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Aquaculture: «Growfish fait en sorte qu’il n’y ait aucune chance pour elle d’être responsable d’une attaque de requin»

24 juillet 2017, 20:00

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Aquaculture: «Growfish fait en sorte qu’il n’y ait aucune chance pour elle d’être responsable d’une attaque de requin»

Les passions se déchaînent sur Facebook concernant l’aquaculture à Maurice. Les contestataires, à l’instar du Kolektif Non a Elvaz Poisson Dan la Mer, de la Platform Moris Lanvironman, de surfeurs, de plaisanciers, d’habitants et de pêcheurs estiment que les fermes aquacoles risquent d’accroître la présence de requins dans le lagon. Ils s’élèvent entre autres contre la compagnie Growfish, responsable d’un tel projet à Bambous. Du coup, Jacques Smith et Rowan Moss, respectivement Chief Executive Officer et Chief Marketing Officer de Growfish, ont sollicité l’express par le biais du Board of Investment pour «rétablir les faits». 

Pourquoi avez-vous souhaité nous rencontrer ?
Nous travaillons sur un projet aquacole avec le Board of Investment (BoI) depuis 2012. Ces dernières semaines, nous assistons à un flot de commentaires sur Facebook. Nous comprenons les appréhensions de ces personnes surtout concernant les requins. Mais il est important que l’on rétablisse les faits.

«Les internautes font l’amalgame avec les attaques à La Réunion. Or, les facteurs divergent dans les deux pays.»

Quels sont ces faits ?
Il faut bien faire la démarcation. Il y a, d’un côté, des études scientifiques et de l’autre, de l’émotion pure. Nous-mêmes, nous n’aurions pas aimé nous rendre dans une destination où nos enfants risquent d’être attaqués par des requins. Nous sommes également conscients que l’industrie touristique mauricienne emploie 45 000 personnes et pèse Rs 50 milliards. Sauf qu’en associant constamment Maurice aux requins, alors que ce n’est pas le cas, des internautes sont en train de causer encore plus de préjudice au pays. Pis, ils font l’amalgame avec les attaques à La Réunion. Or, les facteurs divergent dans les deux pays.

Les contestataires s’appuient sur des témoignages de pêcheurs et de plongeurs qui connaissent les alentours des fermes aquacoles existantes…
Nous avons fait nos recherches. En tant que compagnie professionnelle et responsable, il est évident que nous faisons en sorte qu’il n’y ait aucune chance pour nous d’être responsables d’une quelconque attaque de requin.

Ce pêcheur de Grand-Gaube atteste d’une présence accrue de requins depuis que des cages aquacoles ont été installées il y a deux ans.

Comment comptez-vous y parvenir ?
Selon la Shark Attack Database, qui est une base de données mondiale des attaques de requins, il y a eu cinq cas à Maurice, dont une à Rodrigues, durant les 87 dernières années. Au cours des 18 dernières années, il n’y en a eu aucune. Les deux dernières attaques remontent à janvier et à avril 1999, à Grand-Baie et à Tamarin. Elles n’ont ni été provoquées ni été fatales. 

Depuis la création de la ferme aquacole de Mahébourg dix ans de cela, il n’y a eu ni attaque ni hausse du nombre de requins. Nous avons demandé au ministère un chiffre sur le nombre de requins présents autour de Maurice. Personne ne le sait. Growfish est prête à faire ce recensement en effectuant un marquage, par exemple.

Des filets ont pourtant été endommagés par des prédateurs là-bas. Votre ferme sera aussi un gros garde-manger pour les requins…
Comme pour toute chose, la technologie change. La qualité des filets évolue. Notre matériel sera sharkproof. Nous aurons deux filets, un en interne et l’autre en externe pour protéger les poissons de nos élevages.

«Un papier scientifique de 2012 dit qu’à La Réunion, ni l’aquaculture ni les réserves marines ne contribuent à une hausse de la présence de requins dans le lagon»

Vous vous armez donc contre la présence de requins. Growfish peut-elle garantir qu’elle ne sera responsable d’aucune attaque de requins sur son site ou ses alentours ?
Nous ne pouvons garantir cela. Maurice est une île entourée d’eau et les requins vivent dans l’océan. Une attaque peut survenir à n’importe quel moment.

Que répondez-vous à l’autre argument, qui est qu’à La Réunion, la ferme aquacole de St-Paul a fermé ses portes en 2012 après des attaques de requins ?
Un papier scientifique daté de la même année dit qu’à La Réunion, ni l’aquaculture ni les réserves marines ne contribuent à une hausse de la présence de requins dans le lagon. Le fait est le même à travers le monde. Les requins s’approchent des côtes pour se nourrir car l’océan est de plus en plus pillé de ses poissons.

«Notre technologie comprend un système de récupération de déchets»

Les fermes aquacoles sont aussi des pollueurs avec le déversement de déchets, comme des poissons morts et des produits chimiques dans les fonds marins.
Il est de notre devoir de préserver l’océan, sinon c’est notre business qui tombe à l’eau. Notre technologie comprend un système de récupération de déchets qui sont ensuite pompés vers une barge. Notre barge aura deux fonctions. La première est de récupérer les déchets et les transporter sur la terre ferme, où on peut en faire du fertilisant. La seconde est de nourrir et de récolter les poissons.

