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Dans un centre «à la dure»: des toxicomanes battus et ligotés

20 mai 2017, 20:00

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Dans un centre «à la dure»: des toxicomanes battus et ligotés

Ce centre a un fonctionnement on ne peut plus spécial. Et son gérant en est bien conscient, voire fier. «Lorsque les familles emmènent leurs proches, elles sont mises au courant des conditions. À elles d’accepter ou pas», explique le jeune de 36 ans, à la barre de ce centre de désintoxication situé à Flacq. Quelles sont-elles justement, ces conditions ?

D’abord, le patient doit rester sur place pendant 41 jours, durée du traitement. S’il s’échappe, vole ou fait des siennes, il est battu. «Il faut y aller à la dure. Sans ces méthodes, ils ne vont jamais se réformer», soutient le gérant.

Ils sont aussi prévenus qu’ils seront surveillés à leur sortie. S’ils sont surpris à acheter de la drogue, dealer et client seront traités à la manière de l’Eastern Rehabilitation Society. Comprenez par là qu’ils seront battus…

Le centre, géré par cet entrepreneur et importateur de plastique de la région, a ouvert ses portes depuis un mois. Et il compte déjà une trentaine de résidents. Tandis que les démarches pour les permis sont en cours.

Pourquoi avoir créé ce centre ? Le gérant explique que l’idée lui est venue suivant le décès de son oncle toxicomane. «Je me suis dit qu’il faut faire quelque chose pour les jeunes de l’endroit.»

Puisant dans ses finances, le jeune entrepreneur loue l’étage d’une maison et fait appel à un ancien toxicomane qui a réussi à se défaire de l’enfer de la drogue. Lui, est parti suivre des cours au Pakistan sur la réhabilitation.

Qu’en est-il du traitement lui-même ? Le gérant explique qu’il s’en remet aux médecins pour les médicaments. Ses patients sont auscultés et des substituts à la drogue sont prescrits. Mais le dosage est personnalisé au centre. «On ne va pas les maintenir éternellement sous médication. On fait un sevrage.»

Ainsi, au premier jour, les toxicomanes ont leur dose normale : la moitié le deuxième jour et le tiers au troisième. Puis plus rien.

Lorsque les toxicomanes sont en manque, ils sont attachés jusqu’à ce qu’ils se calment. «Nul besoin de drogue ou de substitut. Après une crise, ils vont nettement mieux», affirme le responsable du centre. Cette cure est gratuite. La famille ne paie que… pour les cigarettes des patients.

Pour le gérant, «sa» méthode marche. Il soutient que depuis que son centre est ouvert, plusieurs jeunes ne sont déjà plus accros. Dès qu’ils vont mieux, il les emploie dans son entrepôt. «Les plonger directement dans le monde du travail les  aide» insiste le responsable. Toutefois, le centre assure malgré tout un suivi une fois qu’ils sont «guéris». «Je fais cela pour aider la société. Je finance tout par moi-même, il n’y a pas d’aides extérieures», soutient le gérant.

«Zot inn bat li kout tiyo PVC»

<p>Nawaz, 32 ans, fait partie de ceux qui ont subi les traitements du centre de désintoxication de Flacq. C&rsquo;est sa mère qui l&rsquo;y a amené. Après quelques jours, le jeune âgé de 32 ans s&rsquo;est échappé. Il a été ramené de force, comme le stipulent les conditions d&rsquo;entrée.</p>

<p>Mardi dernier, ne supportant pas ses crises, il a volé un cachet dans le sac du responsable du centre. Mais il s&rsquo;est fait prendre. <em>&laquo;Zot inn bat li kout tiyo</em> <em>PVC et kout difil kouran&raquo;, </em>déplore sa mère<em>. </em>Lorsque cette dernière a essayé de lui rendre visite, l&rsquo;accès lui a été refusé. Elle raconte qu&rsquo;elle le voyait par la fenêtre, en train de faire de grands gestes, mais elle était impuissante.</p>

<p>Nawaz raconte qu&rsquo;on l&rsquo;a laissé avec ses blessures toute une nuit. Ce n&rsquo;est que mercredi matin qu&rsquo;il a été transporté au dispensaire de Bel-Air, puis à nouveau au centre. &laquo;<em>Monn ré al</em> <em>get</em> <em>li. Fodé linn sové linn sorti pou monn</em> <em>kav amenn li lopital</em>&raquo;, raconte la mère. Depuis que son fils a été hospitalisé, elle ne quitte pas son chevet.</p>

<p>Que pense le gérant de cet incident? Les proches étaient au courant des conditions d&rsquo;admission, soutient ce dernier. <em>&laquo;Depuis le début, il avait</em> <em>l&rsquo;air de ne pas vouloir s&rsquo;en sortir. C&rsquo;est</em> <em>pour cela qu&rsquo;on a préféré le laisser partir&raquo;</em>, ajoute-t-il.</p>