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Boko Haram: le Cameroun accusé d'avoir expulsé 100.000 réfugiés nigérians (HRW)

28 septembre 2017, 01:24

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Boko Haram: le Cameroun accusé d'avoir expulsé 100.000 réfugiés nigérians (HRW)

Le Cameroun a expulsé près de 100.000 réfugiés nigérians fuyant les violences du groupe jihadiste Boko Haram, victimes d'actes de torture et d'agressions sexuelles de la part de l'armée camerounaise, selon un rapport accablant de Human Rights Watch (HRW) publié mercredi.

«Quasiment 100.000 Nigérians ont été renvoyés de force dans leur pays depuis janvier 2015», dénonce l'ONG de défense des droits de l'homme dans un rapport de 60 pages intitulé «Forcés à monter dans des camions comme des animaux».

«Les retours forcés opérés par le Cameroun violent le principe de non-refoulement, qui interdit le renvoi de réfugiés et de demandeurs d'asile vers des lieux où ils peuvent être persécutés», ajoute HRW.

Le nord-est du Nigeria, épicentre de l'insurrection jihadiste de Boko Haram, souffre d'une grave crise humanitaire après des années de conflit, qui a fait plus de 20.000 morts et 2,6 millions de déplacés.

Combats entre armée nigériane et insurgés, embuscades et attentats-suicides restent quotidiens dans cette région désertique du lac Tchad aux confins du Cameroun, du Tchad et du Niger.

En avril et mai, 13.000 réfugiés ont quitté Minawao, le seul camp officiel au Cameroun pour rejoindre Banki dans le nord-est du Nigeria. L'AFP a visité en juin cette localité où les humanitaires étaient dépassés par l'afflux de victimes du conflit.

Human Rights Watch accuse aussi l'armée camerounaise d'avoir «torturé, agressé et exploité sexuellement des demandeurs d'asile nigérians dans des régions frontalières reculées» et de les avoir empêché d'entrer en contact avec le Haut-commissariat de l'ONU pour les réfugiés (HCR).

Le HCR avait demandé l'an dernier aux pays voisins de ne renvoyer personne dans le nord-est du Nigeria «jusqu'à ce que la situation (...) se soit considérablement améliorée».

«La torture et les mauvais traitements infligés par l'armée camerounaise aux réfugiés et demandeurs d'asile nigérians semblent être motivés par une décision arbitraire visant à les punir pour les attaques menées par Boko Haram au Cameroun», a déclaré Gerry Simpson, chercheur à HRW. 

Le groupe mène également des attaques sanglantes dans l'extrême-nord du Cameroun, et les autorités de Yaoundé ont souvent accusé les jihadistes ou leurs complices d'infiltrer les flux de réfugiés nigérians.

D'autres réfugiés ont raconté à HRW que des enfants, «affaiblis après des mois ou des années passés dans les zones frontalières sans nourriture ni soins médicaux suffisants, étaient morts pendant ou immédiatement après le renvoi forcé» ou «séparés de leurs parents».

Environ 100.000 réfugiés nigérians ont été «officiellement répertoriés» sur le territoire camerounais mais des dizaines de milliers de personnes n'ont pu être enregistrées par le HCR et se trouvent sans protection, selon HRW.

«Ce rapport ne repose sur rien», a réagi le porte-parole du gouvernement camerounais, Issa Tchiroma Bakary, y apportant «un démenti formel et catégorique».

«Je voudrais rappeler à Human Rigths Watch deux choses: premièrement, nous avons aujourd'hui près de 500.000 réfugiés dans notre pays (...) Deuxièmement, le Cameroun n'a pas vocation à être une nation qui est disposée à accueillir les réfugiés du monde entier», a-t-il dit.

«Les allégations de torture et notamment d'agression sexuelle (imputées aux militaires camerounais) constituent un mensonge éhonté», a ajouté le porte-parole camerounais. Les soldats «reçoivent avant de s'engager sur le théâtre des opérations un enseignement moral» et «savent que quiconque est pris en flagrant de délit de violation (des principes édictés) est puni».

«Aussi longtemps qu'on n'aura pas pris pas un soldat en flagrant délit d'agression sexuelle, tout ça relèvera des fantasmes de Human Rights Watch», a-t-il conclu.