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Ally Lazer: «Ils transforment l’héroïne en cacao et le cannabis en bred sousou»

21 janvier 2017, 17:01

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Ally Lazer: «Ils transforment l’héroïne en cacao et le cannabis en bred sousou»

Depuis 40 ans, il est omniprésent, n’hésitant pas à communiquer les noms de trafiquants lorsqu’il le faut. Le travailleur social, Ally Lazer a promis de le refaire bientôt. Son prochain meeting de dénonciation, annoncé mercredi sur Facebook, semble compromis, mais ce n’est pas pour autant qu’il a l’intention de se taire.

Vous avez annoncé une série de meetings pour dénoncer les trafiquants de drogue. Où en sont les préparatifs ?

Nulle part puisque les autorités ont répondu le même jour où la demande a été faite. La permission n’a pas été accordée sous le Public Gathering Act. C’est la première fois en 40 ans d’activisme que cela m’arrive.

Généralement, ils reçoivent la demande et donnent l’autorisation à la dernière minute. De cette manière, les organisateurs ne peuvent pas trop préparer et communiquer à l’avance. Mais là, nous avons été convoqués au poste de police de Plaine-Verte le jour même de la demande à 18 heures.

Le responsable du poste de police était déjà parti, donc nous ne savons pas pourquoi cette interdiction a été émise alors que tout le monde fait des meetings. Nous sommes dans une situation où les trafiquants peuvent opérer sans aucun problème alors que pour nous, il y a une volonté de «met baton dan larou».

Pourquoi dites-vous cela ?

J’ai déjà annoncé que j’irai de l’avant avec une liste de noms de trafiquants. J’apporterai des preuves sur la manière dont ces marchands de la mort ont pris nos institutions politiques et judiciaires en otage.

Des preuves ? D’où viennent vos preuves ?

Cela fait 40 ans que je mène une lutte incessante contre la drogue. Il y a des hauts gradés de toutes les institutions qui viennent me parler pour me donner des informations. Mes preuves que les trafiquants de drogue bénéficient de protections occultes viennent de là. Mais ne croyez pas que ces preuves ne sortiront pas. Il y a d’autres moyens de procéder. Vous devez bien vous douter que ce n’est pas la première fois qu’on essaie de me faire taire.

Racontez-nous ça…

Prenons l’exemple de 1998. J’avais pris plus d’un an pour compiler un dossier sur le trafic à Maurice. J’avais les noms des gros trafiquants, leurs passeurs, leurs distributeurs, leurs connexions politiques et ceux de la police qui les aidaient. Je les avais soumis au commissaire de l’époque. Ce dernier ne s’est intéressé qu’à la partie qui évoque les policiers que je dénonçais. En voyant les noms que j’ai cités et leurs ramifications, il m’a dit que je faisais fausse route et par la suite, j’ai été convoqué aux Casernes tous les lundis.

On m’a même arrêté une fois à l’aéroport pour que je dévoile mes sources. Il a fallu l’intervention de trois députés sur le même vol pour qu’on me laisse partir car l’avion prenait du retard.

Par la suite, trois policiers que j’ai dénoncés ont été arrêtés. Parmi eux figurait Guito L’Évêque. Depuis dimanche dernier, je suis sous surveillance. L’oppression a été presque constante pendant les 40 dernières années.

Donc vous avez des preuves actuelles sur la connexion entre les marchands de drogue et les autorités ?

Écoutez, il n’y a rien de nouveau à cela. Le rapport de sir Maurice Rault l’a clairement dit. Le Select Commit- tee présidé par Jérôme Boulle va dans ce sens aussi. Le nom d’Amba Chinien vous dit quelque chose ? Et Amsterdam Boys ? Ou plus récemment Cindy Legallant. Qui lui avait octroyé la permission de transiter par le salon VIP de l’aéroport pour éviter les fouilles ? Et Sada Curpen, qui arrive toujours à être blanchi ? Je vais parler de tout cela lors de ce meeting.

Et les avocats dans tout cela ?

Un avocat est un officier de justice. Malheureusement, à Maurice, les avocats se déclinent en trois catégories. Vous avez ceux qui ne prennent aucune affaire liée à la drogue. Puis, vous avez ceux qui disent que c’est leur métier. La troisième catégorie est la plus dangereuse car ce sont des avocats complices de ce trafic. Ce sont eux qui transforment l’héroïne en cacao et le cannabis en bred sousou.

Vous qui menez un combat de longue haleine, que pensez-vous de la commission Lam Shang Leen ?

J’ai été le seul à avoir déposé une liste de 136 noms. Je prévois d’y aller encore une fois. Mais malgré toute l’admiration et tout le respect que j’ai pour l’ancien juge, je ne pense pas que son rapport aura un impact sur le commerce de la drogue. S’il y avait une volonté politique pour lutter contre la drogue, il n’y en aurait plus du tout dans le pays.

Vous voilà bien pessimiste ! Avec raison. Vous savez ce que le rapport de Maurice Rault préconisait comme première mesure ?

L’arrestation du chef de l’Anti Drug & Smuggling Unit de l’époque car il avait été prouvé qu’il facilitait le trafic. Au lieu de son arrestation, il est parti avec un «golden handshake». Toutes les autres mesures n’ont jamais été mises en place.

Pourquoi voulez-vous que ce soit différent cette fois ? Le rapport sera remis au Premier ministre qui le remettra au commissaire de police.

Mais comme les policiers sont les mêmes depuis des années, il ne faut pas s’attendre à grand-chose.

Que préconisez-vous donc pour mettre un terme à la drogue à Maurice ?

On ne pourra peut-être pas y mettre un terme, mais on peut facilement le diminuer par beaucoup. Et la solution est simple. Il suffit de renvoyer les étrangers condamnés pour des délits de drogue dans leur pays.

Le nom de James Kanamwanje est remonté à la surface. Ce sont ces étrangers qui se servent de maillons pour l’importation. Il n’est un secret pour personne que pratiquement tous les prisonniers ont un téléphone. Ils passent les commandes pour les gros trafiquants qui sont eux aussi en prison. Après, les agents et distributeurs récupèrent le colis à l’extérieur et font la distribution. Si ces étrangers ne sont plus sur place, ce maillon avec l’extérieur du pays n’existera pas et il sera plus difficile d'en commander.

Mais tout cela, vous ne pourrez pas le dire au plus grand nombre car vous n’avez pas la permission d'organiser le meeting…

Le message passera le 12 février quoi qu’il arrive. Je trouverai le moyen.