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Réduction de la dette publique : exercice d’équilibriste

14 juillet 2016, 22:10

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Réduction de la dette publique : exercice d’équilibriste

 

La gestion de la dette sera l’une des priorités du Grand argentier. D’autant plus que selon les normes du FMI, le taux de la dette publique a franchi la barre des 65 % du PIB. Pravind Jugnauth devra trouver des mesures pour réduire cette pression.

L’équation du ministre des Finances est simple. Du moins sur papier. Il s’agit de prendre des mesures pour limiter les dépenses publiques et favoriser la croissance. Et ainsi donner plus de marge à Pravind Jugnauth pour réduire la dette publique. «La gestion de la dette sera certes une des priorités de Pravind Jugnauth», indique un membre opérant dans la cellule chargée de préparer le prochain budget.

Selon ce dernier, «il n’y a pas mille solutions». Selon lui, il faut réformer les institutions publiques pour réduire leurs dépenses de fonctionnement. «Ce qui va mécaniquement réduire les pressions sur les dépenses publiques.» Pour sa part, un conseiller du ministre estime qu’«une bonne gestion de la dette publique couplée à des coupes budgétaires devrait aider à équilibrer l’exercice budgétaire».

PLUS DE 65 % DU PIB SELON LE FMI

À Rs 189,8 milliards en mars 2016, soit une année après l’exercice budgétaire de Vishnu Lutchmeenaraidoo, la dette domestique (excluant les prêts extérieurs) a augmenté de Rs 21 milliards (Rs 168,7 milliards). Ce qui représente un peu plus de 46,4 % du Produit intérieur brut (PIB), selon les chiffres du ministère des Finances.

Toutefois, si la dette domestique est combinée aux prêts étrangers – ceux-ci s’élevant à Rs 54 milliards en mars dernier –, elle devrait tourner autour de Rs 243 milliards aujourd’hui. Du coup, la dette publique est passée à 59,6 % du PIB. Résultat : chaque habitant croule sous des dettes de Rs 200 000.

Pire, si on se réfère aux normes du Fonds monétaire international (FMI), le taux de la dette publique a déjà dépassé 65 % du PIB en mars dernier. En effet, le FMI inclut dans ses calculs les dettes des entreprises publiques, qui sont du reste garanties par l’État. En décembre 2015, l’endettement des entreprises publiques montait à Rs 24,2 milliards pour baisser à presque Rs 23 milliards au premier trimestre 2016.

L’ÉTAT A FAILLI DANS SA MISSION

La question qui se pose aujourd’hui : quel est le taux de la dette publique qui est économiquement gérable pour le pays ? À première vue, les réponses divergentes entre analystes financiers et experts économiques. L’ex-Grand argentier Vishnu Lutchmeenaraidoo avait, lui, estimé la dette publique à 54,2 % du PIB d’ici juin 2016. Or, ce taux a déjà été atteint pour la période se terminant au 31 décembre 2014.

Avec la dette publique dépassant 59,6 % du PIB – et 65 % du PIB, selon les normes du FMI –, le gouvernement a failli dans sa mission de ramener ce taux à 58,6 % du PIB. «Dépasser ce taux n’est pas un drame en soi. Ce qui importe, c’est la composante de la dette, pour voir si celle-ci est financée localement ou par des institutions internationales», explique Bilal Sassa, expert financier et directeur de l’antenne locale d’une multinationale.

De souligner que «si le financement de la dette est assuré par des institutions domestiques, je ne vois aucun inconvénient si elle dépasse une limite». En revanche, fait-il comprendre, une dette libellée en devises pose de sérieux problèmes. «Notamment auniveau des fluctuations liées au taux de change ou encore à l’absence de contrôle des autorités sur un prêt important négocié à l’étranger s’il y a défaut de paiement.»

The Public Debt Management Act de 2008 prévoit que la dette publique soit ramenée à 50 % du PIB d’ici 2018. «C’est impossible d’atteindre un tel objectif à l’étape actuelle du développement de Maurice. D’ailleurs, je ne comprends pas la démarche de limiter la dette à 50 % du PIB», confiait récemment Gerald Lincoln, Managing Partner chez Ernst & Young. Selon lui, Maurice peut très bien s’endetter jusqu’à 80 % de son PIB. À condition, bien évidemment, que ses investissements soient injectés dans de gros projets infrastructurels qui dégageraient des bénéfices pour le pays et amélioreraient les conditions de vie de la population.

RÉPARTITION DE LA DETTE PUBLIQUE

Force est de constater que Maurice n’a jamais atteint un niveau élevé de dette publique. Sauf en 1985, où ce taux était à 71,7 % du PIB. Avant de retomber à 50 % dans les années 2000. Néanmoins, ces dernières années, le niveau de la dette a augmenté de façon continue.

Toujours est-il que la dette publique est un paramètre économique qui ne peut être analysé en isolation. Azad Jeetun, économiste et ex-directeur de la défunte Mauritius Employers’ Federation, estime qu’elle doit être vue et comparée par rapport à d’autres objectifs économiques. «Même si le taux de la dette à 60 % du PIB est soutenable, un ralentissement de la croissance économique à l’avenir ou encore une augmentation du taux d’intérêt pourrait très bien le fragiliser», dit-il. Et d’insister que le fait que la répartition de la dette publique entre celle qui est locale et étrangère ne s’impose pas aujourd’hui pour le pays vu que la composante étrangère est insignifiante (moins de 20 %) et ne constitue pas une menace.

DIVERS PROJETS POUR LE PAYS…

Bien entendu, le taux de la dette publique ne doit pas être un frein au développement économique du pays. Selon Gérald Lincoln, l’avancement d’un pays passe par des projets qui le transforment. D’où le besoin d’avoir de gros chantiers de construction.

Quid de la donation indienne de Rs 12,6 mds ?

<p>Au ministère des Finances, on souligne que ce montant permettra certainement d&rsquo;améliorer la marge de manoeuvre de Pravind Jugnauth. Même si au final les Rs 12,6 milliards ne seront pas injectées dans le circuit des dépenses courantes mais au sein du capital de fonctionnement.</p>