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[Vidéo] Cité La-Cure: «À chaque fois qu’il pleut, c’est la même histoire»

8 février 2017, 09:45

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[Vidéo] Cité La-Cure: «À chaque fois qu’il pleut, c’est la même histoire»

Pluies, accumulations d’eau, maisons inondées... Un cercle vicieux qui ne se produit pas qu’en temps cyclonique. À chaque grosse pluie, c’est la même tourmente pour ceux qui habitent des régions à risque.

Cité La-Cure

En apparence, la tempête tropicale Carlos n’a pas fait trop de dégâts durant le week-end. En apparence seulement. À cité La-Cure, plusieurs dizaines de personnes ont subi de lourdes pertes à la suite des inondations. Elles se sont rendues au poste de police d’Abercrombie, hier, dans l’espoir d’obtenir une allocation.

Mais il n’y a pas qu’en temps cyclonique qu’elles se retrouvent dans cette situation. C’est la même tourmente à chaque averse.

Quincy Jean-Louis, 25 ans, vit dans une maison en tôle avec sa sœur et leurs six enfants depuis 2005. À chaque caprice du temps, l’eau s’infiltre dans leur demeure. Elles ont parfois été obligées de fuir.

Au plus fort de la tempête, un pan de leur toit s’est envolé. Résultat : l’eau a envahi les lieux. «Noun bizin met tou bann zanfan dan enn sel lasam. Dépi lapli inn koumansé, zot pé dormi lor sez», confie Quincy Jean-Louis. «Ma sœur et moi sommes femmes de ménage. Ce que nous gagnons dans la journée, nous le dépensons le soir dans la cuisine. La pa koné kuma nou pou fer. Liv zenfan tou inn alé», soupire la jeune femme. Elle compte sur l’allocation que le gouvernement remettra aux sinistrés pour pouvoir acheter des vivres.

«À chaque fois qu’il pleut, c’est la même histoire», grogne Pascal Collet. Cela fait 30 ans qu’il habite à l’arrière de l’école primaire Marcel Cabon, près de laquelle règne en ce moment une odeur pestilentielle. «À chaque fois, les bouches d’égout sont obstruées et les eaux usées débordent. Le niveau monte jusqu’à notre maison.»

Depuis dimanche, l’eau s’est s’infiltrée chez lui et lorsque Carlos a commencé à s’intensifier, il a été contraint de quitter les lieux, avec sa mère handicapée, pour se réfugier chez sa sœur. Mais chez cette dernière, la situation n’est guère mieux. Ses matelas ont été détruits par les eaux. «Pa kapav sak fwa éna lapli mem zafer isi.» Sa voisine indique qu’à chaque inondation, les autorités viennent, construisent un bout de drain et disparaissent.

Weendy Amais n’a pas plus de chance. Une partie de sa maison a été emportée par les vents. Là où se tenait sa cuisine, il n’y a plus rien. Enfin, il ne reste que le réfrigérateur. Sa salle de bains aussi n’a pas été épargnée. Le peu d’objets qu’elle a pu sauver sont entassés dans une pièce.

 

Pourquoi les inondations perdurent dans certaines régions ?

Période cyclonique ou pas, ce sont toujours les mêmes régions qui sont affectées par les inondations. Canal-Dayot, cité La-Cure, Pailles, Péreybère... Pourquoi ces localités sont-elles plus à risque que d’autres ?

Vasant Jogoo, expert en développement durable, indique que cela tient à la topographie. Il explique que chaque région dispose d’une évacuation d’eau naturelle. Mais il arrive que les gens construisent sans prendre cela en considération. Ces passages, dit-il, sont souvent imperceptibles par temps sec et sont ainsi bétonnés.

«L’eau doit toujours trouver un chemin pour passer. Si son passage est obstrué, elle cherchera un autre chemin et souvent, c’est à travers ces mêmes constructions qui bloquent le passage», déclare l’expert. L’absence de drains et de canaux d’évacuation n’arrange pas les choses.

