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Sydney Selvon: «SSR a été racheté par son fils Navin Ramgoolam»

6 juillet 2016, 09:15

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 Sydney Selvon: «SSR a été racheté par son fils Navin Ramgoolam»

 

Sydney Selvon, ancien rédacteur en chef du Mauricien et ancien attaché de presse de Raj Dayal, a pris plus d’un à contrepied en affirmant que les Chagos n’ont pas été vendus en 1965. Pourquoi cette prise de position? Explications.

Pourquoi dites-vous que les Chagos n’ont pas été vendus en 1965 (NdlR, éditorial de Nad Sivaramen du mercredi 13 juillet) malgré les documents officiels de «vente» et les trois millions de livres sterling versées au Trésor public de Maurice?


Toute vente proclamée ou documentée des Chagos est nulle et non avenue dans le droit international. En particulier, le droit des peuples à l’autodétermination affirmée à plusieurs reprises par des résolutions de l’Assemblée générale des Nations unies. Ces résolutions font partie du droit international qui mena d’ailleurs à une guerre contre l’Irak conduite par les États-Unis et leurs alliés. Une guerre basée sur des violations irakiennes alléguées des résolutions des Nations unies contre la souveraineté du Koweït.

On ne peut pas vendre une partie de son pays sans l’exercice du droit à l’autodétermination en bonne et due forme, selon la procédure prévue dans la loi internationale sur la décolonisation introduite bien avant 1965. Soit en 1914 par la résolution 1514 votée par les Nations unies qui reste toujours en vigueur et a été renforcée par des résolutions subséquentes.

Qu’est-ce qui vous fait dire que la souveraineté des Chagos est restée mauricienne?
Le Tribunal international du droit de la mer (ITLOS) a tranché à l’unanimité en faveur de l’État mauricien contre la mise en place du parc marin unilatéralement et, ajoutent les juges, illégalement décrété par Londres dans le dos de Maurice. Ils ont aussi décidé que les Chagos doivent être rendus à l’État mauricien lorsque ces îles ne sont plus nécessaires à des fins de défense. Maurice a donc obtenu une nouvelle fois la reconnaissance du droit différé de souveraineté selon l’engagement signé de Londres envers Maurice en 1965. Accord qui fait partie aujourd’hui du droit international de la mer. On peut parler de souveraineté alternative mauricienne acquise en droit international de la mer à partir de la décision des juges. Pour citer le jugement, «that the United Kingdom’s undertaking to return the Chagos Archipelago to Mauritius when no longer needed for defence purposes is legally binding».

Pourtant, le combat de Maurice pour la souveraineté existe bel et bien?
Fin légiste, le Premier ministre, sir Anerood Jugnauth (SAJ), sait ce qu’il dit lorsqu’il affirme qu’il vaut mieux aller devant la Cour de justice internationale. Le combat existe donc au plus haut niveau de l’État mauricien et parmi ceux-là mêmes qui ont affirmé faussement que les Chagos avaient été vendus, notamment les dirigeants de l’époque du Parti travailliste et du Parti mauricien social-démocrate, et qui ont trompé l’opinion publique, il y a eu des retournements de veste.

Sir Seewoosagur Ramgoolam (SSR) a finalement admis qu’il y a eu chantage pour l’indépendance de la part de Londres, ce qui renforce en fait l’illégalité du retranchement du territoire mauricien. SSR a été racheté par son fils, Navin Ramgoolam, qui a traîné les Anglais avec succès devant ITLOS. SAJ, qui a participé aux négociations de 1965, ne reconnaît même pas le British Indian Ocean Territory et tout comme lui, il faut également rendre hommage à l’ancien Premier ministre Paul Bérenger pour n’avoir jamais fléchi lui aussi dans le combat pour la souveraineté et pour s’être joint à l’actuelle coalition nationale de tous les partis parlementaires pour ce combat.

Vous êtes aussi de ceux qui pensent que Maurice a un cas juridique «solide». Quelles sont les armes de Maurice face aux deux grandes puissances que sont le Royaume-Uni et les États-Unis?
Le cas est solide après le jugement de l’ITLOS. Il l’est encore plus du fait que deux des juges d’ITLOS, James Kateka et Rüdiger Wolfrum ont déclaré dans un «concurring and dissenting opinion», que le Tribunal aurait dû décréter l’illégalité de la cession 1965 dans le droit international. Mais les trois autres juges ont écrit que le Tribunal a été sollicité pour se prononcer essentiellement sur la question de parc marin.

Or, à la Cour internationale de La Haye, Maurice sera en mesure de demander que sa souveraineté déférée soit reconnue comme immédiate sous plusieurs résolutions votées par l’Assemblée générale des Nations unies. Maurice devrait arguer aussi, comme l’a dit au Parlement la députée indépendante Danielle Selvon, que sur les sept atolls et la soixantaine d’îles de l’archipel des Chagos, seul Diego Garcia est utilisé à des fins de défense depuis plus d’un demi-siècle après le démembrement de l’État mauricien. Sans compter que Londres et Washington ont violé une dizaine de conventions et des lois internationales telles qu’énumérées par la députée au Parlement le mardi 5 juillet.

Conformément à l’accord de 1965, reconnu par ITLOS, tous les atolls et îles non-utilisés à des fins de défense devraient avoir été rendus à Maurice depuis longtemps. Ce jugement d’ITLOS suffit à amener Londres à rendre ces îles et atolls inutilisés et laissés aux touristes de passage qui viennent pêcher et polluer cette partie du territoire mauricien.

À quoi doit s’attendre Maurice dans ses relations avec Londres et Washington si l’affaire est portée devant la Cour de justice internationale?
Une invalidation du retranchement des Chagos en 1965 ne voudra pas dire la fin de l’amitié entre Maurice d’une part, et Londres et Washington, d’autre part. Au contraire, nous coopérons déjà avec eux dans la lutte contre le terrorisme et la piraterie internationaux et continuerons à le faire «for defence purposes» de toute notre région de l’océan Indien «and beyond».

Que répondez-vous aux Chagossiens qui veulent une souveraineté britannique sur les Chagos?
Concernant les Chagossiens et la question de souveraineté, celle-ci repose sur le droit international dans le contexte d’une souveraineté mauricienne déjà reconnue comme alternative. Les Chagossiens sont légalement Mauriciens. Leurs organisations devront travailler avec Maurice sur leur réinstallation car Maurice a l’intention de mettre en place des secteurs agro-industriels et de l’éco-tourisme viables avec la protection environnementale stricte. Ils doivent être réalistes et ne pas inviter les attitudes hostiles de leurs compatriotes mauriciens. Ils étaient à l’origine des Mauriciens employés sur les Chagos et ils seront réhabilités et autorisés à travailler à la base quand ils retourneront dans les îles.