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Le Parlement italien ouvre le débat sur la légalisation du cannabis

25 juillet 2016, 12:20

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Le Parlement italien ouvre le débat sur la légalisation du cannabis

 

Les députés italiens se penchent à partir de lundi sur une proposition de loi légalisant l'autoproduction et l'usage du cannabis récréatif, qui suscite une forte opposition et n'a pas vraiment le soutien du gouvernement.

Le texte maintient l'interdiction totale de vente entre particuliers mais propose d'autoriser à cultiver jusqu'à 5 plants de cannabis par personne et à posséder jusqu'à cinq grammes sur soi et 15 grammes à la maison.

Il serait interdit de fumer du cannabis dans les lieux publics ou au travail, mais la loi prévoit aussi la possibilité pour l'Etat de faire cultiver et vendre le cannabis, un peu à l'image de l'industrie du tabac.

Une guerre sans effet

Comme plusieurs des pays européens ou États américains qui ont franchi le pas ces dernières années, les partisans de ce projet partent d'un constat d'échec: la répression internationale n'a pas empêché la diffusion de la consommation de cannabis.

Dans son dernier rapport annuel, la Direction nationale anti-mafia italienne (DNA) avait elle-même dénoncé «l'échec total de l'action répressive», ainsi que «l'impossibilité absolue d'augmenter les efforts» de répression de la consommation de cannabis.

Coûteuse répression

Pire encore, en Italie, où le cannabis à usage thérapeutique est légal, la répression a drainé d'importantes ressources policières, judiciaires et financières.

Aussi la DNA soutient-elle elle-même une dépénalisation sous conditions de la consommation de cannabis afin d'alléger «la charge judiciaire et de libérer des ressources disponibles pour les forces de l'ordre et la magistrature pour lutter contre d'autres formes de criminalité».

Ouverture européenne

Le débat dépasse largement l'Italie: en Europe, où le cannabis thérapeutique est légal dans une dizaine de pays, la République tchèque, les Pays-Bas et l'Espagne ont choisi de tolérer aussi la consommation personnelle à usage récréatif.

Aux États-Unis, si la loi fédérale interdit la culture, la vente et l'utilisation du cannabis, 23 États le permettent à des fins médicales et quatre d'entre eux, plus la capitale Washington, ont légalisé ces dernières années sa consommation à des fins récréatives.

Renzi pas pressé

En France, un ministre avait relancé le débat en avril en se prononçant contre la «prohibition», mais le gouvernement avait rapidement fait savoir qu'il n'avait pas engagé de réflexion sur une éventuelle dépénalisation. En mai, le chef du gouvernement italien, Matteo Renzi, avait lui aussi déclaré que la question n'était "pas à l'ordre du jour" de son équipe.

Elle arrive quand même devant le Parlement sous la forme d'une proposition de loi déposée par le sénateur radical Benedetto Della Vedova, également secrétaire d'Etat aux Affaires étrangères, et contresignée par environ 200 députés et sénateurs.

La droite au combat

Si l'issue du débat reste incertaine, il est déjà clair que le texte fait face à l'opposition farouche d'élus catholiques qui entendent le noyer sous une marée d'amendements. Entre les questions de procédure et la pause estivale, les discussions sur le fond du projet ne sont pas attendues avant septembre.

Area popolare (AP), un rassemblement d'élus du centre-droit catholique, «a présenté 1300 amendements pour dire non à l'absurde proposition» de loi, a déclaré le président des députés du mouvement, Maurizio Lupi.

«Nous sommes absolument opposés à la légalisation, à l'idée de faire passer le message qu'il est possible de fumer librement un joint, sans problème», a poursuivi M. Lupi, dénonçant ce projet «aussi bien du point de vue de la santé publique que de la lutte contre la criminalité».

La gauche solide

Les partisans assurent en revanche le contraire. Selon le texte du projet de loi, «l'expérience des États qui ont réglementé de manière légale le marché de la marijuana démontre que le nombre de consommateurs n'a pas augmenté, ni l'impact social et sanitaire», disent-ils dans leur projet. La seule chose qui ait augmenté, ce sont les rentrées fiscales, insistent-ils.

Selon la société Nativa, qui a créé un site internet en début d'année pour proposer des boutiques franchisées dès que le commerce serait légal, la consommation des Italiens est estimée à environ 3 millions de kg de cannabis par an.