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Sa vie part en fumée à cause d’un pouliah de gandia

2 avril 2017, 18:00

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Sa vie part en fumée à cause d’un pouliah de gandia

Sa maison ressemble à celles que l’on verrait dans les séries communément appelées «6 h 30» chez nous. Sorte de «manoir rapiécé», où plusieurs familles vivent côte à côte. Derrière les murs, une vie chamboulée. Celle d’Ajit (prénom modifié), qui tient à garder l’anonymat. A cause de sa femme, de son bébé de sept mois. «Je voulais témoigner à visage découvert, afin de dénoncer certaines choses. Mais mon épouse m’en a dissuadé.» C’est que les proches et les voisins ont été tenus à l’écart de ce secret pesant. Peu de gens ont eu vent de sa descente aux enfers.

Pourtant, il y a deux ans, Ajit exhibait fièrement ses «superbes légumes» dans les pages des journaux, celles où l’on parle de choses gaies, de success stories. Tout cela est désormais bien loin. Car depuis, le père de famille a été arrêté. Il avait un pouliah de gandia dans la poche. Un seul ? Rien d’autre ? Un coup de fil à la police confirme ses dires. Il n’a d’ailleurs jamais été appréhendé pour quelque autre délit.

«Mo pa pou koz manti, oui mo ti fimé. Mo pa vandé. Sa zour-la, ban missyé-la dir mwa donn enn lavi (NdlR, dénoncer un revendeur). Mé mo pann oulé. Zonn ramass mwa.» Il est passé en cour, a payé sa caution ainsi qu’une amende de Rs 2 000. L’histoire aurait pu s’arrêter là. S’il n’avait pas tout perdu à cause de tout cela.

Ajit était employé comme laboureur au sein d’une municipalité. «Kan inn aret mwa, dé-trwa zour apré, monn pass lor board. Banla inn met mwa deor.» Depuis, il continue à planter quelques légumes, «ranz latant parsi parla ek enn fami». Mais ce qu’il gagne n’est guère suffisant pour rembourser le prêt qu’il a contracté auprès de la banque. «Péna saler fix. Bann lézot kamouad planter ti garanti mwa. Zot ki pé bizin paye loan pou mwa ek zot ti kass. Mwa mo dossié fini sal.»

N’avait-il pas pensé à tout ça avant de se balader avec du gandia dans la poche ? Qu’on soit pour ou contre, le cannabis n’est pas légal à Maurice… «Mo koné, mé mo pa ti pé fer narien dé mal, mo ti pé ziss fimé. Ena gro gro palto pé fer trafik héroïne, syntétik partou. Zot pa gagn nanyé zot. Eski sa li meyer ?»

Derrière, les chiens aboient, les voisins passent, disent bonjour. De la maison d’Ajit, s’échappent quelques notes de reggae. L’homme se détend, se frotte la barbe. «Mo fam ki pé bizin travay pou tir rasion ek asté kouss tibaba.»

La colère, la haine dans les propos cèdent la place à un air attendri. «Enn sans éna mo tipti.» Le sentiment d’injustice, lui, demeure. Il aurait tellement voulu gâter son bébé, lui offrir des cadeaux, comme le font les autres papas. «Mé pa pé kapav fer tousala akoz enn pouliah.»

Sinon, ses légumes contenaient-ils du fumier à base de cannabis ? «Non», conclut-il avec un sourire en coin.

 

Ce qu’en dit la police

<p>Récemment, un policier a été arrêté parce qu&rsquo;il cultivait du cannabis chez lui. En tant que <em>&laquo;fonctionnaire&raquo;</em>, son képi sera-t-il éjecté de sa tête, tout comme Ajit ? <em>&laquo;Toute personne est innocente jusqu&rsquo;à preuve du contraire&raquo;</em>, souligne l&rsquo;inspecteur Shiva Coothen. Tant que le suspect ne sera pas passé aux aveux ou que la cour ne l&rsquo;aura pas jugé coupable, poursuit-il. En attendant, le policier en question sera suspendu. Mais il continuera à toucher son salaire de base. Même si l&rsquo;affaire traîne pendant des années ? <em>&laquo;Oui.&raquo;</em></p>

<p>Par ailleurs, souligne notre interlocuteur, il y a eu des cas par le passé où les policiers ont continué à travailler en attendant que leur affaire passe en cour. Ou qu&rsquo;ils soient réintégrés après avoir été innocentés. Bien entendu, s&rsquo;ils sont jugés coupables, ils sont démis de leurs fonctions.</p>