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Chômage: les chiffres qui font débat

11 juillet 2016, 22:12

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Chômage: les chiffres qui font débat

L’enjeu n’est pas des moindres: créer 100 000 emplois d’ici 2019. C’est l’ambition du gouvernement de sir Anerood Jugnauth dans son Economic Mission Statement: Vision 2030, énoncé en 2015. Or, le taux de chômage demeure quasi stagnant avec 40% de jeunes sans emploi. Mais pour certains, la réalité est tout autre. Raison pour laquelle le prochain Budget est si attendu. Éclairage.

43 % des chômeurs ont moins de 25 ans

Il y a 43 500 chômeurs à Maurice, selon les derniers chiffres de Statistics Mauritius, pour le premier trimestre de 2016. 43% d’entre eux ont moins de 25 ans. De plus, le taux de chômage pour cette période était de 7,6%, soit un peu moins que la période correspondante en 2015.

Statistics Mauritius prévoit que le taux de chômage enregistre une légère baisse cette année pour atteindre 7,7%. Environ 29 900 chômeurs, soit 69% du nombre total de sans-emploi, ont de l’expérience professionnelle et 55% des sans-emploi étaient célibataires.

Un taux faussé ?

Si le taux de chômage tourne autour de 7% selon Statistics Mauritius, ce chiffre est loin de faire l’unanimité. Dans un article paru dans l’express le jeudi 7 juillet, le ministère du Travail soulignait que le taux de chômage ne reflète pas la réalité, arguant notamment que le nombre de sans-emploi a baissé, grâce au Youth Employment Programme (YEP). On fait également ressortir que le gouvernement ainsi que le privé créent de l’emploi et que 50% des jeunes enregistrés sous le YEP ont été embauchés.

Or pour l’économiste Azad Jeetun, l’enregistrement au bureau du Travail est un couteau à double tranchant. Il rappelle qu’outre les chômeurs, il y a des employés qui se sont enregistrés «dans l’espoir d’avoir un meilleur poste dans la fonction publique».

Il est cependant difficile de faire la distinction. Le Chief Operating Officer de Business Mauritius, Pradeep Dursun, fait valoir que la méthode utilisée par Statistics Mauritius est internationale. «Mais il faudra peut-être revoir la méthodologie à l’avenir afin de pouvoir distinguer les chômeurs qui cherchent un emploi et ceux qui travaillent déjà mais qui cherchent un nouveau travail.»

«Viser les 6 %»

Si près de 43 000 membres de la population active ne sont pas productifs car étant au chômage, cela n’est-il pas un manque à gagner pour l’économie? Quel est l’impact sur l’économie? Ce calcul qui n’a pas encore été fait jusqu’ici ne peut être fait au pied levé, insiste Azad Jeetun. Mais il est clair, selon l’économiste, que ces sans-emploi ont un impact certain sur l’économie.

Quel taux de chômage serait idéal? Sachant que le taux de chômage de 0% n’existe pas, Azad Jeetun considère qu’un chiffre maximum de 6% est tolérable.

Ces secteurs qui peinent à recruter

Aurélie Marie, responsable du recrutement et de la communication chez MyJob, avance que le secteur des technologies de l’information et de la communication (TIC) fait partie de ceux qui peinent à recruter, notamment pour les postes de développeurs pour les applications mobiles ou le cloud computing. Fait notable: les jeunes s’intéressent de moins en moins au travail de vendeur et autres fonctions commerciales, dit-elle. «Nous avons noté que la moyenne d’âge des postulants pour ce genre de poste tourne autour de 37 à 38 ans alors que ceux âgés entre 25 et 30 ans se font assez rare.»

Il est aussi devenu difficile de trouver des chauffeurs, conducteurs de chariot élévateur (forklift), storekeepers et des candidats pour d’autres postes dans l’opérationnel. A contrario, la demande dépasse largement l’offre pour les postes dans l’administration et dans la comptabilité, fait ressortir Aurélie Marie. «Pour une annonce dans la comptabilité, on peut se retrouver avec 600 CV.»

La question de «mismatch»

Comment mettre un terme à ce problème qui persiste depuis plusieurs années? Selon la responsable du recrutement et de la communication chez MyJob, il est temps d’entreprendre une véritable recherche auprès des entreprises afin de faire un état des lieux de leurs besoins pour au moins 15 ans.

«Il faut également établir un bon career guidance dans les collèges dès la Form III et privilégier un maximum de parcours professionnels», soutient Aurélie Marie. Autre mesure préconisée: la formation en alternance. Les universités et entreprises y ont de plus en plus recours. À titre d’exemple, la Mauritius Export Association a lancé l’année dernière un Dual Training Programme en partenariat avec l’université des Mascareignes. La MCCI Business School offre également cette possibilité pour certains cours.

Quid des diplômés au chômage? Pradeep Dursun est d’avis que les chiffres officiels ne reflètent pas forcément la réalité. «Nous avons observé à notre niveau que parmi les diplômés au chômage que nous recevons pour placer en entreprise, plusieurs travaillent déjà mais sont à la recherche d’un autre travail.» Ainsi, ce groupe pourrait, en fait, être réduit de moitié, fait-il comprendre.

Les objectifs du gouvernement

Pour arriver à la création de 100 000 emplois d’ici 2019, le gouvernement souhaite développer le secteur des services financiers notamment le Captive Insurance, les TIC et l’économie bleue. Le secteur manufacturier de l’exportation ainsi que les petites et moyennes entreprises auront aussi une attention particulière.

Programmes de formation

Quel sort pour les recalés de l’éducation? Au niveau de Business Mauritius, l’on compte se concentrer sur des programmes de formation destinés aux jeunes en échec scolaire et qui peinent à trouver de l’emploi. «Notre focus sera sur le volet vocationnel car nous pensons qu’il faut inclure tous les entrants sur le marché du travail, dit Pradeep Dursun. L’idée est de commencer à travailler avec certains secteurs, d’établir une hiérarchie des métiers, les décomposer en termes de tâches et de proposer des formations en ce sens.» Le YEP lancé par le gouvernement en 2013 et le Workfare Programme sont d’autres initiatives.

Les chiffres clés

<p>7,7 % &ndash; Le taux de chômage prévu cette année.<br />
	43 500 &ndash; Le nombre de chômeurs au 1er trimestre 2016.<br />
	18 700 &ndash; Le nombre de chômeurs âgés de moins de 25 ans.<br />
	4 300 &ndash; Le nombre de chômeurs sans CPE ou l&rsquo;équivalent.<br />
	16 200 &ndash; Le nombre de chômeurs sans SC ou l&rsquo;équivalent.<br />
	+ 2 200 &ndash; Prévision du nombre d&rsquo;emplois créés cette année.<br />
	528 200 &ndash; Le nombre de Mauriciens employés au 1er trimestre 2016.</p>