;une personne mais la victime avait été réduite en cendres.&raquo;</em> Il a fallu faire très attention pour que celles-ci ne se mélangent pas à la poussière de bois calciné. <em>&laquo;À une certaine température, le corps se désagrège. Il y a des &lsquo;bouts d&rsquo;os&rsquo; qui brûlent moins vite que d&rsquo;autres, qu&rsquo;il serait éventuellement possible de retrouver.&raquo;</em></p>

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