Publicité

Cancer: elles ne sont pas seules…

25 juin 2017, 23:37

Par

Partager cet article

Facebook X WhatsApp

Cancer: elles ne sont pas seules…

Il règne une ambiance douce dans les conteneurs réaménagés en salle de consultations et de soins, posés sur la petite pelouse de l’arrière-cour de Link to Life à Vacoas. Cela tient à la voix feutrée de l’esthéticienne indienne Prithi Lakhabhay, originaire de Mumbai, qui converse avec une bénéficiaire, tout en lui massant expertement les mains et les bras avec de la crème hydratante. Dans un autre coin de la pièce, sa jeune et timide assistante, Aurélie Lamoureux, baigne les mains et les bras d’une autre bénéficiaire avant de passer au massage.

Juste à côté, une autre Indienne, originaire du Pendjab, Mala Malik, a pris une longueur d’avance sur elles et applique avec précision du vernis sur les ongles d’une bénéficiaire de 27 ans. «Je n’ai pas l’habitude de porter un rouge aussi vif», avoue, en anglais, la jeune femme à Mala Malik. Cette dernière réplique que ce rouge lui va pourtant bien et qu’elle devrait adopter cette couleur. L’Indienne renoue là avec l’esthétique qu’elle a mise en sourdine depuis qu’elle a quitté l’Inde. «Cela me rappelle d’heureux souvenirs», confie-t-elle à sa compatriote Sejal Desai, assise à ses côtés.

Les bénéficiaires, qui veulent rester anonymes – cela montre bien à quel point le cancer est encore tabou à Maurice -, sortent de la session détendues et souriantes. L’une d’elles, une quinquagénaire, tirée à quatre épingles, qui a terminé sa chimiothérapie depuis quatre ans, est satisfaite. «On est chouchoutée et cela fait un bien fou. Ça rend heureuse», dit-elle.

Josiane, 57 ans, qui a subi une mastectomie (ablation du sein) depuis plus d’une dizaine d’années, fréquente Link To Life depuis sept ans. Elle y vient régulièrement pour obtenir des prothèses mammaires. Si elle a apprécié le massage, c’est la manucure qu’elle a préférée et surtout la pose du vernis à ongles faite de façon professionnelle. «Je n’ai plus besoin de me cacher les mains comme je le fais parfois. Là, kapav grat figir, fer alerte !», dit-elle en riant.

La jeune femme de 27 ans, qui est rentrée d’Australie en début d’année, est encore en traitement. La première fois qu’elle est venue à Link to Life, c’était en février pour obtenir une perruque car sa chevelure avait commencé à faire les frais de la chimiothérapie. Mais c’est la première fois qu’elle prend avantage des soins de beauté. «On m’a appelée hier pour me demander si j’étais intéressée. Je ne travaille pas pour le moment et le simple fait de sortir de la maison, ça fait du bien.» C’était aussi sa première manucure. «C’est super de se faire dorloter un peu, de rencontrer d’autres personnes, de sentir qu’elles vous soutiennent de n’importe quelle façon que ce soit. C’était ma première fois mais ce ne sera certainement pas la dernière», affirme-t-elle.

Les bénéficiaires ont ensuite été invitées à prendre un thé et à déguster de succulents petits fours salés et sucrés, préparés bénévolement par la pâtissière mauricienne Zaynah Nuthay. Cette dernière est la propriétaire de la pâtisserie Magic Chef, à Quatre-Bornes. Si elle s’est retrouvée embrigadée avec les femmes de l’IIWA, c’est parce qu’elle est une amie de Prithi Lakhabhay. Quand cette dernière lui a passé une commande de petits fours, la pâtissière mauricienne a voulu savoir à qui ils étaient destinés et, lorsqu’elle l’a su, elle a décidé de ne pas les facturer. «On ne peut pas penser toujours business, fric et tout le tralala. Cela n’a pas de sens. There must be a better purpose in life

Il n’y a pas que les bénéficiaires qui en soient sorties contentes. Les esthéticiennes aussi. «Les femmes aiment s’entraider. Et lorsque vous voyez le sourire de ces femmes à l’issue de la manucure, vous avez gagné votre journée et vous n’avez pas besoin d’argent», déclare Prithi Lackabhay. «Et puis, ce faisant, je suis non seulement en train de partager mes connaissances, mais aussi rendre un peu de ce que j’ai reçu de Maurice depuis les 22 ans que je suis installée ici», ajoute-t-elle.

Ce partenariat entre l’IIWA, qui s’appelait jusqu’à son rebranding en novembre dernier l’Indian Women Association, et Link to Life est récent. La première rencontre entre P. Shilpa Gujadhur, fondatrice et secrétaire de l’association indienne et Selvina Moonesawmy, coordonnatrice de Link to Life, remonte à mai. Cette dernière et son équipe effectuaient une campagne de sensibilisation lors d’un Cancer Summit du Rotary, à Ebène. Mme P. Shilpa Gujadhur a été impressionnée par leur professionnalisme. Cela tombait bien pour cette association, fondée il y a 26 ans, regroupant une centaine d’Indiennes vivant à Maurice, par mariage et d’autres raisons, et dont les objectifs sont notamment de consolider les échanges entre femmes des deux pays et d’organiser des levées de fonds pour soutenir des activités charitables. D’autant plus que cette année, l’IIWA a décidé de venir en aide aux femmes et aux enfants en détresse. Cette association a donc décidé, après avoir obtenu l’approbation de son conseil d’administration, de contracter un partenariat avec Link To Life.

Accord qui a pris la forme d’un dépistage contre le cancer du sein par le médecin référent de Link to Life, Dr Selvina Uppiah, auprès de 60 résidentes du Gayasing Ashram, à Port-Louis. Toutes ont subi une échographie mammaire et deux résidentes ont été référées à l’hôpital pour des examens plus approfondis. Cette séance de dépistage a été suivie d’un déjeuner offert par l’IIWA. Leur deuxième action commune, qui s’étalera dans la durée, est cette demi-journée de soins esthétiques, prévue tous les deux mois.