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Joyce Veerasamy: le porte-voix

8 janvier 2017, 13:30

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Joyce Veerasamy: le porte-voix

Ardent défenseur des artistes, Joyce Veerasamy est sur tous les fronts. À 57 ans, ce responsable de communication ne veut pas lâcher ses convictions et ses chemises hawaiiennes. Rencontre haute en couleur.

Que reprochez-vous au juste au Festival internasional kreol ?

Plusieurs fois déjà, j’ai attiré l’attention des organisateurs sur le fait qu’un événement d’une telle envergure doit être préparé bien à l’avance. Mais j’ai constaté que ces derniers sont une bande d’amateurs. On ne peut pas préparer ce type de manifestation à la va-vite. Exemple : pour la dernière édition (NdlR, qui s’est tenue du 17 au 26 novembre 2016) on a appelé un jeune artiste à 13 heures en lui demandant de venir sur scène à 22 heures pour le grand concert, qui marque la fin du festival. Pourtant, les moyens financiers étaient là. Le problème, c’est le manque de professionnalisme.

À tel point que vous avez demandé à l’ICAC d’enquêter ?

C’est exact. Je dénonce la façon de faire en ce qui concerne la sélection des artistes pour le grand concert. Le site officiel du festival, fik.mu, précisait que c’étaient ceux dont les œuvres font partie du Top 20 de la playlist des radios, entre janvier et octobre 2016, qui seraient choisis. Mais plusieurs anomalies ont été constatées. Je dénonce également le fait que les organisateurs ont choisi la gagnante du concours PMSD Got Talent pour participer à ce concert. Qui plus est, je ne comprends pas pourquoi certains artistes ont reçu Rs 5000, d’autres Rs 15000 et d’autres encore Rs 25000 pour leur participation à cette soirée. Alors qu’ils ont interprété chacun deux morceaux.

Auriez-vous alerté la commission anticorruption si le PMSD était toujours au gouvernement ?

Bien évidemment. D’ailleurs, j’avais fait connaître mon point de vue bien avant que le PMSD ne fasse ses valises.

Revenons aux cachets reçus par les artistes pour le grand concert. Avez-vous des preuves de ce que vous avancez ?

Bien entendu. Je connais ce dossier par cœur. De plus, ce sont les artistes eux-mêmes qui me l’ont avoué, je les connais tous.

Justement, pourquoi les artistes se tournent-ils vers vous ?

Je suis comme une antenne de relais. Ils viennent me dire tout ce qui se passe.

Vous avez aussi embrassé le combat d’un groupe de rastas, qui demande la légalisation du cannabis. Pourquoi ce choix ?

Je suis contre toute forme de discrimination et je me mets au service de toute bonne cause. J’ai soutenu la cause chagossienne, l’émancipation des femmes, la lutte contre l’apartheid. Pour les rastas, je pense que leur revendication est justifiée. Ce sont des gens qui ne font de mal à personne, ils ne veulent que vivre leur foi comme tout un chacun.

N’empêche que le gandia est illégal à Maurice…

Tout ce qui est légal n’est pas forcément moral. L’apartheid était légal en Afrique du Sud, mais était-ce moral ? De plus, je mène le combat contre la drogue synthétique aux côtés d’Ally Lazer. Ce fléau fait actuellement des ravages et personnellement pour le combattre, j’estime qu’il faut légaliser le cannabis. Je déplore aussi l’hypocrisie qui entoure ce sujet.

Les rastas, au moins, ont le courage de revendiquer la consommation du gandia, qui va de pair avec leurs rites. Par ailleurs, il y a des Mauriciens qui appartiennent à d’autres religions et qui réclament aussi le droit de consommer de l’herbe. Les autorités le savent très bien.

Vous en consommez ?

Quand j’étais jeune oui. Maintenant… je ne dirais pas non si on m’en proposait. (rires)

Revenons-en aux artistes. Qu’est-ce qui vous rapproche d’eux concrètement ?

Certains me respectent beaucoup. J’ai aidé à en faire émerger plusieurs, comme Dario Lassie, Ziakazom, Steph Romeo et Oeson Sanders, entre autres. Il ne se passe pas une journée sans que je ne reçoive l’appel d’une vingtaine d’artistes. Je leur donne des conseils et je partage mon vécu avec eux. Ils me font confiance.

Pourquoi ?

Parce que je suis quelqu’un de vrai et de crédible. C’est ce qui compte dans la vie.

Je me considère comme un dénicheur de talents. Le dernier en date est le jeune humoriste Visham Ramdoo, qui a un brillant avenir.

Étiez-vous un artiste vous-même ?

Je suis un auteur, compositeur et interprète. Dans les années 80 je faisais partie du groupe Fangourin. Il existe toujours. À l’époque, il était composé de frère Laval, de Claude Victoire, Dany Talbot qui est décédé, Reza Soondoorkhan, Sylvio Ramalingum et Serge Lindolent. Nous avons accompagné des artistes comme Odile Chevreau.

Vous écoutez quoi comme musique, sinon ?

Depuis le début de l’année, j’écoute les œuvres d’Alain Ramanisum. Il y a aussi ceux de Lin, Oseon Sanders, Gary Victor, Steevy, Slade Legentil, Gnamic Lion, Pamela Ciceron, The Prophecy, entre autres. De plus, un de mes amis m’a fait cadeau d’un CD comprenant les morceaux de vieux ségatiers comme Francis Salomon, Cyril Labonne, Roger Augustin , Alain Permal, Maria Sega, Jacques Cantin, Roger Clency, France Gemon et Catherine Velliene. Un régal.

La chemise hawaïenne, c’est pour ressembler à Tom Selleck dans «Magnum» ?

J’aime porter des chemises à fleurs. C’est un peu ma marque de fabrique. Je porte ces chemises pour passer inaperçu, c’est le contraire du concept costume-cravate.

Comment vous définissez-vous ?

Je suis quelqu’un qui aime la simplicité. J’aime me réveiller les dimanches, prendre la plume, partager mes réflexions sur la société. Pour moi, les gens doivent prendre le temps de vivre et de se tourner vers Dieu et la prière. C’est la première chose que je fais tous les matins.

Quel message voulez-vous faire passer aux jeunes ?

Qu’ils cultivent le respect et l’art de vivre ensemble. Il ne faut pas oublier qu’ils sont l’avenir de notre pays. J’ai confiance en notre jeunesse.