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Témoignage: Anita, otage de ses fils toxicomanes

28 janvier 2017, 21:00

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Témoignage: Anita, otage de ses fils toxicomanes

 

À quelques rues du centre-ville de Port-Louis, Anita* s’active dans la petite tabagie qu’elle a aménagée dans une pièce de sa maison. Il est à peine 9 heures, mais les yeux de cette mère sont rougis, à force d’avoir versé des larmes. Elle est «au bout du rouleau». Depuis quelque temps, elle est devenue le souffre-douleur de ses deux fils. Ces derniers dépendent financièrement d’elle pour leur «kas yen» quotidien. Les programmes de désintoxication ? Elle avoue y avoir songé, mais les deux hommes ne veulent rien entendre. Alors, Anita a décidé de sortir du silence.

Tandis que la plupart des jeunes de leur quartier se préparent pour le travail, Antish* et Arvin* sont encore au lit. Ces jeunes de 22 et 17 ans respectivement n’ont pas les moyens de se payer leur dose quotidienne de drogue de synthèse. Qu’importe, leur mère est là pour ça… Sa maigre pension et les recettes de la tabagie y passent.

Anita, veuve de 50 ans, subit leurs insultes et leurs coups répétés. Une fois, elle s’est même retrouvée à l’hôpital pour quelques jours. Ses proches, dit-elle, ne prennent plus part à son malheur, mo bann fami ti pé koz ek mwa avan : «Kan ti pé dir zot mo zanfan pa koumsa, ki zot pé met tas lor mo zanfan. Zamé mo ti pé aksepté ki dimounn dir kitsoz lor mo dé garson. Mé get ki pé arivé zordi.»

Elle raconte qu’il y a quelques mois, son aîné a ramené une jeune femme à la maison. Âgée de 17 ans, cette dernière est aussi dépendante à la drogue. «Mazinn ou kouma mo latet fatigé. Mo pa kapav kit mo lakaz alé. Kot mo pou alé ? Zot pou fer tamtam dan mo lakaz.» C’est après le décès de son époux, à la suite d’une longue maladie, qu’elle apprend que son aîné est toxicomane. «Linn koumans vinn rod kas ek mwa, koumans absan travay, ziska banla met li déor. Li rant tar, ek sak fwa, so lizié kolé», raconte la quinquagénaire. Un jour, ne pouvant supporter son attitude, elle tente de le rappeler à l’ordre. Ce dernier s’énerve et sort un couteau pour l’agresser. Elle est vite secourue par Arvin, son second fils. «Lerla mem ki mo gran garson dir mwa ki li dan yen li, gété ki mo kapav fer.»

Ce jour-là, Anita ne se doutait pas qu’Arvin prendrait le même chemin que son frère quelques mois plus tard. «Mo ti pansé li pou trouv kuma so frer fer, ek li pou diféran, mé manti.»

Aujourd’hui, la veuve est consciente qu’il lui faudra tout mettre en œuvre pour «sauver» ses fils. Elle sait aussi que la tâche sera ardue, les jeunes hommes n’ayant aucune volonté de se «libérer».

*Prénoms modifiés