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Un gardien de prison: «La tentation est présente tous les jours»

26 août 2017, 22:25

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Un gardien de prison: «La tentation est présente tous les jours»

Les gardiens de prison sont sous les feux des projecteurs depuis le début de l’année avec les travaux de la commission drogue. Ils sont une quinzaine à avoir été questionnés par le président Paul Lam Shang Leen. L’un d’eux a accepté de témoigner à «l’express», à condition que son identité soit préservée.

Pensez-vous que l’acharnement envers les gardiens de prison soit justifié ?
Je suis entièrement d’accord avec les travaux de la commission drogue. N’empêche que je suis d’avis qu’elle peut enquêter davantage sur les gardiens sur lesquels pèsent des soupçons avant de les convoquer.

Est-ce difficile de résister aux offres des trafiquants de drogue au sein de la prison, surtout en cas de difficulté financière ?
La tentation est présente tous les jours dans notre métier. Mais c’est à nous de résister parce que nous portons notre uniforme avec honneur, fierté et respect. Il existe plusieurs associations auxquelles nous contribuons chaque mois et qui nous permettent de contracter des emprunts en cas de difficulté financière. Ceux qui succombent sont des faibles et ne méritent aucunement de porter cet uniforme. Être à court d’argent n’est pas une excuse pour succomber aux offres des trafiquants de drogue.

Les gardiens de prison sont-ils des victimes ou des complices ?
Il y a en effet beaucoup de victimes. Mais je le répète : il y a ceux qui sont faibles et qui se laissent rapidement embobiner. Il y en a d’autres qui le font (NdlR, le trafic de drogue) par vice. Je tiens toutefois à préciser que, dans les deux cas, ils ne sont pas nombreux. La majorité des gardiens de prison sont honnêtes.

Si les gardiens ne sont pas fautifs, qui sont ceux qui facilitent l’entrée des portables ou de la drogue en prison ? Comment peuvent-ils les utiliser sans être repérés ?
Les prisonniers, surtout les trafiquants de drogue, sont très rusés. Ils usent de tous les moyens pour arriver à leurs fins. Mais en tant que gardien de prison, je dirai que nous sommes plus intelligents et que nous avons beaucoup plus de ressources pour les forcer à se soumettre aux règlements de la prison.

Vous dites que les gardiens sont plus intelligents. Mais pourtant téléphones, seringues, Lannate sont encore saisis en prison. Comment expliquezvous cela ?
C’est vrai que les détenus ont plus de temps pour étudier notre façon de travailler. Dans ce cas, nous n’avons pas les ressources pour déjouer leurs plans. En même temps, les saisies démontrent aussi qu’on arrive à avoir plus d’informations à leur sujet qu’ils ne le croient. Nous sommes déterminés à éradiquer ce fléau qu’est la drogue. Je suis convaincu que nous allons y arriver.

C’est quoi le modus operandi pour le trafic de drogue en prison ?
Sincèrement, je ne saurai vous dire, car les méthodes sont extrêmement variées. Il n’y a pas un mode opératoire en particulier. Comme dit le dicton, la prison est une université où l’on apprend beaucoup de choses.

Faut-il une formation plus avancée pour les jeunes recrues de la prison ?
Oui, je trouve qu’il faut une formation plus dure et plus moderne pour tous les gardiens de prison. Pas uniquement les jeunes recrues. Je parle surtout d’une formation continue qui sera utile pour certains. Cela permettra à ces derniers de se souvenir de leur serment.

Un de vos collègues a confirmé les propos du caïd Peroomal Veeren selon lesquels les hauts gradés ne sont pas fouillés. Ce sont de graves allégations. Surtout que c’est le contraire de ce qu’avance Vinod Appadoo.
Cela dépend bien évidemment de quelle prison il s’agit. Mais s’il a dit ces choses-là devant la commission drogue et après avoir prêté serment, cela doit être vrai. C’est aux membres de la commission de mener leur enquête pour confirmer ses dires. Ils peuvent, à titre d’exemple, visionner les images des caméras CCTV.

N’est-ce pas, au final, une aubaine pour les trafiquants de drogue qu’il existe un différend entre le commissaire des prisons et les gardiens ?
Malheureusement, le commissaire des prisons pense qu’il travaille toujours au sein de la police. Il réduit les membres de notre effectif ou les bank hours (NdlR heures supplémentaires) pour économiser l’argent de l’État. Selon Vinod Appadoo, cela va apporter des profits à la prison. Il faut cependant qu’il réalise que la prison est une institution à but non lucratif. Malheureusement, ce sont les gardiens de prison qui souffrent le plus avec ces changements. Vinod Appadoo n’est pas apte à nous guider.