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Nadine Mootoo, skipper au féminin

8 octobre 2016, 19:40

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Nadine Mootoo, skipper au féminin

En début de semaine, les plaisanciers réunis au sein de la Federation of Pleasure Craft Owners (FPCO) se sont rendus à la Tourism Authority. Ils y ont rencontré la présidente de cette instance, Khoudijah Maudarbocus-Boodoo, afin de discuter des nouveaux règlements du ministère du Tourisme les concernant. L’occasion de rencontrer Nadine Mootoo, plaisancière et seule femme membre de la fédération à Maurice.

«Mo finn né lor bor lakot. Mo éna lipié marin mé pourtan lor later mo finn eséyé…» Cette chanson aurait pu avoir été écrite pour Nadine Moutou. Née à Mahébourg, elle est une véritable «zanfan lakot». Sourire en coin et une vague étincelle dans les yeux, elle raconte son enfance au bord de la mer. «La mer a toujours été mon élément. Petite, j’y passais le plus clair de mon temps. Pa ti éna bato, mé mo ti touzour dan lamer! Pé zwé, pé nazé!»

Cette enfance, elle s’arrêtera à 13 ans, faute de moyens. Nadine prend de l’emploi dans une usine. Un travail qu’elle accepte comme s’il s’agissait de sa destinée. Après avoir arrêté l’école à 13 ans, elle devait s’en contenter. Pourtant, elle détestait ce qu’elle faisait. Mais personne n’aime ça, travailler, non? Ce n’est que quand elle déménage à Trou-d’Eau-Douce pour habiter avec sa mère et son beau-père qu’elle daigne arrêter, prétextant que l’usine se situe trop loin. Mais ce n’était qu’une excuse car, au fond, elle savait qu’elle était capable de mieux.

Une fois à Trou-d’Eau-Douce, en attendant qu’une autre usine lui offre du travail, elle se met à la pêche avec son beau-père. Elle aime ça. Tellement que cela ne la dérange pas de se lever à des heures indues et de «lev kazié». Enfin, elle a une pirogue qui lui permet de se rendre en mer. Elle n’a jamais été aussi heureuse, affirme-t-elle.

C’est d’ailleurs là-bas qu’elle a rencontré l’âme sœur, Émilien. Il était propriétaire d’une petite pirogue. C’est dans ce «ti bato dibwa» qu’il emmenait les touristes à l’Île-aux-Cerfs tous les jours. Elle commence donc à l’aider. Tous les deux font l’aller-retour plusieurs fois par jour. La suite, vous la connaissez: ils tombèrent amoureux, se marièrent et… voulurent beaucoup d’enfants.

Sauf que pour avoir une famille, ils ne pouvaient se contenter de leur pirogue, bien qu’elle soit très «cosy». Ils avaient besoin d’une vraie source de revenus. Naquit alors The Pearl, le premier fruit de leur dur labeur. Ils s’endettent jusqu’au cou, mais croient dur comme fer que cela en vaut la peine. Pendant longtemps, ils tiennent à garder leur petite pirogue, symbole d’un début rude mais porteur d’espoir. Cependant, celle-ci, qui devient vite obsolète, n’intéresse plus les clients. Et si Nadine et Émilien veulent investir dans plus de bateaux, il leur faudra la vendre. En même temps, Trou-d’Eau-Douce devient une proie pour les plaisanciers et la  clientèle diminue.

Enceinte et en mer

En 2000, ils décident de s’installer à Bel-Ombre. À ce moment-là, l’endroit est en pleine ébullition. Ils achètent donc un second bateau – désormais, c’était un pour Nadine et un pour Émilien. Pour la première fois depuis des années, les tourtereaux se retrouvent seuls. Ils s’occupent chacun d’une région bien particulière. Entre-temps, Nadine tombe enceinte. Mais avec un business en pleine expansion, la grossesse n’est pas une raison valable de s’arrêter.

Enceinte jusqu’aux yeux, Nadine se rend quand même en bateau tous les jours. Et à peine une semaine après la naissance de la petite Elora, Nadine retourne en mer. Elle reprend bien vite sa petite routine… loin du tranquille «métro, boulot, dodo». En effet, elle se retrouve souvent à faire tanguer le bateau à Noël ou au Nouvel an. Mais elle aime ce qu’elle fait et, dit-elle, ça n’a pas de prix.

À la demande des clients, Nadine décide de commencer à offrir des excursions de snorkelling et d’autres activités nautiques. «Mo ador séki mo fer. Pa zis parski mo kontan lamer, mé mo osi santi ki mo pé kontribié a mo péi. Nou enn bon ti lékip. Létan rant lor L’Île-aux Bénitiers, éna santer séga, enn ti restoran. Li enn gran lasenn-sa. Nou travay avek nou konsitwayin et pou nou konsitwayin. Mo ador sa.» Au fil des années, elle a aussi appris à parler l’anglais, le français et l’italien. Où? Sur le tas, avec les touristes.

Aujourd’hui, Nadine a un second enfant, Achille. Il a six ans. Et ces quelques heures en famille perdues à Noël, c’est tous les week-ends qu’elle les rattrape… en allant en mer! «Mé atansion, mo pa lé ki mo zanfan aret lékol. Mo anvi ki zot éna zot lédikasion. Mé si zot anvi travay lor lamer apré, si zot kontan sa, abé mo anvi ki zot fer li.»