Par ailleurs, les zones où les pompiers sont fréquemment appelés ne sont pas les seuls endroits inondables. Vasant Jogoo souligne que d’autres localités, notamment dans l’Est, connaissent le même phénomène. Toutefois, ces régions n’étant pas bétonnées, il n’y a pas de problème.

La mécanisation de l’industrie cannière est un autre facteur qui accentue les inondations. «Les terres de culture, qui sont vallonnées, sont de plus en plus aplaties pour permettre aux machines de fonctionner correctement. Mais le problème est que les canaux d’évacuation des eaux de pluie sont aussi nivelés. Au fur et à mesure des aplatissements, les endroits aux alentours des champs de canne connaissent de plus en plus d’inondations», fait valoir Vasant Jogoo.

Puits d’absorption

 L’année dernière, Fond-du-Sac a été la proie d’inondations spectaculaires. Cette fois, les pluies de Carlos n’ont pas affecté le village. Plusieurs régions du Nord, qui d’habitude connaissent des accumulations d’eau, ont été épargnées. Selon un responsable de travaux au conseil de district de Pamplemousses, le nettoyage et la création des drains appropriés ont aidé à résoudre les problèmes. Il explique que selon la gravité de la situation, des puits d’absorption et des chanelling drains sont nécessaires.

Des puits d’absorption d’une profondeur de deux à cinq mètres sont creusés dans les zones pluvieuses. Cette structure, comme son nom l’indique, absorbe l’eau et la retient dans le sol. Par temps de grosses pluies, cela peut prendre quelques jours avant que toute l’eau ne soit absorbée. «Ces puits ne sont pas une solution contre les inondations. Par contre, pour une évacuation rapide, il faut des drains qui transportent l’eau et les débris ailleurs», dit notre interlocuteur.

Ces chanelling drains d’une profondeur de deux mètres vont vers des stations d’épuration ou dans les rivières. Dépendant des régions, la profondeur peut varier, souligne Vasant Jogoo qui insiste qu’il faut avant tout connaître le problème d’une région avant d’envisager des travaux.

À Canal-Dayot, des centaines de poules se noient

À cité La-Cure, des habitants ont tout perdu après les averses de ces derniers jours. 

 

«J’ai construit des barrages qui n’ont servi à rien…» Ramesh Chuttoo, aussi connu comme Pek- pek, un habitant de Canal-Dayot, dit avoir perdu quelque 300 poules durant le passage de Carlos. Elles se sont noyées lorsqu’un drain, récemment construit à côté de la maison de l’éleveur, sur la berge de la rivière St-Louis, a débordé.

Ramesh Chuttoo, 53 ans, qui s’est lancé dans l’élevage de poules et de chèvres il y a sept ans, ne sait plus que faire. Il ne s’attendait pas à des pertes aussi conséquentes – il les estime à plus de Rs 70 000. Il comptait sur la vente de ces animaux pour faire bouillir sa marmite.

Le quinquagénaire raconte que l’eau a commencé à envahir sa cour, lundi, vers 22 heures. «Quand je suis sorti, j’ai vu que le couvercle du drain avait cédé avec la pression de l’eau. Celle-ci a gagné mon enclos», déplore-t-il. «115 poules flottaient dans l’eau boueuse, mortes. Les autres ont été emportées par le courant. J’ai aussi perdu dix paquets de nourriture.»

Quant à ses chèvres, il a pu les mettre en lieu sûr. «Beaucoup se débattaient dans l’eau. Mais j’ai pu les ramener.» Des employés de la firme qui a construit le drain étaient sur place, hier, pour un constat et un nettoyage. La société s’est tournée vers ses assureurs.

Pekpek, qui dit avoir perdu environ 300 poules, estime les pertes à plus de Rs 70 000.

 

Intervention des pompiers

 

 
Sur cette carte figurent les endroits affectés par les pluies cycloniques et où les pompiers sont intervenus dans la journée de mardi 7 février.