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Me Mario Zanchetti: «L’amateurisme de Maurice a affaibli son dossier»

18 septembre 2016, 17:32

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Me Mario Zanchetti: «L’amateurisme de Maurice a affaibli son dossier»

 

Votre cliente Nandanee Soornack ne sera pas extradée vers Maurice. Quelle a été sa première réaction en apprenant la nouvelle jeudi 15 septembre ?
Elle était très heureuse et extrêmement soulagée. C’est par courriel que mon cabinet a été informé du verdict de la cour de Bologne, jeudi. J’ai tout de suite appelé ma cliente pour lui apprendre la bonne nouvelle.

Quel était son état d’esprit le temps du procès devant la cour d’appel de Bologne?
Nandanee Soornack s’est impliquée personnellement dans cette bataille juridique. D’habitude, les demandes d’extradition ne sont jamais gagnées d’avance car dans bon nombre de cas, les cours italiennes ont donné leur feu vert pour que cela se fasse. Nous nous étions donc préparés au pire.

Que reprochait-on à Nandanee Soornack ?
Vous devez savoir que l’accusation initiale contre ma cliente portait sur le blanchiment d’argent. Cela, en se basant sur l’histoire de la douzaine de valises qu’elle aurait embarquée le jour de son départ pour l’Italie, le 11 décembre 2014. Mais, quand le gouvernement mauricien a formellement émis sa demande d’extradition, cette charge a été abandonnée pour être remplacée par celle de trafic d’influence, avec l’affaire Dufry-Frydu. Ici aussi, l’Etat mauricien n’a pu prouver ses dires. Je suis certain que l’amateurisme avec lequel les charges ont été formulées a affaibli le dossier mauricien.

Autre chose qui a pesé dans la balance contre Maurice ?
La décision est claire. L’extradition sera refusée si les droits humains de ma cliente sont bafoués. L’autre point pris en compte est l’absence d’un traité d’extradition valide entre Maurice et l’Italie.

Lors du procès en décembre dernier, votre cliente s’est dit victime d’une «vendetta politique». Pourquoi ?
Les accusations formulées en sont la preuve. Tous les documents venant de la partie mauricienne ont été produits en cour par votre Attorney General, Ravi Yerrigadoo, dont l’implication personnelle et politicienne dans cette affaire n’est pas un secret. Il va sans dire que nous avons versé au dossier l’affidavit dans lequel les représentants de la franchise de produits hors taxes Dufry ont dénoncé votre Attorney General ainsi que deux autres ministres (NdlR, Roshi Bhadain et Pravind Jugnauth).

L’autre pièce à conviction que nous avons présentée devant le juge est le traitement accordé par la police à l’ancien avoué de Nandanee Soornack, Me Pazhany Thandrayen (NdlR, l’avoué a été interpellé à sa descente d’avion, le 14 mars 2015, alors qu’il revenait d’une session travail avec sa cliente. Ses documents confidentiels et ordinateurs portables avaient été saisis).

Après sa requête pour un «gagging order» devant la Cour suprême à Maurice, en 2013, c’est la deuxième fois que votre cliente utilise l’argument qui repose sur la protection de son enfant dans une bataille juridique. Cette stratégie semble payante…
C’est en effet l’une des nombreuses garanties qu’on a demandées à la partie mauricienne, sans toutefois obtenir de réponse claire et nette.

Maurice a signifié son intention de faire appel du jugement. Êtes-vous d’attaque pour une nouvelle joute ?
Avant de faire appel, le gouvernement doit attendre la publication complète du jugement. Soit une quinzaine de jours. Le gouvernement peut saisir la cour de cassation italienne pour faire renverser le jugement. Ma cliente n’a commis aucun crime ni à Maurice, ni ailleurs. Je reste convaincu que la décision ne sera pas renversée.

Il y a d’autres légistes réputés en Italie. Comment est-ce que Nandanee Soornack est tombée sur vous ?
Mademoiselle Soornack m’a appelé personnellement pour que je rejoigne son panel d’avocats, aux côtés de Raj Boodhoo. Et en remplacement d’un autre homme de loi italien, qui s’est désisté durant le procès.

Sinon, votre cliente vous a-t-elle dit ce que contenait la douzaine de valises qu’elle aurait embarquées le jour de son départ pour l’Italie, le 11 décembre 2014 ?
Ma cliente n’a jamais quitté Maurice avec le nombre de valises que certains veulent faire croire. I hope you don’t give any credit to the luggage tale any more. Cette histoire ne tient plus la route surtout que les accusations de blanchiment d’argent et de trafic d’influence ont été rejetées par la cour. Ma cliente n’a commis aucun crime.

Envisage-t-elle de rentrer à Maurice ?
Nous n’en avons pas encore discuté.