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Service 170: à la source du problème

8 janvier 2017, 18:30

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Service 170: à la source du problème

«Si le service de la Central Water Authority (CWA) était correct, les abonnés n’auraient pas besoin d’appeler la hotline.» Réplique – aussi sèche que les robinets en été – d’une employée de Call Services Limited (CSL) à Ivan Collendavelloo. Cela, après que le ministre des Services publics a fait une virulente sortie contre les «agents incompétents» du service 170, qui enregistrent les doléances du public concernant la fourniture d’eau. Mais des télé-agents sont bien déterminés à ne pas laisser couler…

Le commentaire d’Ivan Collendavelloo fait suite à sa visite surprise dans les locaux de CSL, centre d’appels et filiale de Mauritius Telecom. Il voulait savoir pourquoi les appels de plusieurs abonnés sont restés sans réponse durant la soirée de la Saint-Sylvestre. Les télé-agents donnent une explication. «Ce soir-là, plusieurs régions étaient affectées. Les appels n’ont pas cessé d’entrer. Ajoutez à cela les relances des abonnés qui avaient déposé plainte les jours précédents et qui rappelaient car rien n’avait été fait entre-temps pour résoudre leurs problèmes. Nous nous sommes retrouvés avec une moyenne de 30 appels en attente pendant toute la soirée», nous explique notre interlocutrice. Résultat, face à ce déluge d’appels, «je n’ai même pas eu le temps de présenter mes vœux à mes collègues !»

La goutte d’eau qui fait déborder le vase ? Certains inspecteurs de l’organisme, mis au courant de la situation, auraient déclaré qu’ils «ne pouvaient rien faire car ils étaient à leur fête de fin d’année familiale», selon une autre employée du centre d’appels.

Comment fonctionne le service 170 ? Lorsqu’un abonné appelle pour une plainte, une entrée est faite et les inspecteurs ont accès à ces fichiers.

Toutefois, les employés estiment qu’il vaut mieux transmettre les informations aux inspecteurs «pour éviter des ennuis», et ce, même si cela ne figure pas sur la liste des tâches des employés de CSL. «Dans de nombreux cas, après avoir déposé une plainte, un abonné va à la CWA pour s’enquérir de la situation et on lui dit qu’il n’y a rien à ce sujet. Ce sont simplement les inspecteurs qui n’ont pas retracé la plainte, alors que nous, nous voyons bien les doléances enregistrées sur nos fichiers», explique une autre interlocutrice, travaillant aussi à CSL. Les inspecteurs sont ensuite prévenus par téléphone ou par SMS, histoire d’assurer correctement le suivi.

Souvent, il arrive que des appels proviennent tous du même quartier. «Dans ce cas, nous demandons aux inspecteurs ce qu’il en est afin de savoir quoi répondre aux abonnés.» Sauf que le 31 décembre, ceux qui réveillonnaient sans la moindre goutte d’eau n’ont pas obtenu d’explication.

Se renvoyer la balle

Plusieurs employés affirment que c’est là une situation récurrente et qu’il leur arrive d’attendre plus d’une journée avant d’avoir un retour de la CWA. Entre-temps, les insultes pleuvent du côté des abonnés, peu enclins à la patience. «Exemple, jeudi dernier, quelqu’un a appelé pour nous signaler une fuite dans sa rue. Il avait appelé deux fois auparavant pour la même raison. À notre niveau, nous ne pouvons rien faire de plus que de prévenir les inspecteurs. Zot bizin fer zot travail !» s’énerve un autre télé-agent. «Sa ki apel inkonpétan», poursuit-il, fustigeant l’organisme.

D’ailleurs, il ne comprend pas pourquoi Ivan Collendavelloo n’a pas remonté les bretelles aux équipes de la CWA au lieu «d’humilier la floor manager de service le jour de sa visite».

À la CWA, pas question de mettre en cause le travail des inspecteurs et autres employés. Du côté de l’organisme, l’on maintient que le problème vient des télé-agents. Une source autorisée concède que «parfois, les travaux peuvent prendre du temps car des autorisations externes, comme celles de la Road Development Authority, sont nécessaires au préalable. De plus, nous nous attaquons aux problèmes par ordre de priorité et en fonction des effectifs que nous avons».

Elle poursuit en affirmant que les doléances des abonnés «ne concernent pas tant les travaux que le manque d’information» de la part de la hotline. «Si les consommateurs savaient où se situe le problème et pourquoi les choses tardent, il n’y aurait pas de problème mais même cette information, ils ne peuvent l’obtenir des agents», conclut-elle.

Les employés de CSL ont aussi remarqué qu’avant la visite d’Ivan Collendavelloo, ils «croulaient sous les appels». La CWA leur avait fait parvenir un communiqué indiquant le faible taux de remplissage des réservoirs et c’est ce qu’ils devaient expliquer aux abonnés. Depuis la fameuse visite, les appels se font nettement plus rares, suscitant des interrogations de la part des téléopérateurs. Les réservoirs se sont-ils remplis ou les inspecteurs sont-ils finalement descendus sur le terrain ?

Et les télés-agents de CSL de s’interroger sur l’augmentation du nombre d’employés de CSL. Il y a six ans, ce service ne comptait que six agents alors qu’aujourd’hui, ils sont une trentaine en permanence derrière leur téléphone. «Est-ce le service de hotline qui va en se dégradant, ou le service de fourniture d’eau ?»

 

Les perles de la hotline

<p>Selon les télé-agents, certaines des explications données par les inspecteurs pourraient faire sourire, s&rsquo;ils n&rsquo;avaient pas des comptes à rendre au public. Un télé-agent se souvient de la fois où toute une région avait été privée d&rsquo;eau car le gardien censé ouvrir la vanne ne s&rsquo;était pas présenté au travail. <em>&laquo;Il n&rsquo;avait pas touché son bonus de fin d&rsquo;année. Et l&rsquo;inspecteur nous a sorti cela avec le plus grand sérieux. Comment voulez dire ça à un membre du public ?&raquo;</em> Autre situation frôlant le ridicule : un abonné a appelé pour informer la CWA que les ouvriers étaient venus réparer une grosse fuite mais que, n&rsquo;ayant pas d&rsquo;outils, étaient repartis sans rien faire. <em>&laquo;Dans ce genre de situations, on essaie &lsquo;teign difé&rsquo;, mais quoi qu&rsquo;on dise, on se fait taper sur les doigts&raquo;</em>, lâche une de nos interlocutrice en ajoutant que <em>&laquo;les abonnées ne sont pas au courant du fonctionnement du réseau de la CWA qui est aussi rouillé que ses tuyaux&raquo;.</em></p>