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Chaos au Parlement sud-africain pour le discours à la nation du président Zuma

10 février 2017, 08:25

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Chaos au Parlement sud-africain pour le discours à la nation du président Zuma

 

Le discours à la Nation du président sud-africain, sous pression d’appels de l’opposition à démissionner, a donné lieu jeudi à une bagarre générale suite à l’expulsion violente de députés qui tentaient d’empêcher Jacob Zuma de s’exprimer.

Une trentaine d’agents de sécurité ont été envoyés pour faire sortir de force les députés d’opposition du parti de gauche radicale des Combattants pour la liberté économique (EFF) et ont échangé des coups avec les élus.

Pendant plus d’une heure, ces derniers, vêtus de leurs traditionnelles combinaisons rouges de mineurs et de femme de ménage, avaient interrompu le président Zuma, estimant qu’il n’était pas légitime pour s’exprimer car il a violé la Constitution.

«En face de nous est assis un homme incorrigible, pourri jusqu’à la moelle», a lancé le leader des EFF, Julius Malema, désignant Jacob Zuma. «Vous êtes un délinquant constitutionnel», a renchéri Mbuyiseni Ndlozi, un autre député EFF.

En mars, la justice avait en effet reconnu le chef de l’État coupable de violation de la Constitution pour avoir fait payer par le Trésor public des travaux de modernisation de sa résidence privée du KwaZulu-Natal (est). Il en a depuis remboursé une petite partie, soit un demi-million d’euros.

Après cette bagarre, les députés du principal parti d’opposition, l’Alliance Démocratique (DA), ont décidé de quitter le Parlement, en guise de protestation.

Après les incidents, la présidente de l’Assemblée, Baleka Mbete a signalé que des gaz lacrymogène avaient été utilisés pendant les échauffourées et promis qu’une enquête serait ouverte prochainement à ce sujet.

Avec plus d’une heure de retard, le président Zuma a pu commencer son discours devant les parlementaires des deux Chambres.

«Enfin», s’est-il exclamé en riant, à son arrivée au pupitre.

Pendant qu’il démarrait son discours, la police dispersait à coups de grenades assourdissantes des militants de l’EFF et du Congrès national africain (ANC) de M. Zuma, pour éviter des affrontements dans les rues du Cap.

Haute sécurité

Dans un discours sans relief de plus d’une heure, le président a abordé de nombreuses thématiques, y compris celles de la réforme agraire et de la diversité raciale, deux sujets sensibles en Afrique du Sud.

«Ce sera difficile, si ce n’est impossible, d’atteindre une vraie réconciliation tant que la question du partage des terres ne sera pas résolue», a-t-il dit.

Le chef de l’État a précisé que seuls 9,8% des terres cultivables du pays appartenaient à des Noirs, plus de 20 ans après la fin de l’apartheid.

«Après vingt-deux ans de démocratie, la majorité des Noirs n’ont toujours aucun pouvoir économique (...) et ne sont pas satisfaits», a-t-il constaté.

C’est la troisième année consécutive que le discours à la Nation de M. Zuma est perturbé par des députés EFF.

En 2015, ils avaient déjà été expulsés par les agents de sécurité aidés par des policiers, tandis que l’an dernier ils avaient quitté d’eux mêmes l’assemblée en chantant des slogans hostiles au chef de l’État.

Cette année, le discours de Jacob Zuma s’est tenu sous haute sécurité avec le déploiement de 441 soldats en renfort des forces de police pour «maintenir l’ordre et la loi» aux abords du Parlement.

Selon Daniel Silke, analyste indépendant interrogé par l’AFP, ce déploiement sécuritaire montre «la nervosité avec laquelle l’ANC arrive à cet événement».

L’année 2016 a été difficile pour Jacob Zuma puisqu’après avoir été reconnu coupable de violation de la Constitution, il a été considéré comme le principal responsable de la défaite électorale en août de son parti, mis en minorité dans quatre des six plus grandes villes du pays.

En octobre, la publication d’un rapport officiel mettant en lumière ses relations troubles avec une richissime famille d’affaires d’origine indienne, les Gupta, l’a un peu plus affaibli.

L’état de l’économie sud-africaine, au ralenti depuis plusieurs années, ne joue pas non plus en faveur du chef de l’État qui a néanmoins assuré jeudi que le pays entrait dans une phase de «reprise économique», prédisant une croissance de 1,3% en 2017, contre 0,5% l’an dernier.

Jacob Zuma doit rester chef de l’État jusqu’en 2019, mais il quittera son poste de président de l’ANC à la fin de l’année, ouvrant ainsi une guerre de succession.

A moins que la réouverture de près de 800 charges de corruption dans une vieille affaire de contrat d’armement, une autre épée de Damoclès au-dessus de sa tête, ne vienne écourter son mandat.