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Après six ans: la pension d’invalidité d’un jeune schizophrène supprimée

2 octobre 2016, 15:15

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Après six ans: la pension d’invalidité d’un jeune schizophrène supprimée

«Mo res bet kouma bann dockter Sékirité sosial inn kapav dir ki dégré d’invalidite Jason moins ki 60 % alor ki pandan six banané zot inn truv lé kontrer», déclare cette quadragénaire, mère de trois enfants dont Jason, 22 ans, est le cadet. Christiane Vaneeathan vit séparée de son époux depuis dix ans et travaille dans une usine de confection de sous-vêtements pour un salaire ne dépassant pas les Rs 7 000.

Sa fille aînée est mariée et vit à La Réunion alors que son benjamin de 15 ans réside avec son père. Christiane Vaneeathan héberge sa mère de 70 ans qui a déjà commencé à montrer les premiers signes de la maladie d’Alzheimer et Jason que les médecins de l’hôpital Brown-Séquard ont diagnostiqué de schizophrène.

Christiane avait remarqué qu’en grandissant, Jason n’était pas comme les autres. «Li ti dan so kwin», explique-t-elle. De plus, il présentait des troubles d’apprentissage qui lui ont fait redoubler sa standard VI sans succès. Il a aussi suivi des cours préprofessionnels pendant trois ans qui n’ont pas donné les résultats escomptés et n’a supporté le NTC3 que pendant quelques mois. Les instituteurs comme les enseignants qui l’ont encadré ont été unanimes à dire «ki li drol. Li pa kozé ek so bann rezonnman kouma enn zenfan trwa zan». Mais c’est à l’âge de 15 ans que Christiane a commencé sérieusement à s’inquiéter lorsque l’adolescent s’est mis à parler seul, à avoir des hallucinations et à souffrir d’insomnie, ce qui lui fait faire les cent pas dans la maison.

N’ayant pas les moyens de consulter un psychiatre privé, elle l’a emmené à l’hôpital Brown-Séquard où un nom a été finalement posé sur le mystérieux mal dont souffre l’enfant. En sus de médicaments pour atténuer les symptômes de sa schizophrénie, les médecins lui ont aussi prescrit des somnifères. Jason étant incapable de travailler de façon continue, Christiane a fait des démarches auprès du ministère de la Sécurité sociale pour qu’il obtienne une pension d’invalidité. C’est le cas depuis six ans. Toute personne prétendant à une telle pension doit être examinée deux fois l’an par les médecins de ce ministère. Et cela a été régulièrement le cas de Jason.

Comme Christiane et sa famille ne possèdent pas un toit à eux et que les loyers sont chers, ils ont dû déménager à plusieurs reprises. Croyant avoir finalement trouvé la paix en louant avec d’autres parents une maison à étage à Curepipe, la quadragénaire qui payait la moitié du loyer, soit Rs 5 000, a été obligée de se mettre en quête d’un nouveau gîte depuis quelques mois car ses proches ont déménagé. N’ayant pu s’absenter du travail, c’est seul que Jason s’est rendu à son dernier examen médical à la Sécurité sociale. Il a déclaré à sa mère par la suite que tout s’était bien passé. Peu après, elle a noté que les médecins, de l’hôpital Brown-Séquard où Jason se rend tous les deux mois pour obtenir ses médicaments, avaient diminué le dosage des calmants de son fils, ne lui prescrivant plus du 50 mg mais du 25 mg. Au bout d’un certain temps, ses insomnies ont repris et il s’est remis à parler seul. «Li kozé, li santé. Li kroir lizour. So rezonnman bet. Li dir ou li envi res Lafrik

S’il n’est pas violent au point «pou baté», il lui arrive de s’exciter. «Ler li koumsa, mo pa lager ar li, pou zis dérézoné. Mo les li calmé.» Comme il a à nouveau du mal à s’endormir, elle a été obligée de redoubler sa dose quotidienne de somnifères pour qu’il puisse faire des nuits complètes. Sans compter que depuis peu, Christiane a de l’eau au genou et doit aller régulièrement faire de la physiothérapie à l’hôpital Victoria en début de matinée avant de courir au travail.

Le 2 septembre, son monde bascule. Elle reçoit une lettre l’informant que le ministère n’entretiendra plus sa demande de pension d’invalidité pour Jason car le Medical Board a estimé que son handicap est inférieur à 60 %. «C’est une injustice», estime-t-elle. Ayant un mois pour faire appel, elle a contesté cette décision mais les procédures de réexamen de demandes prennent du temps. «Mo garson éna enn malade mental ek li pa kapav travay tous les zours. Linn séyé kouma plombier enn dé foi mé li pa kapav travay sink zour lor set.» Fait que confirme Jason, qui passe ses journées devant la télévision. «Ena kitsoz ki mo nepli kapav fer. Mo senti mo latet fatigué. Mo lékor ek mo lézo feb. Mo kapav fer enn ti louvraz dan lakaz ek al impé légliz samem tou», réplique-t-il laconiquement.

Christiane est lasse de cette vie faite de lutte perpétuelle. «Mwa mo pou touzour truv enn bousé manzé pou mo garson. Me ki pou arive ler mo ferm mo lizié ? Kouma li pou fer pou viv ek aste so bann ti zafer ki li bizin ? Se enn bel linzistis.»

Interrogée, Fazila Daureeawoo, la ministre de la Sécurité sociale, qui est rentrée au pays jeudi soir et qui a été bousculée par ses obligations ministérielles – Conseil des ministres et préparatifs en vue de la Journée mondiale des personnes âgées – a chargé un de ses cadres d’enquêter sur le cas de Jason Bhagan. Nous devrions être fixés bientôt.