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Raouf Dusmohamud et ses fils: Ils carburent au super
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Raouf Dusmohamud et ses fils: Ils carburent au super
Raouf Dusmohamud a de quoi bomber le torse. Ce garagiste a travaillé d’arrache-pied pendant 27 ans avant de devenir importateur de voitures malaisiennes des marques Proton et Perodua, et d’arriver à réunir ses trois fils au sein de son entreprise.
Dans trois mois, Raouf Dusmohamud aura 75 ans. Il tient une belle forme, bien qu’il ait longtemps exercé un métier fatiguant. «Je ne vais pas m’arrêter de sitôt», affirme celui qui est toujours Managing Director de la compagnie portant son nom et qui a trouvé le moyen d’enrôler ses trois fils comme directeurs exécutifs.
Il faut dire qu’ils sont complémentaires. La gestion, que son aîné Raid a étudiée en Australie, n’a aucun secret pour ce dernier alors que Ziyaad est comme son père, un crack en mécanique, pour l’avoir lui étudié pendant trois ans. Ally, le benjamin, comptable qualifié en Grande-Bretagne, est la tête pensante de la compagnie.
C’est dans le Ward IV à Port-Louis, plus précisément à la rue Ternay, que le sexagénaire est né et a grandi. Le père de Raouf est planton chez l’assureur Dupont-Tennant et sa mère femme au foyer. Cette dernière a cependant fort à faire avec six enfants. Tous, hormis Raouf, font des études supérieures. «L’école ne m’intéressait que peu», avoue-t-il. Lui se pique de mécanique. Adam, son oncle maternel, est garagiste et possède un petit garage non loin de leur domicile. Raouf profite des vacances scolaires pour aller le voir travailler. Il peut y passer des heures. Si bien que lorsqu’il termine sa Standard VI et refuse de poursuivre sa scolarité, son oncle lui propose de venir travailler comme apprenti mécanicien. Une aubaine pour lui.
Cela ne le dérange pas du tout de plonger la main dans le cambouis et voir ce qu’une voiture cache sous sa carrosserie. Il passe quatre ans aux côtés de son oncle. Ce qui lui permet de maîtriser la mécanique automobile. Voulant tout connaître, il quitte son oncle pour aller travailler dans un établissement plus grand, le garage Moheedin. Il y reste trois ans. Années formatrices par excellence car il apprend comment réparer les camions, les autobus et même les pelleteuses.
Risques calculés
Son oncle, qui connaît entre-temps des difficultés, l’appelle à la rescousse. Raouf lui prête main-forte pendant 12 mois avant de se décider à se mettre à son compte et à ouvrir un petit garage dans la cour familiale. C’est ainsi que démarre son business qu’il nomme Garage Raouf. «Le bâtiment tient encore debout et l’enseigne est encore là aussi, même si le garage est fermé. Ce fut le berceau de tout», dit-il.
Ses débuts n’ont pas été difficiles car il avait les connaissances nécessaires. «J’aimais l’automobile. Quand j’y repense, je ne travaillais pas pour de l’argent mais pour ma satisfaction personnelle. Je réparais les véhicules en y mettant tout mon coeur.» De plus, avoue-t-il, sa banque, la Mauritius Commercial Bank, lui fait confiance, de sorte qu’il est en mesure d’ouvrir en parallèle un commerce de pièces de rechange pour voitures à la rue Brabant. On est alors en 1978. Les voitures japonaises ont la cote. «Cela a fait décoller le business. La banque m’a beaucoup aidé. Jusqu’à présent, je dépends d’elle. Je n’ai jamais voulu changer de banque malgré les sollicitations. Quand une institution ou une personne vous aide, il ne faut jamais l’oublier.»