Êtes-vous à votre première expérience de l’aquaculture dans le monde ?
Oui. Et Growfish n’est pas une compagnie sud-africaine. Elle est mauricienne et a été enregistrée le 24 septembre 2015. La première phase de notre projet verra des investissements directs étrangers de Rs 2,9 milliards (80 millions de dollars). À long terme, ce chiffre devrait atteindre Rs 5,3 milliards à Rs 6,3 milliards et créer quelque 500 emplois. 

Les 8 000 tonnes de cobias que nous produirons par an sont destinés au marché de l’exportation. Vers Boston, aux États-Unis, précisément. Des marchés africains, qui sont de gros importateurs de poisson, nous ont aussi déjà approchés.

«Nous avons consulté la communauté de pêcheurs enregistrés de Bambous»

Qui est votre partenaire local ?
Nous n’avons pas de partenaire local. Nous avons un directeur mauricien.

À un moment, le directeur mauricien était Fadil Farouk Hossen. Puis son nom a disparu des données du Registrar of Companies sur Growfish. Que s’est-il passé ?
Monsieur Hossen a indiqué qu’il comptait probablement se retirer comme directeur. Mais ce changement n’a pas encore eu lieu.

À «l’express», Fadil Farouk Hossen a dit que Growfish lui avait trouvé un remplaçant…
(Le Chief Marketing Officer acquiesce d’un signe de la tête) Monsieur Hossen est actuellement à l’étranger. Nous sommes en contact avec lui. Nous lui avons parlé pas plus tard que mercredi et il va fort probablement continuer avec nous. Mais je vous suggère de le contacter pour avoir ses commentaires là-dessus.

Une cage d’aquaculture à Grand-Gaube.

Combien d’argent avez-vous déjà investi ?
Nous avons uniquement pris en charge les frais du consultant pour la demande du permis d’EIA. Une fois celle-ci obtenue et la trade licence émise, l’investissement direct étranger suivra. Nous sommes confiants d’obtenir le permis EIA car nous avons suivi toutes les procédures requises. Y compris consulter la communauté de pêcheurs enregistrés de Bambous. Et nous sommes prêts à expliquer aux contestataires que notre business est très différent par rapport à ce qui existe déjà ici.

Différent comment ?
Notre partenaire AKVA de la Norvège est le plus gros fabricant dans le monde des technologies destinées à l’aquaculture. Il a plus de 45 000 filets d’aquaculture dans l’océan. Nous parlons là d’installations de pointe, avec des caméras sous-marines et infrarouges pour vérifier précisément ce qui se passe dans nos fermes, d’une technologie pour maintenir la qualité de l’eau et pour transmettre des informations en temps réel. 
Notre ferme sera entièrement informatisée, y compris pour nourrir les poissons. Nous travaillons en partenariat avec des experts de l’université de Miami qui est le leader dans le monde en matière de cobia. Ces personnes vont nous rejoindre pour un Build Operate Transfer Process jusqu’à ce que la ferme tourne à plein régime et que le transfert de savoir-faire soit effectué.

«Notre projet, c’est l’aquaculture du futur, qui a nécessité 10 000 heures de recherche. Notre référence est Open Blue au Panama.»

Comment pouvez-vous être sûr que le cobia que vous produirez ne sera pas infecté, comme cela a déjà été le cas dans le passé sur un site aquacole existant, comme confié par un ex-employé ? (NdlR, un plongeur en a fait état dans une vidéo circulant sur Facebook).
Selon le promoteur de cette ferme particulière, cette infection était liée à des problèmes de grading du poisson. C’était il y a dix ans. Notre projet, c’est l’aquaculture du futur, qui a nécessité 10 000 heures de recherche. Notre référence est Open Blue au Panama. L’eau, le poisson, la technologie sont similaires. Nous n’avons aucune raison de croire que le cobia sera un échec.

Pourquoi avez-vous opté pour l’ouest du pays pour votre projet ?
Nous avons considéré Oman et le Vietnam dans un premier temps. Mais nous avons fini par choisir Maurice en raison de la qualité de l’eau hors lagon. Vingt-et-un sites d’aquaculture ont été identifiés par le gouvernement. Nous avons ensuite fait notre demande pour Bambous et Le Morne qui sont des sites hors du lagon. La demande de l’EIA s’applique uniquement pour les deux sites à Bambous. (Le CEO nous montre où cela est spécifié dans le document EIA qui se trouve son ordinateur portable).

«Nous avons décidé de transposer le site du Morne à Bambous.»

La demande de l’EIA pour Le Morne suivra par la suite ?
Jamais. Nous avons eu une réunion avec des représentants de l’Association des hôteliers et restaurateurs de l’île Maurice (AHRIM) en début de semaine. Nous comprenons certaines de leurs inquiétudes et nous avons décidé de transposer le site du Morne à Bambous.

Pourquoi ?
La principale raison est que ces deux sites sont à 20 kilomètres l’un de l’autre. Pour nous, consolider notre business en regroupant les deux sites à Bambous est la chose la plus sensée et évidente à faire. Sur Facebook, nombre de gens ont exprimé leur inquiétude par rapport au Morne. Je le reprécise. Nous n’aurons pas de ferme aquacole au Morne.

Est-ce la réunion avec l’AHRIM qui vous a fait changer d’avis ?
Non. Cette décision a été prise six mois de cela, en consultation avec le BoI et le ministère de la Pêche et de l’économie océanographique. Le Morne figure aujourd’hui dans le top 10 des destinations mondiales de kitesurf. Nous ne voulons pas créer un impact massif sur ces gens. Nous sommes une entreprise responsable. Nous sommes satisfaits d’être hors lagon à Bambous.