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Michel Vieillesse: «Un travail stable, un combat perpétuel pour les prisonniers»

7 juin 2017, 01:00

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Michel Vieillesse: «Un travail stable, un combat perpétuel pour les prisonniers»

Kinouété connaît des contraintes financières depuis la suspension, en juin 2016, des «guidelines» de la Corporate Social Responsibility. Le directeur de l’ONG, lui, parle de la nécessité de la réhabilitation des ex-détenus.

Quelle est l’activité de Kinouété ?

L’ONG travaille à la réhabilitation des détenus et à la réintégration d’ex-détenus. Nous voulons réduire le récidivisme et avoir un impact positif sur le budget de la prison. Nous sommes convaincus que la réhabilitation coûte moins cher que l’incarcération. Les indicateurs que nous avons mis en place depuis quatre ans démontrent que le taux de récidive chez les ex-détenus que nous avons accompagnés n’a pas dépassé 10 %. La moyenne nationale est de 68 % selon Statistics Mauritius. Faute de ressources, nous ne touchons que 10 à 15 % de la population carcérale.

Pourquoi Kinouété envisage-t-elle de cesser ses activités ?

Cela découle d’une décision budgétaire de juin 2016 qui a affecté le financement de tous les ONG. La situation est de plus en plus critique. Le gouvernement nous a demandé de patienter en attendant le financement par la National Corporate Social Responsibility Foundation. Après 16 ans d’existence, les semaines qui suivent seront capitales pour l’association.

Que pensez-vous du fait qu’avec la complicité de gardiens, des trafiquants de drogue continuent leurs activités en prison ?

La corruption doit être dénoncée sous toutes ses formes. Surtout quand ceux qui sont censés défendre la loi sont concernés. À Kinouété, nous avons le devoir de ne jamais accepter de cadeau d’un détenu.

Ne trouvez-vous pas injuste que l’argent du contribuable est utilisé pour les prisonniers qui ne font rien durant leur emprisonnement ?

Raison de plus pour mettre en avant la réhabilitation. Plus sérieusement, la prison dispense déjà des cours de formation académique et professionnelle et beaucoup de détenus sont engagés dans des travaux rémunérés leur permettant aussi de profiter d’une remise de peine.

Le bon traitement des prisonniers n’est-il pas une incitation à la récidive ?

Le prisonnier est avant tout un être humain et, en tant que tel, doit être traité avec dignité. La privation de la liberté est déjà une sanction des plus sévères pour un être humain. À l’intérieur de la prison, beaucoup de criminels redeviennent de simples êtres humains.

Il y a quelques années, un rapport indiquait que le taux de récidive est de 85 %, n’est-ce pas un constat d’échec de la réhabilitation ?

Jusqu’en 2012, il est vrai que plus de huit détenus sur dix récidivaient. Le Mauritius Prison Service a mis en place un plan stratégique couvrant 2013-2023, ciblant la réhabilitation des dé- tenus, qui a permis de réduire ce taux à 68 % selon les derniers chiffres officiels. La réhabilitation ne peut être dissociée de la réintégration. Dans ce contexte, trouver un travail stable demeure un combat perpétuel pour les ex-détenus.

Pourquoi ?

Le Certificate of Character a été détourné de sa fonction pour devenir l’unique passeport permettant de trouver du travail. Comme disent les ex-détenus : «Nou inn pey nou santans, mé nou touzour kondané.»

Quelles sont les barrières à la réinsertion des anciens détenus ?

La stigmatisation venant de la famille et de la société est une barrière à la réinsertion d’un exdétenu. Les statistiques démontrent que 50% des détenus sont incarcérés pour six mois ou moins mais l’impact sur leur vie dure longtemps.

 

Bio Express

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<p>Détenteur d&rsquo;une licence en gestion hôtelière et tourisme, Michel Vieillesse a fait une carrière dans l&rsquo;hôtellerie. Mais après l&rsquo;obtention d&rsquo;une bourse d&rsquo;études menant à un MBA en commerce international et développement durable avec spécialisation en entrepreneuriat social, il s&rsquo;est retrouvé au siège d&rsquo;UN-Habitat à Nairobi. Convaincu que l&rsquo;homme doit être au centre du développement économique, il a rejoint Kinouété.</p>