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Gurudutt Moher, père du quadricolore

12 mars 2017, 19:17

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Gurudutt Moher, père du quadricolore

Demandez autour de vous qui est Gurudutt Moher… Le nom de ce nonagénaire n’est pas très familier des Mauriciens. Pourtant, c’est lui qui, à la veille de l’Indépendance de Maurice en 1968, a donné corps à notre drapeau haut en couleur. Quarante-neuf ans plus tard, alors que l’on se souvient davantage de Jean-Georges Prosper, parolier de notre Motherland, nous avons voulu braquer pleins feux sur le créateur de notre «rouge-bleu-jaune-vert» national.

À 93 ans, cet habitant de Beau-Bassin, ancien enseignant du cycle primaire, ne s’exprime désormais que très peu. Il ne nous dira donc pas avec ses propres mots la fierté inégalée de voir sa création s’élever dignement dans le ciel portlouisien, ce 12 mars 1968, à midi pile.

C’est sa fille, Arti Nursimulu, qui se fait le porte-parole de Gurudutt, tandis qu’assis dans un fauteuil, le patriote fatigué a le regard perdu. Écrasé par le poids de l’âge, il semble avoir du mal à comprendre la présence d’étrangers dans la petite maison accueillante qu’il partage avec Shrimati, qu’il a épousée en 1958. Les rides de son visage témoignent du parcours de cet homme autrefois très  affable.

Pour autant, le crépitement de la caméra ne semble pas le déranger. Pas plus que les flashs. Il prend la pose. Tantôt seul, tantôt avec son épouse à ses côtés. Il joue le jeu, en toute simplicité.

Sentiment du devoir accompli

Nous nous installons à ses côtés, prêts à envoyer les premières questions. Il se tourne vers nous en nous dévisageant. Nous lançons la question qui nous brûle les lèvres. «Comment vous est venue l’idée du quadricolore ? Pourquoi ces quatre couleurs ?» Il nous fixe. Un regard sérieux. Comprend-il ce qu’on essaie de lui dire ? «Pour quel journal travaillez-vous ?» demande-t-il à plusieurs reprises.

Le ton ferme malgré l’âge avancé peut être attribué aux années passées dans le secteur de l’éducation. Né à Queen-Victoria, ayant perdu sa mère à quatre ans, Gurudutt Moher a grandi à Port-Louis. L’aîné d’une fratrie de 11 enfants marche dans les pas de son père en devenant enseignant. Il travaillera dans plusieurs écoles : celles de Mont-Roches, Plaisance, Triolet… énumère sa fille. Il gravit les échelons, devient maître d’école à Villiers-René et Young Men’s School. En 1977, il devient inspecteur des écoles et sept ans plus tard, part à la retraite avec le sentiment du devoir accompli.

Mais l’oisiveté ne lui plaît pas. Il veut rester actif. «Mon père est un bosseur.» En effet, Gurudutt Moher contribue à plusieurs publications. Ensuite, un petit emplacement à la rue Edith-Cavell l’aide à garder la forme. Loterie, cigarettes, journaux… c’est ce qui meuble son quotidien jusqu’à l’âge de 93 ans. Aujourd’hui, sa santé ne lui permet pas de poursuivre cette activité. «Il est un peu faible.» On apprend qu’une aide-soignante s’occupe de lui et de son épouse jusqu’à l’arrivée de la benjamine, Arti, qui vit dans une maison mitoyenne.

Gurudutt Moher s’accroche à sa famille, à ses petits-enfants. «Il aime bien les enfants. Il a tout le temps travaillé avec les petits.» Justement, comment était Gurudutt le prof ? «Mon père n’a jamais donné de leçons particulières. Et plus tard, quand il était inspecteur, il aimait bien faire des visites surprises dans les classes.»

Et Gurudutt le père ? Casanier, il aimait bien la chaleur de son foyer. Prenant le temps de faire le récit son enfance à ses deux filles et, plus tard, à ses trois petits-enfants. Son péché mignon ? Du lait et des petits biscuits. Amateur de jardinage, il aime cultiver des fleurs. Roses, pensées, marguerites, pâquerettes, œillets… L’homme aime le parfum enivrant des fleurs, certes, mais aussi leurs couleurs qui envahissent son jardin à chaque saison. Rouge, bleu, jaune, et vert… Et si elle était là, l’explication ?