Les affaires marchent bien mais Raouf Dusmohamud a une idée qui lui trotte dans la tête depuis quelques années : il veut devenir importateur de voitures. Mais cet homme prudent préfère prendre des risques calculés. Il veut offrir l’inexistant sur le marché et à prix concurrentiel. Il prospecte donc et attend son heure qui arrive en 1990. Il achète un terrain à Pailles qui surplombe l’autoroute et y construit son showroom et y transfert son garage. Il est d’ailleurs le premier concessionnaire de voitures à s’être installé à cet endroit stratégique, visible des automobilistes qui fréquentent l’autoroute M1.
Il négocie ensuite avec Proton, le fabricant malaisien de voitures sous licence japonaise de Mitsubishi. «Le deal entre le gouvernement malaisien et le fabricant japonais était que la technologie soit au départ 100 % japonaise jusqu’à ce que l’expertise, le know-how soient transmis aux Malaisiens.» Et comme à l’époque, Maurice bénéficie toujours de tarifs douaniers préférentiels, Raouf Dusmohamed réussit à offrir aux Mauriciens des voitures neuves de la marque Proton à Rs 275 000 sur route.
Le succès est aussitôt au rendez-vous. Si le marché des ventes automobiles à cette époque est de 4000 l’an, à lui seul, il en vend entre 150 à 200 l’an, captant ainsi près de 12 % des parts du marché. «Les clients du garage qui avaient besoin de voitures neuves m’ont fait confiance et ont acheté des Proton.»
La situation se corse un peu en l’an 2000 avec la fin des préférences douanières, obligeant Raouf Dusmohamud à changer de stratégie. Aux larges voitures Proton dont les prix prennent graduellement l’ascenseur, il négocie avec un autre fabricant malaysien, Perodua, qui réalise de petites voitures, notamment la Kancil de 660 chevaux, qui revient à Rs 150 000 sur route. «Là encore, il s’agissait de voitures de technologie 100 % japonaise fabriquées sous licence de Daihatsu qui a été racheté l’an dernier par Toyota.»
Aujourd’hui, avec le coût de la vie qui a pris l’ascenseur et les taxes en vigueur, les Proton se vendent à près de Rs 650 000 sur route et les Perodua à Rs 465 000 sur route. La compétition étant féroce entre concessionnaires, Raouf Dusmohamud et ses fils ont misé sur la qualité du service et sur les accessoires. «Notre plus est d’offrir une voiture au même prix mais avec plus d’options au niveau des accessoires.»
L’importation des voitures remises en état en l’an 2000 leur a assurément porté préjudice, même s’il est impossible aux importateurs de vérifier à 100 % l’état de telles voitures. Ses trois fils étant rentrés au pays après leurs études supérieures, ils ont mis en commun leurs idées et se sont également lancés dans l’importation de voitures remises à neuf à partir du Japon mais en petites quantités. Pour cette nouvelle ligne lancée en septembre 2016, ils ont créé la compagnie Mahwa Motors. Ils vendent mensuellement cinq à six voitures remises en état. «Nous voulons rester prudents sur ce marché», confie le patriarche.
Nouveaux modèles
Sous l’impulsion d’Ally, son benjamin, Raouf Dusmohamud importe de nouveaux modèles de Perodua dont la Bezza, Saloon Car de cinq places ayant un coffre à la capacité de stockage de 500 litres, qui a été officiellement lancée hier. Ce nouveau modèle coûtera Rs 585 000 sur route. Il suit le monospace de sept places, toujours de la marque Perodua, introduit en début d’année et vendu à Rs 750 000 sur route. Sans compter les petites citadines Axia de 1000 centimètres cubes à Rs 465 000 sur route. «Nous misons sur des ventes de 250 voitures par an», explique Ally Dusmohamud.
D’ici la fin de l’année, les Dusmohamud reprendront les affaires avec Proton qui a essuyé quelques difficultés récemment. «Mon projet est de consolider tout ce business et d’assurer l’avenir de mes fils et de mes quatre petits-enfants», ajoute non sans fierté.
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